Monsieur, je vous remercie, ainsi que le directeur de la revue, de la courtoisie avec laquelle vous me proposez de répondre à votre tribune libre, car à ce jour aucune publication ne m'avait accordé de "droit de réponse" à ses diffamations et à ces insultes, alors que ce droit est inscrit dans la loi.
Pour ne pas abuser de l'hospitalité qui m'est offerte, je me contenterai de quelques remarques :
1 La question centrale de votre critique (les "chambres à gaz"), occupe la moitié de votre article. Dans mon livre, elle occupe neuf pages (141-150) sur 268 (2). Pourquoi ?
a/ Parce que, dans tout procès criminel, en dehors des textes et des témoignages, il y a une expertise de "l'arme du crime" (c'est le sous-titre de mon chapitre sur Nuremberg) et je constate qu'à aucun procès des criminels de guerre, il n'a été procédé à cet examen capital du dossier (ni les chambre, ni les camions, etc.).
b/ Parce que mon propos n'était pas d'affirmer ou de nier leur existence, mais de demander une controverse publique et loyale entre les spécialistes. Et je me permets, ici, de relever une inexactitude de votre article. Vous dites que je "cite comme référence absolue le Rapport Leuchter". Or, à la page 143 de mon livre, j'invoque "trois documents qui permettraient, s'ils étaient discutés sérieusement et publiquement, de mettre fin aux polémiques sur les chambres à gaz : ce sont le Rapport Leuchter, la contre-expertise de Cracovie et celle de Germar Rudolf". J'ajoute la référence au livre de Jean-Claude Pressac Les Crématoires d'Auschwitz, la machinerie du meurtre de masse (CNRS éditions, 1993).
Je souhaite seulement qu'entre les quatre auteurs de ces études il y ait une véritable confrontation, alors que je constate que seul l'ouvrage de Jean-Claude Pressac a été "médiatisé", les autres expertises concluant différemment ont été interdites : celle de Fred Leuchter et celle de Germar Rudolf. L'expertise de Cracovie étant passée sous silence.
De même pour le rendement possible des fours crématoires, n'étant pas compétent sur ce point non plus, je me suis référé aux analyses d'un spécialiste, Ivan Lagacé, un crématiste canadien, directeur du crématoire de Bow Valley à Calgary (Alberta, Canada) (3). Vous invoquez, ce qui est normal, d'autres témoignages: ceux des ingénieurs de l'entreprise Topf qui construisit en effet les crématoires au temps de Hitler (4). Là encore, je ne demande rien d'autre que la confrontation d'experts en la matière, qui sont nombreux dans le monde.
Enfin, vous affirmez que je reproche à J.-C. Pressac "d'avoir traduit Leichenkeller, "cave à cadavres" par "chambre à gaz", ce qu'il n'a jamais fait." Je lis pourtant à la page 65 du livre de J.-C. Pressac "[...] les SS décidèrent d'adjoindre à la chambre à gaz (la Leichenkeller 1) un vestiaire (la Leichenkeller 2) [...] ".
Je ne vois donc pas en quoi votre tribune libre conclut que ce reproche m'"enlève toute crédibilité sur le massacre des juifs."
Conclusion d'autant plus étonnante que vous m'attribuez des thèses qui n'ont jamais été les miennes; en particulier d'avoir "utilisé comme preuve irréfutable de l'existence des chambres à gaz homicides" le Rapport Leuchter alors qu'au contraire j'en demande la discussion publique (page 260).
Est-ce déroger à la "crédibilité historique"?
D'autant plus que ces problèmes techniques n'étaient pas, pour moi, déterminants en comparaison de l'énormité du crime contre l'humanité.
Je ne me suis livré à aucune "comptabilité macabre", m'en tenant aux chiffres rectificatifs donnés par les historiens officiels comme Raul Hilberg, Martin Broszat ou François Bédarida. J'ajoute même à deux reprises dans mon ouvrages (pp. 159 et 247) : "l'assassinat d'un seul innocent, qu'il soit juif ou qu'il ne le soit pas, constitue déjà un crime contre l'humanité".
Puis, rappelant le martyrologe des déportés juifs et slaves ainsi que la férocité des monstres hitlériens (p. 257), je redis (p. 247): "N'y eut-il qu'un seul homme persécuté pour sa foi ou son appartenance ethnique, il n'y aurait pas moins eu un crime contre l'humanité tout entière."
Un seul argument de votre tribune libre m'a touché. Vous me reprochez d'avoir traité de "bourreau" (p. 260) Heinrich Messing, le contremaître qui installa à Birkenau l'aération de la morgue du crématoire II puis celle du III.
Vous dites, en retraçant sa biographie, qu'il ignorait à quoi servait son travail. Je suis obligé de vous croire sur parole puisque vous ne donnez pas vos sources. Mais, conformément à ce que j'ai toujours promis (corriger toutes les "erreurs" de mon livre dont il me serait donné la preuve), envoyez-moi la source et je supprimerai le terme de "bourreau" qui serait, en ce cas, diffamatoire.
Ceci dit, je dois surtout vous remercier pour les multiples confirmations que vous apportez à mes thèses qui avaient pour objet, je le rappelle :
1/ De ne pas nier le massacre de nombreux juifs par les nazis en raison de leur hideux antisémitisme. J'ai simplement rappelé :
a/ que les juifs furent victimes du nazisme, mais qu'ils ne furent pas les seuls.
b/ que l'exagération des chiffres (que vous démontrez abondamment), avait des conséquences graves; d'abord en augmentant les "réparations" des dommages de guerre (qu'il était juste d'attribuer aux victimes survivantes ou à leurs familles), mais qui servirent principalement à l'équipement et à l'armement de l'Etat d'Israël, qui n'y avait aucun droit (voir en particulier le témoignage du président du Congrès juif mondial, Nahum Goldman, pp. 231 à 236) ; ensuite que l'exploitation médiatique des malheurs réels des juifs, par la télévision, l'édition, la presse, a donné lieu à un véritable shoah business, dont j'ai donné un exemple, le film de Jacques Lanzmann Shoah, recevant de Begin 850 . 000 dollars pour ce "projet d'intérêt national" (p. 137); enfin, ce grossissement des chiffres n'a pas seulement servi à occulter le martyrologe de toutes les autres victimes: opposants politiques, tziganes ou autres, mais a servi à justifier les exactions ultérieures de l'Etat d'Israël (197condamnations à l'ONU restées lettre morte).
L'objet de mon livre ne comporte ni la moindre critique de la religion juive, ni la mise en cause de l'existence de l'Etat d'Israël : c'est un livre, comme je l'affirme dans le titre et d'entrée de jeu, exclusivement politique, dénonçant "la politique israélienne", depuis la collaboration avec Hitler de ceux qui devinrent ses dirigeants, depuis les accords de la Haarawa jusqu'aux propositions d'alliance militaire avec le nazisme de Shamir, depuis les massacres de Deir Yassin, jusqu'à ceux de Cana.
Maintenant, mes remerciements
Vous dites: "les méthodes du tribunal militaire international de Nuremberg sont discutables". Vous voilà passible, comme moi, des foudres de la loi Gayssot que vous considérez, avec indulgence, comme "inadaptée".
Vous êtes d'autant plus coupable (comme moi, d'ailleurs) que vous apportez des preuves ("photographies maquillées" ou "truquées"). Les "traductions, dites-vous, furent parfois tendancieuses (Ausrottung traduit par "destruction" au lieu "d'extirpation"). Prenez garde, cher Monsieur, on va vous accuser de mal interpréter la "solution finale".
Vous ajoutez, parlant de la "légende de l'holocauste": "le chiffre de six millions ne correspond plus à la réalité historique". Je n'ai cessé d'affirmer la même chose : lorsqu'Hilberg et Bédarida arrivent à la conclusion qu'à Auschwitz il y a eu environ un million de morts et non quatre millions, il est difficile de maintenir le total de six millions (à moins que les historiens n'aient pas compté les quatre millions de morts d'Auschwitz dans les six millions). Sinon, il faut admettre que 6 - 3 = 6.
Vous parlez d'un chiffre "symbolique". Je disais "mythique" car le mythe entraîne, par son exemplarité, des actions, comme le "mythe de Josué" devenant pour les intégristes juifs (qui ne cessent de l'évoquer) un exemple de ce qu'il faut faire pour conquérir "l'Israël biblique" et procéder comme Goldstein à Hébron à l'égard des "Cananéens arabes".
Vous dites que "l'école américaine, ayant oublié la question essentielle, est tombée au stade des "bataillons de police" et ne produit plus que des travaux aberrants".
Combien vous avez raison, lorsque vous en donnez comme exemple l'ouvrage de Daniel Jonah Goldhagen, Les Bourreaux volontaires de Hitler, appelant à la haine tout le peuple allemand qui serait responsable des crimes de ses dirigeants d'alors.
Il est vrai, qu'un long passage, assez obscur, de votre tribune libre tente, au moins partiellement de sauver la légende des gazages de Dachau, alors que Martin Broszat, de l'Institut d'histoire contemporaine de Munich dont il est devenu le directeur en 1972, a publié, dès le 19 août 1960 dans Die Zeit ce communiqué : "Ni à Dachau, ni à Bergen-Belsen, ni à Buchenwald, des juifs ou d'autres détenus n'ont été gazés". Ce qui n'est plus contesté par aucun historien, malgré les milliers de témoignages oculaires, aussi nombreux que ceux qui ont évoqué les gazages à Auschwitz.
Quant à la "preuve d'une chambre à gaz homicide", elle serait donnée, dites-vous, dans une lettre du 2 mars 1943, publiée en effet dans le livre de J.-C. Pressac (op cit, p. 72). A parler franc, votre lettre me paraît peu convaincante, mais ce courrier a le mérite de détruire le mythe du "langage codé" et du "secret" par des ordres seulement "oraux" sur les "chambres à gaz homicides", si l'on peut ainsi échanger lettres et télégrammes.
Je vous remercie donc de ces précieuses confirmations et je crains seulement que l'on porte contre vous aussi l'accusation de "révisionnisme" pour votre méritoire "révision" d'une "histoire légendaire qui fut pour le peuple juif et l'état israélien d'une nécessité vitale après la guerre" sur laquelle, ajoutez-vous "aucune recherche historique fondamentale n'a été engagée depuis des années, sauf en de rares exceptions."
Faut-il compter, parmi ces exceptions, ce que vous citez vous-même à propos de Dachau: "Le titre du dossier ''Baraque X'', était prometteur, digne d'un roman policier et fouettant l'imagination des justiciers venus d'outre-Atlantique".
J'ai été inculpé pour avoir dit beaucoup moins. Je ne vous souhaite pas le même sort
Avec mes félicitations
Roger Garaudy
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Source: L'Autre Histoire,, revue d'histoire publiée par l'ABRH (adresse: SFPLA, BP 3, 35134 Coesmes. Directeur: Trystan Mordrel), n° 6, daté du 16 octobre 1996, p.15-17.
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