AAARGH
S'il existait, comme
on dit, une justice égale pour
tous, Valérie Igounet et
le responsable des éditions
du Seuil devraient se retrouver
ensemble sur la dure banquette
des prévenus à la
XVIIe
chambre du tribunal correctionnel de Paris. Et -- on verra
plus
loin pourquoi -- Jean-Claude Pressac pourrait leur tenir
compagnie.
Le livre de V. Igounet, Histoire du
négationnisme en
France, est évidemment
d'inspiration antirévisionniste
mais, paradoxalement et en
dépit des intentions affichées,
ce pavé de 700
pages peut se lire comme un manuel d'initiation
aux thèses
révisionnistes sur l'histoire de la seconde
guerre mondiale.
Les extraits d'ouvrages révisionnistes
y foisonnent. La LICRA,
le MRAP ainsi que les organisations juives
pourraient en tirer
prétexte pour dénoncer là
une forme de
«contestation de crimes contre l'humanité»
au sens
de la loi Fabius-Gayssot du 13 juillet 1990.
La part de
V. Igounet
V. Igounet, née en 1970, est titulaire d'un doctorat d'histoire de l'Institut d'études politiques de Paris. Son livre n'est précisément, nous dit-on, que l'adaptation de sa thèse, dirigée par Pierre Milza. Le désordre y règne et le plan est factice avec, en particulier, à la fin, un développement saugrenu sur le «post-révisionnisme». Tout bruissant de rumeurs et de ragots sur le compte de telle ou telle personnalité, le livre contient à profusion des considérations politiques et morales un peu trop faciles.
On passera sur les erreurs qui témoignent d'une information souvent hâtive. Enfin, pour l'essentiel, ce travail de compilation s'arrête au début de l'affaire Garaudy/Abbé Pierre, en 1996. Un point ne manquera pas de frapper les spécialistes: l'auteur, qui entretient de bonnes relations avec l'antirévisionniste Jacques Baynac et qui le cite souvent, fait une impasse totale sur les deux extraordinaires articles publiés par ce dernier dans Le Nouveau Quotidien [de Lausanne] le 2 et le 3 septembre 1996. Dans ces articles, J. Baynac finissait par admettre, la rage au coeur, qu'on ne possédait franchement aucune preuve de l'existence des chambres à gaz nazies. Pourquoi V. Igounet a-t-elle passé sous silence un élément aussi remarquable de l'histoire du révisionnisme en France? J. Baynac est un historien français et il a consacré une partie substantielle de ses activités à combattre des révisionnistes français tels que Pierre Guillaume, Serge Thion et Robert Faurisson. J'ai écrit à V. Igounet pour lui demander les raisons d'un tel silence. Je n'ai reçu aucune réponse. Pour en terminer avec son cas, je dirais à sa décharge que, parmi tous ceux qui ont publié livres ou articles contre le révisionnisme, elle est à peu près le seul auteur qui paraisse quelquefois soucieux de probité universitaire.
La part de Jean-Claude
Pressac
Les quarante dernières pages du corps du livre contiennent un «entretien avec Jean-Claude Pressac». J'en recommande la lecture. On n'est jamais allé aussi loin dans ce qui ressemble presque à un reniement de la cause orthodoxe ou exterminationniste. Jean Pierre-Bloch est dénoncé pour ses «déclarations hystériques» sur le compte des révisionnistes (p. 623). A Auschwitz, au début de son enquête sur place, J.-C. Pressac commence «à dégager des résultats qui étaient en contradiction avec l'histoire communiste du camp» (p. 625). Il déplore «un fatras de témoignages inexploitables parce que sans critique historique» (p. 627). Au sujet de Serge Klarsfeld, il émet des «réserves sur son activité qui deviendront de plus en plus fortes au fil des ans» (p. 634). Dans la loi antirévisionniste du 13 juillet 1990, il voit une «imbécillité réactionnaire communiste» (p. 638). Il accuse Pierre Vidal-Naquet d'être, sur le sujet du nombre des déportés juifs hongrois, de ceux «qui n'y connaissent rien» (p. 641). Danuta Czech, parlant pour le Musée d'Etat d'Auschwitz, s'est rendue «coupable de faux historique» (p. 643). Les comptes de Georges Wellers «ne valaient plus rien, ce qui n'empêche pas les Polonais d'utiliser les résultats erronés de [celui-ci] comme une référence "sérieuse"» (p. 644). P. Vidal-Naquet -- encore lui -- agit «hypocritement» et il lui arrive d'être «lamentable et nul» (p. 646); il «peut se comparer à une girouette creuse tournant au vent des publications et de l'actualité parce que lui-même n'a pas entrepris de recherche fondamentale pour étayer ses déclarations péremptoires et moralisatrices» (p. 647). Poursuivant sur sa lancée, J.-C. Pressac rappelle que, contrairement à tant de prétendus témoignages sur l'épaisse fumée des crématoires, «les fours d'incinération Topf ne fumaient pas et ceux des firmes concurrentes non plus [...]. Certaines photos des centres d'euthanasie dépendant de l'action T4 les montrent avec une abondante fumée montant au ciel et censée prouver qu'on y brûlait des corps de malades mentaux tués. Ce sont de vulgaires montages photographiques» (p. 648). Autrefois J.-C. Pressac faisait grand cas des dessins du prétendu témoin oculaire David Olère; il faut voir comme ici il nous révèle le secret des supercheries de ce «témoin» (p. 649-650). La fin de l'entretien accordé par J.-C. Pressac est d'inspiration nettement révisionniste. On y voit que, pour lui, le dossier du système concentrationnaire n'est rien moins que «pourri» (sic). Le mot est de l'historien Michel de Boüard, ancien déporté, dont l'intervention en 1986 en faveur du révisionniste Henri Roques avait fait grand bruit. Jean-Claude Pressac lui reconnaît la paternité de ce mot et ajoute:
Peut-on redresser la barre? Il est trop tard. Une rectification générale est humainement et matériellement impossible [...]. De nouveaux documents surgiront inévitablement et bouleverseront de plus en plus les certitudes officielles. La forme actuelle, pourtant triomphante, de l'univers des camps est condamnée. Qu'en sauvera-t-on? Peu de choses (p. 652).
De l'avis de J.-C. Pressac, nous sommes en présence d'un énorme mensonge, que, pour sa part, il impute principalement aux communistes. Dans cet entretien, il s'en prend aussi aux révisionnistes, auxquels on ne voit d'ailleurs pas trop clairement ce qu'il peut reprocher de grave, si bien que ses flèches les plus acérées, c'est aux tenants de la thèse orthodoxe qu'il les réserve.
Les derniers mots de l'entretien de J.-C. Pressac, qui, par le fait, se trouvent être aussi les derniers mots du livre de V. Igounet, évoquent les «poubelles de l'Histoire». A qui sont-elles promises ces poubelles-là? Serait-ce aux écrits des révisionnistes ou, comme on dit ici, des «négationnistes»? Point du tout! Elles sont promises au dossier «pourri» d'une histoire concentrationnaire où, selon l'ancienne recrue de S. Klarsfeld, on s'est plus soucié de défendre les mensonges que d'établir les faits.
Présentation par P. Vidal-Naquet du
livre de V. Igounet
Le 24 mars 2000, en première page du Monde (des livres), sur six colonnes, et illustration à l'appui, P. Vidal- Naquet signait un long compte rendu du livre de V. Igounet sous le titre «Histoire d'une négation». Il avait fait partie du jury de la soutenance de thèse. En fait de compte rendu, il règle surtout ses comptes avec son collègue Robert Faurisson, qui le hante depuis toujours, et avec J.-C. Pressac, sa nouvelle bête noire. Le premier, douze fois nommé, est présenté sous les traits d'«un clown antisémite» qui se complaît dans le mensonge :
On éprouve, devant le mensonge dont Faurisson est l'expression la plus pure, comme une sorte de vertige proprement philosophique.
L'ouvrage de V. Igounet devait contenir le texte d'un entretien qu'elle avait obtenu du «menteur» mais une association antiraciste, dont on se garde de nous révéler le nom, s'est opposée à cette publication:
Au non de la loi Gayssot, une association antiraciste a exercé un chantage sur l'éditeur et le texte de Faurisson a disparu. Je le déplore d'autant plus que personne ne démolit mieux Faurisson que Faurisson lui-même, à condition qu'on sache le lire.
J.-C. Pressac est jugé avec presque autant de sévérité et de mépris:
Sous sa plume, les victimes disparaissent, le génocide n'a jamais existé, reste un simple problème technique qu'il estime avoir résolu. Quant à ceux qui ne le suivent pas dans toutes ses variations, ils sont aimablement qualifiés de «girouettes», ce qui dans sa bouche doit être un compliment. Quant aux témoignages qui ne correspondent pas avec ses démonstrations, ils sont renvoyés en bloc aux «poubelles de l'histoire ». Merci pour eux.
Mes «droits de
réponse»
J'ai, sans succès, voulu exercer
mon droit de réponse
à l'article où,
nommé à douze reprises,
j'étais traité de
menteur sans, pour autant, me
voir fournir la preuve d'un seul
mensonge. En la personne de ses
avocats, Me Baudelot et Me Cohen,
Le Monde m'a refusé
ce droit. Je n'ai guère eu
plus de chance avec V. Igounet
qui, avant de publier son livre, avait
signé dans le magazine
L'Histoire, en décembre
1999, une assez longue étude
intitulée: «Le cas
Faurisson: itinéraire d'un
négationniste» (p.
72-77). Là, ma réponse
était publiée
mais, contrairement au droit en la
matière, elle avait
été amputée d'une
moitié et cela --
circonstance aggravante -- au prix de
cinq coupures
différentes, dont aucune n'était signalée
au
lecteur (L'Histoire, février2000, p. 4). Mieux,
ce
simulacre de réponse était suivi d'un commentaire
du
magazine dénonçant «les élucubrations
des
assassins de la mémoire». Quant au texte de
l'entretien
que j'avais accordé à V. Igounet le 9 avril
1996,
on voudra bien le trouver ci-après.
5 mai
2000
Paru dans Etudes révisionnistes, volume I,
2001,
p. 139-143.
[Première mise au net: 28 mars
2001]
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ARTICLE 19
<Tout individu a droit à la
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et d'expression, ce qui implique le droit de
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inquiété pour ses opinions et celui
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frontière, les informations et les
idées par quelque
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Déclaration internationale des droits de
l'homme,
adoptée par l'Assemblée
générale de
l'ONU à Paris, le 10 décembre
1948.