deuxième édition
Ce qu'il y a de terrible quand on cherche
la vérité,
c'est qu'on la trouve.
© La Vieille Taupe (Pierre Guillaume), 1983.
Tous droits d'édition, de reproduction et traduction
réservés pour tous pays.
(Samizdat autorisé dans les pays totalitaires.)
Correspondance uniquement :
La Vieille Taupe, B.P. 9805, 75224 Paris Cedex 05.
Introduction
Première partie
Chapitre I. DE STALINGRAD A NUREMBERG
Chapitre II. NUREMBERG
A. DÉFINITION DU CRIME ET DU CRIMINEL
Chapitre III. LE PROCÈS EICHMANN OU... LES NOUVEAUX MAÎTRES-CHANTEURS DE NUREMBERG
II. - LES CIRCONSTANCES DU PROCÈS
Chapitre IV. DE L'ENTRÉE DES U.S.A. DANS LA GUERRE A L'ARMISTICE DU 11 NOVEMBRE 1918
Chapitre V. LES TRAITÉS DE VERSAILLES
Chapitre VI. LE PROBLÈME
Annexes
I. REQUÊTE COLLECTIVE PRÉSENTÉE PAR LA DÉFENSE LE 19 NOVEMBRE 1945 (refusée par le tribunal)
II. LE DOCUMENT GERSTEIN (PS. 1553 . R.F. 3503 Refusé à Nuremberg)
III. LE DOCUMENT KASZTNER
IV. GERMANY MUST PERISH! par Théodore N. Kaufman (fac-similés des pages 87, 88 et 89 de l'édition originale américaine (1941l et des pages correspondantes de l'édition française) (Nous avons ajouté sa notice de l'ouvrage au catalogue électronique de l'université de New York, à la date du 24 mai 1999).
V. MÉDECIN A AUSCHWITZ. : correspondance avec Jullliard, éditeur français du livre de Nyiszli-Kremer.
1867. Les hommes d'État européens cherchent l'Europe à travers les nationalités bien définies par des frontières naturelles et, à l'opposé, le mouvement socialiste à travers l'Internationale. Pour les intellectuels, L'Europe est un des problèmes fondamentaux de l'humanisme. Et pour les marchands, de contacts commerciaux par-dessus les frontières, naturelles ou pas.
Les marchands sont les plus pratiques : à confronter leurs réalisations industrielles, voire artistiques, les peuples ne peuvent manquer d'apprendre à se comprendre et à s'estimer. Les hommes d'État les encouragent par souci d'étendre leur influence, les intellectuels par principe. Depuis 1850, la méthode des contacts est l'Exposition universelle 1 : en 1851 à Londres, en 1855 à Paris, en 1862 à Londres de nouveau... L'axe Londres-Paris.
En 1867, le tour revient à Paris. Et, afin que les visiteurs étrangers y puissent voir autre chose que ce qui était rassemble dans l'enceinte installée sur le Champ de Mars avec une annexe à l'île de Billancourt, qu'en somme il leur fut possible de prendre avec la France un contact beaucoup plus large par l'intermédiaire de Paris, les organisateurs de l'exposition éditent une nomenclature de tout ce qui est à y voir ou, du moins, de tout ce qu'ils désirent qu'ils y voient : Paris Guide. Le [8] soin de rédiger la préface de cette sorte d'inventaire des richesses en tout genre de Paris ayant été confié à Victor Hugo, voici le passage de cette préface qui résume le thème sur lequel il l'écrivit :
Qu'entré dans sa seconde moitié, le XXe siècle en question se sente beaucoup plus menacé de finir au milieu d'une Europe slave et soviétisée par surcroît que soutenu par l'espoir de cette Europe-là, dit assez I'ampleur de la mésaventure posthume qui arrive à Victor Hugo pour que point ne soit besoin d'insister.
De ce grand espoir ainsi formulé, ce qu'il faut donc seulement retenir, c'est l'intention et le niveau d'expression. Le niveau d'expres[9]sion surtout : les nationalités, les frontières naturelles, I'unite allemande, l'unité italienne, etc. si on lui avait fait remarquer qu'il n'en faisait pas mention, j'imagine assez qu'Hugo eut répondu par le même haussement d'épaules que si on lui avait propose d'apporter une solution définitive au problème des Guelfes et des Gibelins, des Armagnacs et des Bourguignons - Picards et Bourguignons, dit-il d'ailleurs de Richelieu et de la Maison d'Autriche, de la guerre de Cent Ans ou, que sais-je, du sacre de Clovis, par exemple.
Et pourtant... Les nationalités, les frontières naturelles, etc. c'était encore, pour l'Europe, se chercher à un niveau intellectuel qui, par comparaison avec celui auquel elle se cherche aujourd'hui, peut paraître relativement élevé. Je ne veux parler net, ni des hommes d'État qui ne la conçoivent que coupée au minimum en deux, ni des marchands dont le seul souci semble bien ne plus être que la multiplicité des frontières parce que, par le truchement des licences d'importation ou d'exportation, elles permettent un marche noir de l'or et des devises d'autant plus fructueux qu'elles sont plus nombreuses : dans les nations modernes, les hommes d'État et les marchands ne sont pas -- ou plus -- I'élite. Mais que penser des intellectuels ?
Si, la guerre de 1939-1945 terminée, les intellectuels ont recommencé à prôner l'Europe, ils ne l'ont, dans leur écrasante majorité, plus jamais fait qu'en mettant systématiquement en évidence les raisons de ne pas la faire et seulement celles-là : les crimes allemands, les camps de concentration allemands, une infinité d'Oradours, le militarisme prussien, etc. Tout récemment, ils en étaient à essayer de mobiliser l'opinion mondiale sur le comportement dans la guerre d'un simple lieutenant-colonel allemand : l'éternelle Allemagne, cette pelée, cette gueuse d'où vient tout le mal et avec laquelle il n'y a de rapports possibles que si on la maintient à genoux, sinon couchée et le couteau sur la gorge.
Il est bien certain que, ravalées et maintenues à ce niveau sur des thèmes aussi archaïques et en contradiction aussi flagrante avec les réalités, les discussions publiques ne peuvent que prolonger les vieilles querelles, non les apaiser, et que l'Europe n'a aucune chance d'y prendre conscience d'elle-même. Pour qu'il en soit autrement, il faudrait que l'Europe fût concevable non seulement sans, mais contre Allemagne.
Plus que tout, ce qui est grave, c'est que les intellectuels de 1962 ne voient pas :
Au lendemain de la première guerre mondiale, ces choses étaient encore des vérités indiscutées pour le plus grand nombre des intellectuels. Parmi eux, ceux qui se classaient à gauche et qui furent les fréquentations littéraires ou personnelles de ma jeunesse ardente et enthousiaste, n'étaient pas les moins catégoriques : Hermann Hesse, héritier spirituel de Bertha von Süttner, Romain Rolland, Alain, Mathias Morhardt, Victor Marguerite, Anatole France, Félicien Challaye, Jean Giono, Georges Demartial, René Gérin, Barthélemy de Ligt, Lusien Roth, le coutle Alexandre, etc. A ceux-là personne ne réussit à en conter sur le caractère unilatéral des horreurs et des responsabilités de la guerre : ils passèrent tout au crible et ils menèrent une vie très dure aux hommes de Versailles seulement soutenus par quelques intellectuels vieillis, fatigués ou fossilisés d'une droite qui ne les 5Uisait déjà plus.
Les hostilités terminées, s'il n'y eut sur le moment que peu de gens à penser qu'il était nécessaire de passer au crible les horreurs et les responsabilités de la seconde guerre mondiale, il est remarquable que ces gens aient été surtout de droite et qu'ils aient, en outre, fondé leur attitude sur les principes au nom desquels les intellectuels de gauche avaient refusé Versailles vingt-cinq ans plus tôt. Quant aux intellectuels de gauche, dans leur écrasante majorité, ils ont approuve et exdte Nüremberg au nom de principes dont, au temps de Versailles, ils reprochaient le caractère réactionnaire à ceux de la droite qui les faisaient leurs, et le phénomène n'est pas moins remarquable. Il y a là, en tout cas, un assez curieux chassé-croisé dans le secteur des principes et c'est dans ce chassé-croisé que s'inscrit mon drame personnel.
Quoique politiquement engagé, je restais soumis aux habitudes de l'histoire. La gauche était ma famille spirituelle. J'avais trouvé le confort intellectuel dans un socialisme qui était avant tout un humanisme et se nourrissait d'un espoir fondé sur une interpretation des faits historiques qui s'efforçait d'atteindre à l'obiectivité par la probité. Au moment où, je ne sais quel diable les poussant, devant la guerre d'abord, dans la résistance ensuite, les intellectuels de gauche se repliè[11]rent sur les positions politiques de ce nationalisme à la Déroulède que ceux de la droite même la plus extrême avaient depuis longtemps répudié, j'en souffris autant que d'une quelconque félonie dont se sentit collectivement rendue coupable ma vraie famille. Réaction d'affolement des intellectuels de gauche devant le danger ou reniement délibéré ? Par besoin d'espérer, j'optai pour la première éventualité. Mais, écarté le danger au prix auquel leur attitude nous l'avait fait payer, c'est-à-dire de la guerre, et l'heure du règlement des comptes ayant sonné, lorsque je découvris que, loin de revenir à leurs traditions et à leurs principes, ils ne songeaient qu'à justifier au moyen d'insoutenables thèses, les intenables positions politiques qu'ils avaient prises et n'hésitaient pas à dénaturer les faits historiques jusque par la sollicitation, la falsification, la subtilisation et l'invention de documents, je sus que j'avais espéré contre tout espoir et qu'il s'agissait bien d'un reniement délibéré. Du même coup, je sus aussi que ni mes opinionsons politiques et philosophiques, ni mon souci de la vérité historique et ma probité ne me permettraient jamais ni de m'associer à ce reniement, ni de m'en laisser suspecter.
Un effondrement. Aussi totalement moral et intellectuel qu'économique. et social. Tout était à recommencer à partir de zéro : prendre les faits un à un, les étudier dans leur matérialité et enfin les replacer correctement dans leur contexte historique. C'est l'affaire d'une génération. ration, pensai-je encore par besoin d'espérer. A condition de s'y employer sans tarder, ajoutai-je, peut-être que...
Je commençai donc par le fait historique sur lequel, pour l'avoir vécu, je me croyais le mieux renseigne : le phénomène concentrationnaire. Comme il était au premier plan de l'actualité et que tous les débats publies s'y ramenaient, on m'excusera si j'ai pense que jamais l l'occasion ne serait plus favorable. Le Mensonge d'Ulysse fut donc mon premier acte de fidélité aux principes de la gauche de 1919. A dix ans d'intervalle, Ulysse trahi par les siens qui est son complément, fut le second.
Voici le troisième. Après I'analyse, la synthèse : il vise à replacer le phénomène concentrationnaire dans son contexte historique qui est la guerre 1939-45. S'il m'est apparu que ce contexte ne pourrait être mieux défini que par une comparaison entre ce qui fit la matière des treize procès de Nüremberg... sans oublier le quatorzième qu'on fit à Jérusalem -- et le Traité de Versailles, c'est que les jugements sur pièces sont à mes yeux les plus sûrs.
En remontant le cours de l'histoire, c'est pour la commodité du lecteur.
P. R., Paris, Février 1962.
Ce texte a été
affiché sur Internet à des fins purement éducatives,
pour encourager la recherche, sur une base non-commerciale et
pour une utilisation mesurée par le Secrétariat
international de l'Association des Anciens Amateurs de Récits
de Guerre et d'Holocauste (AAARGH). L'adresse électronique
du Secrétariat est <[email protected]>.
L'adresse postale est: PO Box 81475, Chicago, IL 60681-0475, USA.
Afficher un texte sur le Web équivaut à mettre un document sur le rayonnage d'une bibliothèque publique. Cela nous coûte un peu d'argent et de travail. Nous pensons que c'est le lecteur volontaire qui en profite et nous le supposons capable de penser par lui-même. Un lecteur qui va chercher un document sur le Web le fait toujours à ses risques et périls. Quant à l'auteur, il n'y a pas lieu de supposer qu'il partage la responsabilité des autres textes consultables sur ce site. En raison des lois qui instituent une censure spécifique dans certains pays (Allemagne, France, Israël, Suisse, Canada, et d'autres), nous ne demandons pas l'agrément des auteurs qui y vivent car ils ne sont pas libres de consentir.
Nous nous plaçons sous
la protection de l'article 19 de la Déclaration des Droits
de l'homme, qui stipule:
ARTICLE 19
<Tout individu a droit à la liberté d'opinion
et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être
inquiété pour ses opinions et celui de chercher,
de recevoir et de répandre, sans considération de
frontière, les informations et les idées par quelque
moyen d'expression que ce soit>
Déclaration internationale des droits de l'homme,
adoptée par l'Assemblée générale de
l'ONU à Paris, le 10 décembre 1948.