AAARGH
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LYON de notre correspondant régional
Le directeur de la revue Akribeia, Jean Plantin, a été
condamné, jeudi 27 mai, à six mois de prison avec
sursis et 10 000 francs d'amende pour "publicité en
faveur d'une publication dangereuse pour la jeunesse malgré
interdiction administrative" par le tribunal correctionnel
de Lyon. Il avait publié, sous sa plume, des notes de lecture
sur des ouvrages interdits par arrêté par le ministère
de l'intérieur. Parmi eux figuraient le rapport d'expertise
sur la formation et le contrôle de la présence de
composés cyanurés dans les "chambres à
gaz" d'Auschwitz, établi par German Rudolf, le livre
Oradour, un demi-siècle de mise en scène, publié
par un collectif de "libres chercheurs", ou les revues
d'histoire révisionnistes Annales d'histoire révisionniste
et Révision. Le tribunal a ordonné la confiscation
des objets saisis par la police au domicile de l'éditeur.
Quatre numéros d'Akribeia, tirés chacun à
1 500 exemplaires et à compte d'auteur, ont été
diffusés depuis octobre 1997 par abonnement et dans des
librairies de Paris, Lyon et Toulon. Cette revue, dont le nom
signifie en grec "exactitude", a été qualifiée,
lors de l'audience, de "négationniste" par les
avocats de SOS-Racisme, de la Ligue contre le racisme et l'antisémitisme
(Licra) et de la Loge Enfants d'Izieu. Ces trois associations,
qui s'étaient constituées parties civiles, recevront
chacune 10 000 francs à titre de dommages-intérêts.
Selon la Licra, la condamnation de M. Plantin "démontre
qu'il ne peut exister d'impunité face à ceux qui
nient le drame de la Shoah".
Lorsqu'il a été mis en cause, Jean Plantin s'est
prévalu d'une formation d'historien acquise au sein des
universités lyonnaises. En 1990, Lyon-III lui a délivré
la mention "très bien" pour un mémoire
de maîtrise sur Paul Rassinier. Ancien résistant,
ce membre de la SFIO, arrêté puis déporté
en Allemagne en 1943, avait publié en 1950 un livre dans
lequel il émettait des doutes sur l'existence des chambres
à gaz. Régis Ladous, le professeur d'histoire religieuse
de Lyon-III qui a dirigé le mémoire de Jean Plantin,
affirme que ce texte n'est pas un "panégyrique"
de Rassinier, mais "un travail référencé
(...) d'une prudence affichée (...) qui ne peut donner
prise, seul, à une accusation de révisionnisme".
L'un de ses collègues de Lyon-II, Yves Lequin, également
professeur d'histoire, a suivi Jean Plantin l'année suivante
dans son DEA d'histoire contemporaine. Il a autorisé l'étudiant
à travailler sur "les épidémies de typhus
exanthématiques dans les camps de concentration",
après l'avoir, dit-il, "mis en garde contre les gens
qu'il allait rencontrer sur ce genre de sujet". Aujourd'hui,
Yves Lequin estime que le travail de son ancien
étudiant, à qui il avait attribué la note
de 11 sur 20, était "inodore et pas de très
bonne qualité". "Rien ne permettait de déceler
une tendance pronégationniste, ajoute le professeur, qui
ne dispose plus du document. Je ne garde pas les DEA qui n'aboutissent
pas à une thèse. Je ne peux parler que de celui
que j'ai lu en 1991. Tout peut arriver à un document huit
ans
après. Il peut être surchargé, expurgé,
complété."
Yves Lequin récuse fermement l'accusation qui lui est faite
de ne pas avoir lu attentivement le travail de son étudiant.
Il reconnaît toutefois avoir pu commettre une "négligence"
en ne s'informant pas davantage sur les travaux antérieurs
de M. Plantin lorsque le sujet de DEA lui a été
soumis. "La déontologie universitaire est claire.
Quand un collègue met une mention
"très bien" à un travail, vous pensez
qu'il n'y a pas de problème",poursuit-il en faisant
allusion à la mention obtenue l'année précédente
à Lyon-III pour le travail sur Rassinier.
"INDIGNATION"
Après le procès intenté à leur ancien
élève, les deux professeurs
d'histoire, Yves Lequin et Régis Ladous, ont remis leur
démission, le premier de directeur du diplôme d'études
approfondies (DEA) d'histoire moderne et contemporaine de Lyon-II,
le second de directeur du DEA d'histoire religieuse de Lyon-III.
Leur geste n'a cependant pas calmé l'"indignation"
de certains étudiants,notamment ceux de l'UNEF-ID. Depuis
plusieurs années, ce syndicat et d'autres associations
membres de la Coordination lyonnaise de vigilance face à
l'extrême droite dénoncent le discrédit jeté
sur l'université de Lyon par les "falsificateurs de
l'histoire".
Le révisionniste Robert Faurisson était en effet
maître de conférences à Lyon-II et Jean-Paul
Allard, germaniste de Lyon-III, avait décerné la
mention "très bien" à Henri Roques pour
une thèse qui contestait l'existence des chambres à
gaz. Quant à Bernard Notin, maître de conférences
à Lyon-III,il avait publié en 1990 un article niant,
lui aussi, leur existence. Enfin,en otobre 1998, les étudiants
de Lyon-III avaient obtenu la fermeture de l'Institut d'études
indo-européennes, rattaché à Lyon-III, qu'ils
considéraient comme un "laboratoire idélologique
de l'extrême droite".
Aujourd'hui, les étudiants de Lyon-II et de Lyon-III reconnaissent
que les deux professeurs de faculté visés ne peuvent
être soupçonnés de complaisance à l'égard
des révisionnistes, mais ils leur reprochent de ne pas
avoir "deviné les sympathies négationnistes"
de Jean Plantin et de lui avoir délivré un diplôme
dans des conditions douteuses. Ils demandent l'ouverture d'une
procédure disciplinaire, mais leur requête n'a pas
été acceptée par le président de Lyon-II,
Bruno Gelas. Le conseil d'administration de Lyon-II a cependant
décidé d'entamer une procédre visant à
annuler le DEA de M. Plantin.
Lyon-II crée une commission sur le négationnisme
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A la suite des différentes polémiques qui ont mis
en cause, depuis le début des années 80, ses chercheurs
et ses enseignants, l'université Lyon-II a décidé
de créer une commission pluridisciplinaire consacrée
au négationnisme. Cette commission sera composée
d'une dizaine de personnes :
historiens, sociologues, linguistes, philosophes et "représentants
du discours militant". Elle préparera une journée
d'étude et de recherche sur le négationnisme pour
début octobre. Un colloque international est prévu
en 2000.
L'université a également demandé à
l'historien Bernard Comte, ancien membre de la commission Touvier
instituée par le cardinal Albert Decourtray en juillet
1989, d'établir "une chronologie détaillée
et exhaustive de tous les faits qui depuis l'affaire Faurisson
ont mis d'une manière ou d'une autre l'université
en contact avec le négationnisme ; que ce soit une manifestation
de soutien ou de condamnation", a précisé le
président de l'université, Bruno Gelas.
Ce texte
a été affiché sur Internet à des fins
purement éducatives, pour encourager la recherche, sur
une base non-commerciale et pour une utilisation mesurée
par le Secrétariat international de l'Association des Anciens
Amateurs de Récits de Guerre et d'Holocauste (AAARGH).
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