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Paris, 19 sept. 1997

 

Fugit irreparabile tempus

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COMMENT JE N'AI PAS TUE MAURICE PAPON

 

par Serge Thion

 

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Pendant la guerre, M. Maurice Papon était dans l'administration. Il avait un poste important à la préfecture de la Gironde, à Bordeaux. Comme tous les hauts fonctionnaires, il a signé des ordres, en application des directives données par les préfets, qui représentent le gouvernement dans chaque département. Les actes d'un haut fonctionnaire sont donc ceux du gouvernement, par délégation. On lui reproche aujourd'hui d'avoir signé l'ordre d'envoyer à Paris, ou plutôt à Drancy, un centre de rétention proche de Paris, des juifs qui avaient été arrêtés à Bordeaux. A ces gens, on n'avait rien d'autre à reprocher que le fait d'être juif. S'assurer de leur personne et les mettre de force dans un train à destination de Paris est un crime incontestable, une atteinte insupportable au droit des gens. Il a été commis par l'Etat qui, à ce moment-là, se faisait appeler "l'Etat français" parce qu'il ne voulait pas être confondu avec la République. Cet Etat, son chef, et certains de ses hauts responsables ont été jugés (hâtivement) et condamnés (sommairement) à la Libération. Ce mot est évidemment à mettre entre guillemets à cause de son fort contenu d'idéologie de l'époque. Si la condamnation du régime de Vichy, après son effondrement, n'a pas été plus radicale, ou profonde, ou définitive, c'est en raison des circonstances de l'époque, que seuls les imbéciles et les ignorants peuvent se dispenser d'évoquer. Les gens qui étaient au pouvoir entre 1944 et 1950 avaient leurs raisons, bonnes ou mauvaises, que chacun jugera sans doute à l'aune des "valeurs" hypocrites qui fleurissent aujourd'hui.

S'attaquer 40 ou 50 ans après les faits à l'ancien haut fonctionnaire Papon, qui a signé ces ordres, est évidemment un déni du droit. Papon avait des supérieurs, et ces supérieurs -- préfets, cabinet ministériel, ministres -- n'ont pas été poursuivis avant Papon du chef de ces crimes alors qu'ils avaient, étant plus hauts dans la hiérarchie, la responsabilité d'avoir donné les ordres que Papon transmettait. Il ne les a pas inventés tout seul, personne ne cherche à dire que la politique de Vichy à l'encontre des juifs serait le fait de ce seul fonctionnaire. C'est un déni de justice parce que les crimes, en droit français, sont prescrits après vingt ans. Et qu'on ne nous dise pas que le cas de Papon n'a pas été examiné à la Libération. Il a dû se défendre et arguer de ce qu'il avait fait pour la Résistance. Manger à tous les râteliers n'est pas encore un crime contre l'humanité. En outre, et on l'oublie un peu trop en ce moment, diverses loi d'amnisties ont, depuis 1950, peu à peu éteint les poursuites. Ces lois, encore une fois, avaient leur raison d'être politique et les moralisateurs du monde merdiatique, tous frénétiques partisans du massacre des ennemis officiels (islamistes, arabes, etc.), n'ont pas à donner de leçons dans le domaine, parfaitement nécessaire, de la réconciliation nationale -- si l'on accepte l'idée que la nation est le fondement de notre existence politique.

On attendait la fin des guerres coloniales et l'amnistie des atrocités françaises en Algérie pour se réconcilier avec le droit. En 1964, la France fait ce qu'elle n'aurait pas pu faire sans sombrer dans le grotesque et décrète imprescriptibles les "crimes contre l'humanité", une catégorie juridique qui était d'ailleurs absente du droit français. Elle n'y a fait son entrée que beaucoup plus tard et a reçu sa codification dans le nouveau code pénal publié en 1993-94. L'application rétroactive de cette imprescriptibilité a été le fait de la magistrature elle-même qui a commis cette forfaiture comme préliminaire au procès Barbie. Instituer une rétroactivité de la loi est une atteinte aux Droits de l'homme et du citoyen tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789 (article VIII : ... nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit...) Par conséquent, le procès de Papon pour ses activités en tant que secrétaire général de la préfecture de la Gironde ne peut se tenir aujourd'hui que parce que la magistrature a commis et va commettre les plus incroyable forfaitures et trahisons du droit de ce pays. Mais nous y sommes habitués et il y a beau temps que nous savons que les magistrats de ce pays ne sont si debout ni assis, mais couchés.

L'excellent fonctionnaire qu'était Papon va ensuite connaître une remarquable carrière. Dans la préfectorale d'abord, et pour longtemps. Ses biographes de la presse n'ont pas été fouiller son rôle comme préfet de Constantine, dans les débuts de la guerre d'Algérie. Il a pourtant laissé là-bas quelques souvenirs sombres. Ensuite, son heure de gloire vint avec le poste de préfet de police de Paris. C'était lui le patron, en octobre 1961. C'est sous sa magistrature que l'on a fait venir d'Algérie des harkis comme supplétifs de police. Ces brutes armées semaient la terreur, non seulement dans les quartiers habités par les travailleurs immigrés où ils arrêtaient et torturaient qui ils voulaient, mais aussi dans le reste de la Ville.

Il s'est passé alors à Paris ce qui était proprement inimaginable. Papon avait décrété, au début du mois, le couvre-feu pour les travailleurs algériens, qui étaient plusieurs centaines de milliers dans la région parisienne et qui habitaient ces planètes disparues qu'on appelait "bidonvilles". Comment une telle mesure pouvait-elle même être conçue par des fonctionnaires ? C'était cette sale guerre, non-déclarée, que les militants de la libération menaient contre le pouvoir colonialiste. Nous avions un million de soldats français pour surveiller et traquer les Algériens en Algérie. Le FLN (Front de libération nationale) avait porté la guerre en "métropole". L'inattendu fut de voir les cadres du FLN faire descendre dans la rue, dans un ordre impeccable, la quasi-totalité des travailleurs algériens pour protester contre ce couvre-feu. Les hommes étaient sans armes, strictement, et défilaient sans la moindre violence. Leur détermination en était d'autant plus impressionnante. Sur les ordres du préfet Papon, les flics parisiens ont commencé à tirer dans la foule qui marchait dans la rue. Ils ont tiré, à balles réelles, sans la moindre provocation. La masse a reflué, la police a chargé. On a arrêté des dizaines de milliers d'hommes. Ils ont été frappés avec les longues matraques. Des centaines d'hommes ont été tués, là, dans la nuit, à Paris, dans la rue, dans les commissariats, dans la cour de la Préfecture, les corps souvent jetés à la Seine, pendant que la population parisienne restait dans un écart, une indifférence hostile, une absolue absence de solidarité avec ceux qui n'avaient que les os de leur crâne et la peau de leur poitrine à opposer au crépitement des mitraillettes et au choc des gourdins de bois. On a même vu, dans certains quartiers, des Français, des gens de la rue, sortir de leur voiture la manivelle en acier (les voitures avaient encore toutes dans leur coffre une manivelle pour démarrer les moteurs) et se joindre aux flics qui frappaient les Algériens refluant sous la violence des assauts policiers. J'atteste que les Français, dans leur immense majorité, se trouvaient aux côtés de leur police pour frapper, torturer et tuer les Algériens qui réclamaient leur indépendance. Papon était le chef des exécutants. Il donnait les ordres directement. Il a le sang de ces centaines de meurtres sur les mains, car, répétons-le, le paradoxe de ce soir du 17 octobre 1961 était que les Algériens, tous confondus, militants et travailleurs, combattants et commerçants, étaient sans armes et marchaient en silence. Crime il y a eu. Crime énorme, collectif, dont la responsabilité retombe entièrement sur ce qu'un ridicule euphémisme appelle "les forces de l'ordre".

La presse, servile à son ordinaire, n'a presque rien rapporté de ces événements incroyables. La presse n'a cessé de mentir grossièrement pendant le guerre d'Algérie. Mais enfin Paris n'étant pas dans les montagnes de l'Ouarsenis, les choses se sont sues. Moi, j'étais bien placé pour savoir, j'avais dix-neuf ans et je travaillais dans la clandestinité avec les Algériens. Mais pour la poignée de Français qui faisaient ce qu'on appelait du "soutien" à la lutte des Algériens, la consigne était de ne pas se mêler aux manifestations. Il fallait s'en tenir écarté, pour rester efficaces. Mais je me souviens du désespoir atroce qui nous étreignait au fur et à mesure que l'on apprenait ce qui s'était passé dans les endroits où les cortèges avaient été massacrés. Nous n'avions plus qu'un désir, prendre des armes et pénétrer dans un commissariat et abattre tous ces salauds de flics. Nous ressentions ce désir très violemment, noué au fond de nos tripes. C'était la guerre. Ils nous tuaient, il fallait les tuer. C'est ce jour là que j'ai cessé d'être français. La France était du côté des assassins, des porcs sanguinaires qui tuaient en masse ceux qui se présentaient dans la nudité de leur bon droit, dans la tradition qu'on m'avait enseignée sur les bans de l'école, la République, la Résistance, le droit de s'insurger contre un régime injuste qui bafoue l'humanité. J'ai compris que l'Etat, quand il en a fini avec ses baratins idéologiques, ses dégoulinasseries humanistes, ses troufignolages juridiques, l'Etat c'est la force, c'est la matraque, c'est le fusil qui vous tue. En général, il cache sa nature, mais si on le pousse à bout, il fait ce qu'il a fait en octobre 1961 à Paris. Il massacre, jusques au pied de ses tapis rouges et de ses palais nationaux, dorés et putréfiés du sang de nos ancêtres, eux aussi régulièrement massacrés par l'Etat au cours des âges. Etre serviteur de l'Etat, c'est s'engager dans la voie du crime. Je le voyais de mes yeux en circulant en bordure des manifestations, ravagé par l'émotion, le sang, au bord de la folie suicidaire qui seule aurait effacé tout cela. Puisque défendre une cause juste vous faisait massacrer par les chiens de garde de la puante bourgeoisie française, il était bon de mourir du bon côté. Je n'ai jamais oublié cette leçon de choses. Et je ne l'oubliais pas non plus en juin 1968. Quand de Gaulle est parti en Allemagne pour voir s'il pouvait compter sur des soldats qui viendraient éventuellement nous massacrer, j'ai été l'un des rares, dans le mouvement de mai 68, à dire que le moment était venu, si nous étions sérieux et si nous voulions saper l'Etat, de prendre les armes et de nous préparer à nous battre et à mourir pour la liberté. On m'a regardé comme un pauvre illuminé et l'ordre étatique a été rétabli deux semaines plus tard. Les conséquences de cette défaite sans combat sont encore visibles aujourd'hui.

Papon ne fut donc pas même critiqué. Tout au contraire, il fut loué dans les allées du pouvoir comme celui qui avait gagné "la bataille de Paris", et sauvé la république. Moins d'un an plus tard, l'Algérie accédait à l'indépendance et la république française devait bon gré mal gré renier toutes les promesses qu'elle avait faites depuis des années à l'armée, aux Pieds-Noirs, à l'opinion française. Papon avait un supérieur hiérarchique, le ministre de l'Intérieur, Roger Frey. Roger Frey est mort la semaine dernière et son décès n'a provoqué que des murmure laudatifs. Un grand homme d'Etat disparaissait. C'était pourtant un grand criminel mais il n'a jamais eu à en répondre. Et au dessus de Frey se trouvait le premier ministre, Michel Debré, un autre grand criminel de guerre (1), et, au dessus encore, le général de Gaulle. Il a couvert les meurtres de masse, les tortures, les corps jetés dans la Seine. Un homme qui avait lutté contre Hitler ne pouvait pas être mauvais. Et pourtant, il était pleinement et totalement responsable et pour moi, là où j'étais, avec plusieurs de mes copains qui ont disparus ce soir-là et qui ne sont jamais revenus, je ne voyais pas bien la différence, je ne la voyais même pas du tout. Comme je l'ai dit, j'ai cessé d'être français ce jour-là, et je ne le suis jamais redevenu.

Parce qu'ensuite, toutes ces choses ont été effacées. Effacées non par l'oubli et le temps irréparable qui fuit devant nous. Effacées par décision politique. Le gouvernement, dès 1964, a décidé d'amnistier les crimes commis "en relation avec les événements d'Algérie". Les crimes contre l'Etat commis en 1958 pour faire parvenir le général de Gaulle à la tête de l'Etat avait déjà été amnistiés le 31 juillet 1959 (loi 59-940). Les lois du 17 et du 18 juin 1966 (66-396 et 66-409), complétées par celle du 31 juillet 1968 (68-697) allaient non seulement exonérer les auteurs de crimes et d'atrocités variées mais interdire concrètement à quiconque de mentionner publiquement la responsabilité des individus qui, dans le cadre de leurs fonctions, avaient eu à les ordonner. Là, tout d'un coup, quelle que soit l'ampleur des exactions et la quantité de meurtres (des centaines de milliers de civils ont été tués par l'armée française qui cherchait à intimider les maquisards), il n'était plus du tout question de crimes contre l'humanité. Nuremberg oublié. Les lois d'amnistie emploient d'ailleurs le terme pudique d'"infractions" pour désigner les actes qu'elle vouent ainsi par décision autoritaire à l'oubli, au moins judiciaire. Les Romains avaient la même institution qu'ils appelaient damnatio memoriae. Mais elle s'appliquait aux criminels reconnus. Chez nous, elle recouvre le criminel d'une innocence inoxydable. On ne peut pas poursuivre Papon. Ces faits, infiniment plus sanglants et criminels que d'avoir mis des gens dans des trains pour Paris, ne seront pas connus des tribunaux. La presse elle-même, qui les évoque, les place aussi sur un plan infiniment moindre. Alors je vais le dire parce qu'il faut bien crever le mur d'hypocrisie qui entoure ce monde politique répugnant qui tente de nous gouverner: massacrer des Arabes, des musulmans n'est pas un vrai crime contre l'humanité, on peut même le faire de temps à autres pour se distraire ou pour donner de l'exercice à nos braves pioupious (la preuve: l'Irak), tandis que faire du mal à un juif est un crime qu'aucune punition ne saurait jamais laver dans les siècles des siècles. On voit ainsi, de temps à autres, dans le carnet mondain du Monde, le rappel de la disparition, pendant la guerre, d'un juif, dans l'enfer concentrationnaire, suivi de la mention, évidemment rédigée par la famille: "ni pardon ni oubli". Les gens qui pensent et écrivent de telles choses révèlent ainsi leur nature: ils sont plein d'inhumanité, ils n'ont rien compris et ne comprendront jamais rien de ce qu'est la vie des hommes et des sociétés. Ils sont pétris de bêtise et de haine. C'est parce qu'ils sont animés exactement de ces sentiments que les Israéliens massacrent tous les jours, torturent à mort et emprisonnent à vie des gens qui ont commis le crime d'avoir vécu en Palestine depuis bien longtemps avant eux, avant que certains juifs s'avisent de venir, le fusil à la main, les dépouiller au nom de théories entièrement fumeuses.

Ces inhumains devraient être eux-mêmes oubliés et pardonnés. On devrait les abandonner à leurs petites rages mesquines et à leur pauvre désir de récupérer des sous.

Pour moi, et pour quelques autres, il y avait une exigence de justice. Quelques temps après le massacre d'octobre 1961, la direction algérienne en France a décidé de faire un sort à Papon. Je ne sais pas très bien s'il s'agissait de l'enlever pour lui faire un procès à l'étranger ou s'il suffisait de l'assassiner. Toujours est-il qu'on nous demanda de monter une filature permanent de Papon, toujours préfet de police. Pendant quelque mois, il fut ainsi l'objet de la surveillance rapprochée d'un petit groupe de garçons et de filles qui avaient choisi le soutien à la cause algérienne. Il se rendait discrètement à certaines adresses privées. Nous crûmes d'abord qu'il avait des maîtresses, pour arriver ensuite à l'idée qu'il s'agissait de barbouzières, de lieux de rencontre entre Papon, l'homme de l'Etat, et les "barbouzes", espions, malfrats et autres gens de sac et de corde que l'Etat (gaulliste) entretenait pour l'exécution de ses basses oeuvres.

Un instructeur du FLN nous avait apporté une mitraillette et nous avait instruit de son maniement. Je crois que nous avions largement assez de données sur les habitudes et les déplacements de notre cible pour le tuer assez commodément. Mais nous étions des militants disciplinés et nous attendions l'ordre politique de passer aux actes. Cet ordre n'est jamais venu. Les négociations d'Evian allaient bon train et les Algériens ont dû penser qu'il n'était pas utile, à ce moment-là, de faire tuer un des grands criminels français qui était une figure de l'Etat gaulliste. Ils ont même renoncé, à cette époque-là, et le sang était frais, et beaucoup d'hommes étaient encore en prison, à faire le procès de la colonisation, le procès des crimes de guerre et des crimes de la répression parce qu'ils ont jugé que l'indépendance était ce qu'ils voulaient par dessus tout, la cause pour laquelle tant d'entre eux s'étaient sacrifiés, et qu'il serait utile, à l'avenir, d'avoir de bons rapports avec la France. Ils ont donc choisi l'oubli et le pardon. Et je puis en témoigner parce que je me suis rendu en Algérie quelques semaines après l'indépendance et que j'y ai été reçu comme un ami partout, dans les familles, dans les bourgs, dans Alger qui sortait du cauchemar du terrorisme de l'OAS. Jamais un Algérien n'aurait eu un mot d'insulte ou de reproche à dire aux Français qui partaient après 130 ans d'occupation brutale, raciste et obscurantiste. Je dis que ces gens dont l'humanisme s'enracine dans l'islam sont humainement mille fois supérieurs aux affreux mesquins qui signent "ni pardon ni oubli".

Je n'ai pas tué Papon. L'aurais-je fait ? A l'époque, je n'aurais eu aucune inquiétude morale. C'était la guerre. Le gouvernement de l'époque manifestait sa volonté d'envoyer des gens comme moi en Algérie. Dans cette guerre-là, on était d'un côté ou de l'autre puisqu'il n'était pas possible de s'abstenir, sauf à déserter. C'est du moins comme cela que j'en jugeai, et tous ceux qui étaient engagés dans cette affaire (c'est-à-dire à peu près tous les jeunes Français, sans parler de la totalité des Algériens) le pensaient aussi. Aujourd'hui, je rends hommage à la sagesse des Algériens. Ils n'ont pas cherché la vengeance pour la vengeance. Ils ont laissé le passé enterrer le passé. Malgré des dossiers accablants, et qui étaient déjà rassemblés, ils se sont tournés vers l'avenir. Là, malheureusement, ils n'ont pas fait preuve de la même sagesse. Et moi, le hasard a fait que je ne suis pas devenu un assassin (ou un complice, ce qui revient au même). Je crois que je l'aurais regretté. J'ai appris et compris, un peu plus tard, peu à peu, que l'on n'a pas le droit de prendre la vie humaine. Cette vieille charogne de Papon est rattrapée par des crimes antérieurs qui, bien que prescrits, seront jugés pour faire plaisir à la communauté des éternels persécutés-persécuteurs. Tant pis pour lui. Tant pis pour eux, qui vont encore apparaître comme d'illégitimes directeurs d'opinion. Lui qui a fait tuer de sang froid, qui a échappé à la balle de la justice expéditive en 1962, il va jouir à son tour d'une persécution fondée, elle aussi, sur le déni de la justice. Ces gens sont faits pour s'entendre, ils sont fait du même tissu. La justice, faite de tous ces écoeurants marchandages, ne trouvera pas son compte. La justice, c'était la balle dans la tête, comme en octobre à Paris. Le plus dur est qu'il faut sans doute reconnaître qu'un monde sans justice, c'est-à-dire le monde réel, sans sauveur ni messie, est préférable à celui que nous réserve l'atroce inhumanité des justiciers qui ne défendent que soi.

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