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Conférence prononcée à Paris, le 18 juin 2003

 

La Feuille de route du Marquis de Sade

suivie de

Le Facteur X

Conférence dans le cadre du colloque «Dialogue entre civilisations» à Kiev (Ukraine)

par Israël Shamir



La "feuille de route" est le résultat d'un compromis passé, non pas entre Palestiniens et juifs, mais entre des juifs et d'autres juifs, dont aucun ne vit au Moyen-Orient. Passé, ce compromis l'a été, en l'occurrence, entre les libéraux - juifs - de New York et les néoconservateurs - juifs (again.) - de Washington. L'un comme l'autre de ces deux groupes sont voués à la préservation de l'état juif et à sa prospérité. Toutefois, une querelle les oppose: tandis que les néoconservateurs, à l'instar d'un Richard Perle, souhaiteraient exterminer et pulvériser leurs ennemis à la Josué bin Nun, les libéraux, tel Tom Friedman, pensent que les goyim pourraient avantageusement être emprisonnés dans ce quartier de haute sécurité qu'est la bande de Gaza, sous la bonne garde de soldats de l'Otan. Si ,aujourd'hui, les deux groupes ont pratiquement conclu un compromis entre eux, c'est pour la raison suivante : la phase active de la conquête de l'Irak par les Etats-Unis est achevée, mais l'armée américaine connaît des pertes, tant en Afghanistan qu'en Irak. Afin d'assurer la relève des soldats américains par des Français, des Indiens. bref, des conscrits de toutes les nationalités imaginables, et avant de s'embarquer dans la phase suivante - à savoir, la conquête de l'Iran - les Américains ressentent un besoin croissant de démontrer au monde entier que cette guerre n'était pas une détestable expédition impériale menée à bien dans l'intérêt des sionistes, mais quelque chose d'autre. Aussi ont-ils décidé de faire entrer en scène la Feuille de route.

Les deux écoles juives en concurrence, nous l'avons vu, aux Etats-Unis, sont merveilleuses lorsqu'il s'agit de faire du cinéma. Bien que la différence, entre les deux écoles jumelles, soit - en réalité - ténue, elles s'emploient à la dissimuler entièrement en s'adonnant à leurs philippiques. Comme le commerçant expérimenté se lamente sur son mauvais sort afin d'encourager l'acheteur innocent à conclure l'affaire, les sionistes inconditionnels se sont répandus en jérémiades sur " les frontières d'Auschwitz " que la Feuille de route, à leurs dires, reviendrait à leur imposer. Certains amis de la Palestine - principalement ceux qui croient en une solution à deux Etats, et que nous appellerons les biétatistes dans la suite de ce texte - ont vu ces juifs en détresse et, patatras ! : ils sont tombés dans le piège. Ils ont tiré la conclusion - ô combien hâtive - que la "feuille de route" serait belle et bonne pour les Palestiniens.

" Les sionistes sont complètement hystériques !. " se sont-ils exclamés, " . tant ils redoutent l'intraitable cow-boy texan ! Il va leur montrer un peu, Bush, de quel bois il se chauffe, et ce que cela veut dire, l'esprit d'indépendance des Américains ! " Ali Abunimah - comme d'habitude en avance à l'allumage - a proclamé (dans un artice intitulé " Qui a peur de la feuille de route ?) [Who's afraid of the Road Map ? [1]] ce qui suit : " Chez les partisans d'Israël, c'est la panique. Rien qu'à l'apparence d'honnêteté et de réciprocité minimales qui caractérise ce plan (de paix) ".

Las, personne, chez les sionistes, n'a été effrayé par la feuille de route ! Abunimah et ses semblables ont commis la même erreur que la jeune épouse du prince de Beauffrement, personnage sodomite notoire d'une nouvelle grivoise du Marquis de Sade. Ce Prince devait être marié à une jeune fille innocente, dont la mère connaissait les préférences de son futur gendre. La veille de la nuit de noces, elle dit à sa fille :

" Ma fille, méfiez-vous des premières propositions que vous fera votre mari, et dites-lui fermement : Non, monsieur, ce n'est point par là qu'une honnête femme se prend, partout ailleurs autant qu'il vous plaira, mais pour là, non certainement... " [En français du dix-huitième siècle dans le texte, ndt]

Toutefois, le Prince avait décidé de se départir, pour une fois, de ses habitudes fâcheuses et d'approcher sa jeune épouse d'une manière orthodoxe. Il fut fort surpris - agréablement, est-il besoin de le préciser ? - lorsque la jeune femme repoussa par ces objurgations ses assauts virils, semblant le guider vers les vallées qu'au demeurant il préférait, nous informe le divin Marquis dans cette nouvelle qu'il intitula L'Epoux complaisant.

Surpris, le président Bush a dû l'être, lui aussi, et de la belle manière, par le soutien apporté à la feuille de route par les partisans de la cause palestinienne - soutien auquel il ne s'attendait absolument pas. D'eux, on aurait attendu qu'ils rejetassent sur le champ cette feuille de route, car c'est véritablement un plan d'une perversité digne du Marquis de Sade. Mais la plupart des " pro-palestiniens " ont été conditionnés à approuver tout ce que les sionistes font mine de rejeter, et c'est avec une régularité aussi navrante que lassante qu'ils tombent dans ce genre de piège. Parmi eux, les biétatistes sont tellement bernés par ce qu'ils se figurent être leur pragmatisme qu'ils sont plus qu'empressés à tomber tête baissée dans le premier piège (sioniste) venu.

En réalité, la feuille de route serait catastrophique si elle pouvait marcher, et les conditions imposées par le gouvernement de Sharon l'ont rendue pathétique. Elle a été décrite avec justesse par nos amis Jeff Blankfort [2], Ran HaCohen [3] et Kathleen Christisson dans CounterPunch, ainsi que par Edward Said, Uri Avnery, Jennifer Loewenstein et d'autres. Les 14 conditions du gouvernement israélien sont venues anéantir tout élément positif qui aurait pu accidentellement se trouver dans la feuille de route. Au mieux, le processus aboutirait à quelques réserves fortifiées pour les indigènes, que l'on appellerait " Etat palestinien ", ce qui ne mange pas de pain.

Cela veut-il dire que nous, qui défendons l'humanité, devons lutter contre la feuille de route, comme l'ont proposé certains amis ? Non, à moins que vous teniez absolument à suivre l'exemple de Don Quichotte en allant vous battre contre les moulins à vent ! Une blague, plus osée encore que la nouvelle de Sade, dit qu'un homme atteint d'une maladie vénérienne à un stade avancé est complètement affolé après que son médecin lui ait dit qu'il fallait " la " lui couper. Paniqué, notre patient consulte spécialiste après spécialiste, jusqu'à ce que finalement un grand professeur le rassure en lui disant que " toute opération serait inutile, son organe malade étant déjà tombé ".

Dit autrement, il n'y a aucune raison de lutter contre ce plan de paix fictif, car il disparaîtra de lui-même très bientôt, comme ont disparu avant lui les plans de Jaring, des Saoudiens et autres. Les attaques de missiles de Sharon sur Gaza sans défense, la comédie du " démantèlement " (bidon) de " colonies " (en fait : des avant-postes non-habités) et la ferme décision, en réalité, de les renforcer, apportent la preuve que les dirigeants israéliens n'ont pas la moindre intention de respecter ne serait-ce que le cadre général - minimaliste, ô combien ! - de ladite feuille de route. Ahmed Bouzid, un bon analyste qui vit à Philadelphie, a résumé la situation avec pertinence : " Quiconque a suivi ce conflit et possède un minimum d'intuition historique ne peut voir dans les dernières déclarations du gouvernement israélien autre chose qu'une tactique de temporisation. [4] "

Pourquoi les sionistes accepteraient-ils la feuille de route, ou même une quelconque paix, en fait ? Ils se sentent le vent en poupe ; ils se prennent pour des Dieux. L'unique puissance régionale, l'Irak, a été défaite par la " valeureuse " Jessica Lynch et ses frères d'armes. Téhéran ne perd rien pour attendre. Le bruit court que si le général Garner a décliné sa nomination au poste de Consul général d'Irak, c'est parce qu'on lui a promis qu'il serait vice-roi de France une fois ce pays conquis à son tour. Le président Bush ne cesse de se démasquer et de montrer ce qu'il est en réalité : un simple instrument docile entre les mains des sionistes.

Il n'y a pas la moindre chance de résoudre le conflit en Palestine autrement qu'en recourant à la solution de l'égalité, d'une citoyenneté unifiée et de l'intégration de tous les habitants de la Palestine dans un seul Etat : l'Etat de Palestine. Les militants biétatistes ne trompent qu'eux-mêmes. Mais il y a pire : il n'y aura aucune solution tant qu'un degré minimal d'égalité n'aura pas pénétré le discours américain. Pourquoi, en réalité, les médias se répandent-ils en commentaires sur cette feuille de route inexistante ? C'est une preuve supplémentaire de cette véritable maladie qu'est le déséquilibre du discours médiatique. Les actes de terreur récents, à Gaza et à Jérusalem, ont servi à rafraîchir la mémoire de ceux qui doutaient qu'on en soit atteint. Alors que la mort de civils innocents, à Gaza, a été tout juste mentionnée, les journaux américains parlant de " violence ", elle a été longuement soulignée, le lendemain, lorsque la " violence " est venue visiter Jérusalem. Cette anomalie s'ajoute à une série de nombreuse autres, depuis ce pourcentage incroyable - 80% ! - du total des aides extérieures américaines tombant dans l'escarcelle d'Israël, jusqu'à la place accordée dans les médias à des sujets juifs allant de l'holocauste à la kabbale. Voilà qui, globalement, constitue un phénomène absolument unique.

Nous pleurons la tragédie des Palestiniens, mais nous devrions aussi déplorer la tragédie américaine, car les Américains, ce peuple vigoureux, jadis réputé pour sa franchise et son indépendance farouche, serait sans doute battu, de nos jours, dans un concours d'indépendance d'esprit l'opposant à des oies. Ou alors, s'il devait gagner, ce serait avec une marge extrêmement réduite. Hier encore, les Américains étaient furieux contre le président Clinton. " Le problème n'est pas qu'il ait eu une liaison extraconjugale ", disaient-ils. " Ce qui est intolérable, c'est qu'il ait menti. Nous sommes capables de tout pardonner. Tout. Sauf le mensonge. " Non seulement les journaux l'attaquèrent pour ce mensonge somme toute innocent, mais le Congrès tenta de le contraindre à la démission pour ce même motif.

Vingt ans auparavant, le président Nixon avait été pratiquement scalpé et lynché pour la même offense : " Il a menti ", clamèrent les gros titres. " Il a menti ", répétèrent les Américains, et Nixon dût offrir sa démission. Mais aujourd'hui, le président Bush a menti - et son mensonge ne concernait pas quelque bagatelle ou quelque turpitude sordide : il s'agissait de l'immense fumisterie des armes de destruction massive en Irak. " Eh bien, qui s'en soucie ? ", minaude un Wolfowitz soudain devenu " cool ". Et Tom Friedman de répéter : " Oui, qui, en fait, en a quoi que ce soit à cirer ? Il ne s'agit pas là du vrai problème, du problème qui devrait tous nous concerner. [5] " " Amen ! " dirent les Américains. Et nous avons déjà oublié les armes de destruction massive en question. Il semble que désormais les juifs américains décident non seulement de qui est antisémite (il s'agit, je le rappelle, de tous ceux qui prônent l'égalité entre juifs et non-juifs) mais, aussi bien, de qui est - ou non - un menteur.

Je ne suis pas inquiet pour l'attachement des Américains aux principes moraux. Si j'ai des inquiétudes, c'est au sujet de leur soumission totale à la manipulation et de leur inclination à répéter mot pour mot ce que les médias leur assènent - phénomène évoquant des esprits possédés. Comme dans la magie haïtienne, on dirait qu'ils ont été transformés en zombies par des Warlock sinistres : les Maîtres du Discours. Nos merveilleux amis, aux Etats-Unis, se rapprochent de plus en plus de la situation peu enviable des dissidents, dans l'ex-Union soviétique. Avec cette différence, et elle est de taille : les dissidents soviétiques bénéficiaient de l'entier soutien de l'Occident. Les dissidents américains, quant à eux, sont aujourd'hui bien seuls.

Désormais, il faut en prendre conscience, nous avons tous tendance à jouer le jeu. Cassandre lui-même aurait de la difficulté à voir d'un mauvais oil l'introduction du cheval de bois à l'intérieur des fortifications de Troie, en cette époque où tout le monde se réjouit bruyamment du splendide présent apporté par les Danaïdes. Mais en Amérique, le conformisme passe les limites de l'entendement. Pire, ce déséquilibre semble ne pas vouloir se cantonner outre-atlantique ; il est en passe de s'installer en Europe. Les magnats des médias totalitaires américains sont en train d'acheter des entreprises dans le secteur européen des communications. Le milliardaire Haim Saban, un juif israélo-américain, est en passe d'acheter KirchMedia, le plus important diffuseur de programmes télévisés en Allemagne. Il est aussi le plus grand mécène des partis politiques américains et un grand souteneur d'Israël - à tel point que l'Université de Californie a refusé de lui accorder un affidavit pour raisons de sécurité [6]. Il est loisible d'imaginer quel genre de programmes sa télévision va diffuser. Cette tentative de kidnapper les esprits des Européens devrait être contrée, et les productions douteuses de l'Amérique - depuis la viande génétiquement modifiée, en passant par les séries télévisées du type soap opera, jusqu'aux " informations " - devraient se voir refuser l'autorisation de pénétrer en Europe.

La France représente le maillon le plus important du barrage susceptible d'arrêter l'inondation américaine. Si le président Chirac n'avait pas tenu bon sur sa position dictée par les principes, ni Shroeder l'Allemand ni Poutine le Russe n'auraient jamais osé s'opposer à l'offensive américaine contre l'Irak sans défense. Vous pouvez être fiers de vos dirigeants, et leur apporter votre soutien. La France a besoin d'unité, et aucun autre sujet n'unit autant les opposants à l'Empire global que la question de Palestine. Que la Palestine soit ce lien unifiant les Français de naissance et les Français par adoption.

La France est l'étoile la plus brillante de la constellation de l'Europe. Que votre merveilleux pays, avec ses petites routes tortueuses, ses vignobles, ses fermes, ses imposantes cathédrales et ses minuscules églises de village, mais aussi son industrie et ses communications ultramodernes, ses habitants amicaux et réfléchis, en soit aussi l'étoile directrice. La France est importante pour les pays d'Europe orientale, auxquels l'admission au sein de l'Union européenne devrait apporter un répit dans la gestion désastreuse de leurs gouvernements actuels, pro-américains, pro-sionistes et formés par Georges Soros. La France est importante pour la Russie, son alliée naturelle, si l'on veut que les Russes puissent balayer un jour les vestiges du régime de Ieltsine, installé par la CIA.

La France est importante, aussi, pour le Moyen-Orient. Mais elle est importante, avant tout, pour l'Amérique. Bien sûr, (votre) pays ne peut pas affronter seul l'Empire, et nous devons bien nous garder de le pousser à l'affrontement. Que la France soit l'exemple à suivre, pour les Américains de bonne volonté, comme elle l'avait été aux premiers jours de la République. Les Américains les plus aisés le savent bien, pour être venus ici. Dans un petit village champenois, j'ai rencontré un visiteur qui s'y rend souvent, un certain M. Cohen, du New York Times. Certes, les jours de semaine, il vit à Manhattan, où il mange ses " freedom fries " (les frites de la Liberté) avec du poisson gefilte casher, tout en appelant au châtiment de la France traîtresse. Mais, tous les week-ends, il prend l'avion et vient ici afin de jouir de la vraie civilisation. Dans son for intérieur, il sait : l'Empire américain, soumis à ses dirigeants texans et à ses magnats de la presse juifs, est dans une situation extrêmement inconfortable, même pour ceux à qui elle profite. Une situation presque aussi inconfortable que celle de l'Etat juif, au Moyen-Orient : c'est dire !

En effet, après tout, en France - pays civilisé - le Marquis de Sade a été placé dans un asile psychiatrique. Personne ne lui a demandé de tracer des feuilles de route !



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[1] http://electronicintifada.net/v2/article1428.shtml

[2] http://www.counterpunch.org/blankfort05272003.html

[3] Letter From Israel/Antiwar.com May 21, 2003

[4] http://www.philly.com/mld/inquirer/news/editorial/5993253.htm

[5] NYT, June 4, 2003

[6] AP, 15 May 2003

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Conférence dans le cadre du colloque «Dialogue entre civilisations» à Kiev (Ukraine)



Le Facteur X





par Israël Shamir


 



Je suis très heureux que l'occasion me soit donnée de vous rendre visite et de vous rencontrer, car nombreux sont les liens qui nous unissent. Comme vous, je suis originaire de notre pays commun, l'Union soviétique. Je suis né en Sibérie, où - comme au Canada - beaucoup d'Ukrainiens se sont installés. Mais mon regretté père était natif de vos contrées, d'Ukraine occidentale, de Stanislav, devenue aujourd'hui Ivano-Frankovska. Hier, j'ai visité Ouman, ravissante petite ville, avec son parc somptueux, qui est un chef-d'ouvre de jardin paysager de classe mondiale, avec ses jeunes habitants accueillants, ses marronniers ombreux, sa vieille église, et je suis allé visiter également le mausolée du rabbin Nahman de Breslau, un saint juif local. Rabbi Nahman a vécu à l'époque de Napoléon Ier ; il était contemporain du compte Potocki et de son épouse Sophie, la créatrice du parc Sofievka d'Ouman. Et, depuis cette époque là, il y a, dans le monde entier, des hassidim, ces disciples du rabbin Nahman. Tous ne comprennent pas très bien que le meilleur de la formation spirituelle du rabbi Nahman était redevable à l'influence de l'orthodoxie et aussi à celle du peuple ukrainien sur l'âme rebelle des juifs. Le rabbin Nahman médita à la lumière christique, il défendit l'idée de la proximité avec l'âme du Christ, il étudia auprès des paysans et des citadins d'Ouman, et c'est ainsi que le chêne depuis longtemps desséché de l'âme juive s'épanouit à nouveau en terre ukrainienne.

Mais, personnellement, j'ai grandi en Palestine, et c'est de Palestine que je suis venu vous voir - c'est donc du pays de l'orthodoxie que je suis venu en Ukraine, terre orthodoxe. Les habitants de la Terre sainte ont reçu la foi en Christ directement de notre Seigneur Jésus Christ, et c'est de Palestine que cette foi s'est répandue dans l'ensemble de l'Empire byzantin, jusqu'à Constantinople. De là, elle est parvenue à Kiev, grâce au saint apostolique Oleg et au prince Vladimir. C'est pourquoi Kiev et Jérusalem sont tout naturellement proches l'une de l'autre, car l'une et l'autre sont unies par l'orthodoxie, la foi en Christ, en la Sainte Trinité et en la Mère de Dieu. Il est très important de bien le comprendre car la foi, c'est aussi une idéologie, mais très profonde, et étroitement entrelacée avec l'âme du peuple.

L'orthodoxie, l'islam, la catholicité et les juifs authentiquement croyants vivent très bien ensemble, en Palestine. Ils vivent dans les mêmes villages, ils prient dans les mêmes temples. Nos musulmans prient dans la Basilique de la Nativité, à Bethléem, à côté des orthodoxes et des catholiques. La Palestine est un modèle pour le monde, et notre monde merveilleux et multicolore ressemble à une mosaïque somptueuse ou encore à un tapis persan. Ce modèle de globalisation préserve sa diversité dans l'harmonie de ses composantes et de son tout, la paix de l'âme et la solidarité entre les hommes, et c'est en cela que réside la mondialisation des hommes de bonne volonté.

Mais, aujourd'hui, triomphe une autre variante de globalisation. Leur globalisation, à eux, immerge le tapis persan dans un dissolvant, et il en ressort d'une seule couleur : celle du fric. Pour ceux qui s'opposent à une telle globalisation, les châtiments ont été préparés, et pour eux a été prédestinée la théorie du Conflit éternel entre les civilisations. Toutefois, les civilisations n'ont aucune raison d'entrer en conflit. Chaque civilisation a sa niche, son territoire, et on ne voit pas pourquoi elles se battraient entre elles. Entre elles, certes, se produisent des frictions périphériques, aux frontières, et l'Ukraine est l'une de ces zones frontalières mondiales, mais c'est là plutôt présage d'énergie, de vitalité, pour la civilisation, plutôt que d'agressivité.

Certaines civilisations sont si éloignées de nous, qu'on les croirait sur une autre planète, mais d'autres sont proches. C'est pourquoi l'on peut utiliser le mot d'Oïkouméné - pour décrire les groupes de civilisations proches parentes entre elles. Notre Oikouméné se compose de trois grandes civilisations - orthodoxe, chrétienne occidentale et islamique. Imaginons-nous les comme une fleur à trois pétales, au centre de laquelle se trouverait la figure unificatrice de Jésus Christ.

Chaque civilisation a sa propre vision du monde. Pour les catholiques, c'est Jésus Homme qui est le plus important, c'est pourquoi, chez eux, on représente souvent la Crucifixion ; pour les orthodoxes, c'est le Christ - Dieu qui est le plus important, et c'est pourquoi dans l'orthodoxie on trouve le plus souvent la représentation du Pantocrator. Les musulmans, quant à eux, vénèrent l'Esprit Saint. Cela, au total, forme la Sainte Trinité, autrement dit : la globalisation de l'âme. Nous faire la guerre entre nous ? Nous n'avons aucun motif à cela, bien entendu. Même si, jusqu'à une époque pas très éloignée, les idéologies préféraient expliquer les conflits en termes idéologiques.

Par exemple, le libéralisme contre le totalitarisme, ou, comme l'a dit un contemporain, ayant à l'esprit la bataille de Stalingrad, c'était les hégéliens de droite et les hégéliens de gauche qui se faisaient la guerre. Toutefois, même la chute de l'Union soviétique n'a pas apporté la paix à l'humanité. Bien au contraire, le président américain nous a promis une guerre éternelle, dont nous ne verrons pas la fin de notre vivant. Quant au sort du malheureux Irak, avec ses musées incendiés et pillés et ses ministères occupés, il nous apprend à prendre les menaces du président Bush au sérieux.

Les politologues américains ont imposé l'idée du conflit entre civilisations afin de justifier leur guerre contre le monde musulman. Mais nous savons bien que les musulmans révèrent, eux aussi, Jésus, qu'ils le respectent comme le Christ - Sauveur et qu'ils croient que c'est seulement grâce à sa puissance qu'il sera possible de vaincre l'Antéchrist. Il nous est bien difficile d'admettre l'existence d'un Axe du Mal.

Il n'y a pas très longtemps, nous autres, habitants de l'Union soviétique, étions les citoyens de l'Empire du Mal, aux yeux des Américains. Aujourd'hui, l'Axe du Mal semble concerner d'autres galaxies et d'autres planètes, mais nous n'avons certainement pas oublié qu'il n'y a pas si longtemps, l'axe du mal, c'était nous. C'est la raison pour laquelle nous devons apprendre avec beaucoup d'attention à nous orienter dans les constellations. En effet, le communisme lui-même, dans lequel nous vivions il n'y a encore pas si longtemps, était une forme particulière d'orthodoxie ; c'était une religion sans dieu, mais qui soulignait la profondeur des idées chrétiennes d'amour fraternel et de solidarité.

Quelles sont donc ces forces américaines qui veulent nous entraîner dans une nouvelle guerre mondiale ? Quelle civilisation proposent-elles dans le schéma des civilisations ? Il serait difficile de les assimiler à l'Europe occidentale, dans la mesure où les Européens de l'Ouest regardent l'Amérique avec horreur et inquiétude. C'est pourquoi, afin de comprendre et d'expliquer les événements passés, nous introduisons dans notre schéma des civilisations un facteur complémentaire - le facteur X. Nous l'appellerons la Quatrième civilisation, facteur invisible, mais influent.

? Le facteur X est extraterritorial, et en cela, il est susceptible d'agresser une aire d'influence pratiquement illimitée : son aire d'expansion est mondiale. En même temps, comme les autres civilisations satisfaites d'elles-mêmes, le facteur X ne connaît pas la retenue. ? Parmi ses caractéristiques, le caractère vindicatif. En effet, la guerre contre l'Afghanistan désarmé s'est déroulée sous la devise « venger le 11 septembre ». ? Il éprouve une véritable haine pour la solidarité humaine, en laquelle il voit le « totalitarisme ». ? Les narcotiques - l'Afghanistan a été conquis après que les Talibans eurent détruit les plantations de pavots à opium, et après la conquête de l'Afghanistan, la production d'opium retrouva des niveaux encore jamais atteints. Depuis la prise de Bagdad, l'Irak est submergée par les narcotiques, qui ne pénétraient pas dans ce pays du temps de l'horrible Saddam Hussein. ? Une terreur paranoïde devant les citoyens, et la volonté de tous les désarmer. L'Irak en est un exemple. ? L'amour des très riches et la haine et le mépris pour les travailleurs. ? Les Banques - les usuriers, la création de systèmes de prêts qui asservissent des pays entiers.

Vous autres, Ukrainiens, vous devez avoir quelque souvenir de cette description. Oui, il s'agit du tableau grotesque agrandi de votre ancien voisin, qui fut aussi parfois votre ennemi : le cabaretier - usurier juif. Certes, aujourd'hui, il fait le trafic de l'héroïne au lieu de la vodka gorilka, il prête des milliards, et non pas des petites sommes, et il utilise des armes stratégiques, et non pas des haches, mais son principe d'action est toujours le même. Le facteur X, c'est la mutation extrêmement dangereuse et particulièrement agressive de l'âme juive, acclimatée en terrain anglo-saxon.

Quelle idée étrange et monstrueuse, dites-vous. Mais non, cette idée vient à l'esprit de beaucoup de gens, juifs et non-juifs. Ainsi, par exemple, l'un des plus influents idéologues du judaïsme, le rabbin Shmuel Botejach écrit dans un éditorial programmatique publié le 19 mars dernier dans le Jerusalem Post : « L'antiaméricanisme, c'est l'antisémitisme », « L'Amérique, c'est les juifs d'aujourd'hui ». [Vous vous souvenez sans doute de ce slogan : « Staline, c'est le Lénine d'aujourd'hui ? »] Il poursuit : « Autrefois, on accusait les juifs de comploter afin de prendre le contrôle du monde, et maintenant, c'est ce dont on accuse l'Amérique ! »

Mais le rabbin Botejach reconnaît la véridicité de cette accusation. Il écrit : « L'Amérique et les juifs sont en train de s'associer afin de prendre le contrôle du monde. Mais il s'agit d'une conquête plutôt idéologique que militaire, et vous pouvez être certains que lorsqu'ils rendront ce monde, il sera en bien meilleur état que lorsqu'ils l'auront pris. »

Ce sont des idées, mais elle sont assénées au moyen des missiles ailés « Tomahawk » ! Ils se targuent d'améliorer le monde - mais cette prétention évoque cette célèbre affiche d'un vieux théâtre juif : « Ce soir, Shakespeare - traduit et amélioré par Rabinovitch ». Quant à la coopération entre l'Amérique et les juifs, elle répond au principe « La voix, c'est la voix de Nakov, quant aux mains, ce sont celles d'Isav », c'est-à-dire : les idées sont juives, mais les armes sont américaines.

Ces idées, quelles sont-elles ? Je vous citerai un article récent de Pfaff dans le New York Times, dans lequel il décrit le groupe des hommes politiques les plus influents dans l'exécutif américain : « Parmi eux, on trouve le vice-secrétaire à la Défense Paul Wolfowitz ; Abram Shulsky du bureau des plans spéciaux au Pentagone ; Richard Perle du bureau des experts au Pentagone ; Elliott Abrams du Conseil de la Sécurité Nationale, et les écrivains Robert Kagan et William Kristol. On pourrait ajouter à ces noms juifs des dizaines d'autres, au Département d'Etat, dans les Universités, au Congrès, à la Chambre des Représentants. - et tous ont le même petit défaut : ce sont les disciples du politologue allemand, juif et nationaliste, Léo Strauss.

Strauss professait une vision du monde antidémocratique et totalitaire, selon laquelle c'est une élite qui doit détenir le pouvoir - de préférence, une élite juive. - avec un certain nombre de goyim (pas trop, tout de même.) pour donner le change. Strauss préconisait de mentir au pays, tant il méprisait les gens ordinaires. C'est cette idée juive, qui s'est imposée en Amérique, et qu'aujourd'hui l'élite américaine s'efforce d'imposer au monde entier. Vous autres, Ukrainiens, vous connaissez cette idée, et pas seulement par ouï-dire, car vos ancêtres l'ont combattue jadis, à l'époque de la révolte de Bogdan Chmielnitski. A ce propos, je dois vous dire que durant des siècles, de fausses accusations ont été portées contre les Ukrainiens, selon lesquelles ils auraient massacré les juifs durant les guerres de Chmielnitski. Aujourd'hui, cette calomnie est levée - un ouvrage de J. Israël, publié en 1985 à Oxford, « La juiverie européenne à l'âge du mercantilisme » [European Jewry in the age of Mercantilism], démontre que les juifs ont souffert, durant cette terrible guerre civile, ni plus ni moins que les Ukrainiens et les Polonais. Je mentionne ceci, parce que les Ukrainiens ont pu venir à bout de cette idée agressive, et cent cinquante ans après ces événements, le talent admirable du rabbin Nahman s'épanouissait à Ouman. Autrement dit, on le voit, la défaite de cette idée a été très utile aux juifs eux-mêmes.

Le plein épanouissement de l'idéologie juive s'est produit, à notre époque, dans l'Etat juif. Nous voyons hélas ce qui se passe là où cette idéologie s'impose. En Palestine, des centaines d'habitants d'origine se donnent la mort. Certains d'entre eux se font sauter avec leurs ennemis, car ils veulent vendre cher leur vie, tandis que d'autres meurent de la façon suivante : ils sortent à la lisière de leur village, où les mitrailleuses juives les attendent.

A ce sujet, il ne faut pas faire retomber la faute sur les Russes, les Américains, les Ukrainiens. Nous avons créé un régime monstrueux, nous avons transformé la moitié de la population en réfugiés et nous les avons enfermés dans des camps de concentration, nous avons amené des Palestiniens heureux de vivre à se suicider en masse. Que n'a-t-on pas fait à ces hommes, pour qu'ils en viennent à se supprimer par dizaines ? Et voici qu'aujourd'hui l'idée en question se répand dans le monde entier.

Malheureusement, aujourd'hui, l'idéologie juive dominante, ce n'est pas l'enseignement du rabbin Nahman, ce sont les idées de Léo Strauss. A ce sujet, l'Ukraine a un rôle particulier à jouer - ce pays, qui a réussi en son temps à se débarrasser de cette idée juive, au cours de l'Intifada de 1648, et qui a su, par la suite, assimiler de nombreux juifs. Beaucoup d'Ukrainiens ont émigré vers Israël, et beaucoup d'entre eux se considéraient juifs. Mais ils sont venus, ils ont vu et ils ont compris qu'ils s'étaient trompés, et que leur vrai pays, c'est l'Ukraine. Je pense que c'est très bien comme cela. Que ceux qui le désirent retournent vivre en Ukraine et qu'ils y fassent connaître l'amère vérité sur la véritable nature de l'Etat juif.

Mais ce sont aussi des immigrants ukrainiens qui ont fondé, en Israël, l'Union Orthodoxe et l'Union Chrétienne-Démocrate. Ces deux mouvements se battent pour l'égalité et la démocratie - non seulement pour les juifs, mais aussi pour les Palestiniens et pour les ouvriers immigrés. Ils mènent la lutte contre l'idéologie juive dans la tête de l'ennemi, ils aspirent à ce jour de joie, où dans toute la Palestine - de la Mer au Jourdain - sera instauré, en lieu et place de l'Etat raciste, un Etat démocratique pour tous ses citoyens. L'Ukraine doit soutenir ces forces. Si les juifs peuvent exercer leur ascendant sur les Ukrainiens, en Ukraine, alors, nul doute, les Ukrainiens ont le droit d'exercer une influence sur les juifs dans l'Etat juif. Et cela sera un pas vers la victoire de la mondialisation des hommes de bonne volonté.



[Traduit du russe par Marcel Charbonnier]


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Déclaration internationale des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU à Paris, le 10 décembre 1948.


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