AAARGH
Aussi difficile que cela puisse être pour nous [Israéliens],
il est important de dire clairement quelle est la réalité
politique, légale et morale morale de la situation dans
laquelle nous vivons, et cela dans son contexte historique : depuis
1967, des millions de Palestiniens vivent sous une occupation
miliaire, sans droits civiques et la plupart d'entre eux même
privés des droits humains élémentaires. L'occupation
permanente et la répression permanente leur donne, quoi
qu'en en dise, le droit de résister à cette occupation
par tous moyens à leur disposition et de faire usage de
violence envers les occupantS. C'est là un droit moral
inhérent aux lois naturelles et aux lois internationales.
Le problème est aggravé par la proximité
physique qui oblige les deux populations de vivre côté
à côte, situation qui impose la forme que prennent
les combats. Le terrorisme palestinien aveugle contre des civils
dans le c_ur même d'Israël est immoral et produit un
effet boomerang. Il augmente la peur et la haine dans la communauté
juive et empêche la prise en considération rationnelle
indiscutable des demandes palestiniennes justifiées. Le
terrorisme [palestinien] est aussi utilisé par des politiciens
de droite cyniques, et aussi, ces derniers temps par certains
chefs militaires importants pour couler toute possibilité
d'arrangements entre Israël et les Palestiniens.
D'autre part les mesures prises par l'armée et les colons
provoquent la mort de Palestiniens choisis au hasard, ce qui est
également inacceptable sur le plan de l'humanité.
Des centaines des Palestiniens ont été tués,
des milliers blessés depuis l'intifada partie d'El-Aqsa
fin septembre. Maintenant Israël a souvent recours aux punitions
collectives - découpages et siège du territoire
palestinien - expressément interdites par le droit et les
conventions internationals. Et Israel pratique le terrorisme contre
des individus qu'il a désigné comme les chefs locaux
du soulèvement palestinien.
Le droit des Palestiniens à la résistance est renforcé
par l'interdiction de la convention de Genève de créer
des faits irréversibles dans les territoires conquis, et
tout particulièrement par le transfert de populations de
l'Etat conquérant vers les zones conquises. La prétention
des Israéliens de ne pas être des occupants est pour
le moins roublarde, car ils n'avaient pas de souveraineté
sur ces territoires après le départ des Britanniques
en 1948 et le rejet du plan de partition de 1948 par les Palestiniens.
Selon la Haute cour de justice, qui connaît bien la quatrième
convention de Genève, toutes les colonies au-delà
de la ligne verte furent établies pour des raisons de sécurité,
un trou qu'Israël a découvert dans le droit international
pour justifier leur construction. Le deuxième trou dans
le droit utilisé par Israël est qu'il n'exproprie
pas des terrains privés mais que les colonies sont construites
sur des terres d'Etat.
Depuis 1967, plus de 60% de la Cisjordanie ont été
définis comme terre d'Etat, alors qu'il s'agissait en fait
d'annexions sélectives de facto. Cette manière de
faire appelée "légale" fut possible parce
que la plupart des terres n'avaient pas été inscrites
dans un livre foncier, ni par les Ottomans, ni par les Britanniques,
ni par les Jordaniens. Mais tous ces régimes avaient reconnu
la propriété traditionnelle des agriculteurs.
Dans les années 1980, l'Etat d'Israel procéda à
des saisies de terre sans précédent jusque-là
en confisquant tout simplement toutes les terres non enregistrées
dans le livre foncier appelé tabu, sans même permettre
aux populations de prouver leur titre de propriété.
Cela fait que tous les établissements juifs dans ces territoires
sont hautement douteux sur le plan moral et légal.
Plusieurs faits ont émoussés les sens politiques
et autres des Israéliens. Jusqu'à la fin de 1987,
la résistance palestinienne fut seulement un sujet de dissention
mineur. La société israélienne jouissait
des fruits de l'occupation "permanente temporaire" sans
en payer le prix réel et immédiat. Dans cette situation,
un mélange de messianisme nationaliste-religieux, de chauvinisme
laïc à la manière du Likoud, et d'idéologie
de la sécurité au-dessus de tout du Mapai et de
l'Ahdut Avoda n'eut aucune peine à dominer la pensée
politique israélienne.
Aujourd'hui le grand public israélien tout simplement ne
sait pas que chaque pas violent fait en direction des Palestiniens
- et encore moins la somme de tous ces pays - touche le crime
de guerre et ne voit pas le drapeau noir flottant au-dessus chacun
de ces pays. Un Etat qui se considère lui-même comme
illuminé pense qu'il n'est pas un Etat terroriste, même
s'il est lui-même victime de terrorisme. Les politiciens,
les généraux et les simples citoyens doivent regarder
ce drapeau noir avant qu'il ne soit trop tard et que nous portions
tous la plus noire de toutes les taches.
Haaretz, mardi 27 mars, 2001
The same in English
As difficult as it may be for us, it's important to make clear
the political, legal and moral reality in its historical context:
Since 1967, millions of Palestinians have been under a military
occupation, without any civil rights with, and most lacking even
the most basic human rights. The continuing circumstances of occupation
and repression give them, by any measure, the right to resist
that occupation with any means at their disposal and to rise up
in violence against that occupation. This is a moral right inherent
to natural law and international law.The problem is worsened by
physical proximity, in which the two populations live next door
to one another, and how that imposes itself on the form of fighting.
Indiscriminate Palestinian terrorism against civilian populations
in the heart of Israel is immoral, and has a boomerang effect.
It increases anger and hatred in the Jewish community and blocks
the possibility that an empathetic, rational view can be taken
of rightful Palestinian demands. The terrorism also serves as
a political tool, consciously used by cynical politicians on the
right, and lately by some leading army commanders, to torpedo
any possibility of agreements between Israel and the Palestinians.
Furthermore, steps initiated by the army and the settlers often
result in the indiscriminate killing of Palestinians, which is
equally unacceptable by any human measure. Hundreds of Palestinians
have been killed and thousands wounded since the outbreak of the
Al-Aqsa Intifada in late September. Israel now turns frequently
to collective punishments -- sieges and carving up of Palestinian
territory -- that are expressedly forbidden by international law
and convention. And Israel uses personal terrorism against those
it defines as field commanders of the Palestinian uprising.
The Palestinian right to resist the occupation is strengthened
by the Fourth Geneva Convention's ban on creating irreversible
facts on the ground in occupied territories, and especially the
ban on transferring populations from the occupying state to the
territories it has conquered. Israel's claim that it is not an
occupier -- because there was no sovereignty over those lands
since the British left in 1948, and the Palestinians rejected
the 1948 partition plan -- is at best, dodgy.
According to the High Court of Justice, which is well aware of
the Fourth Geneva Convention, all the settlements over the Green
Line were built for "security" reasons, which is the
loophole Israel found in international law to justify their construction.
The second "legal" loophole used by Israel is that it
does not expropriate private property, only establishing settlements
on "state lands."
Since 1967, more than 60 percent of the West Bank has been defined
as "state lands," which in effect has meant selective,
de facto annexation of the territories. This "legal"
step was made possible because most of the land was not properly
listed in the books -- whether Ottoman, British or Jordanian.
But all those governments recognized the traditional ownership
of the territory's farmers.
Israel made an unprecedented land grab in the 1980s, when it surveyed
the entire territory, compared its findings to the tabu (land
registration documents), and declared everything unlisted as state
property - without allowing local inhabitants prove their ownership
and record their holdings. Thus, the legality and morality of
all the Jewish settlements and holdings in the territories is
highly doubtful.
Several phenomena have dulled Israel's political and more senses.
Until the end of 1987, Palestinian resistance to the occupation
was only a minor discord. Israeli society enjoyed the fruits of
the "permanent temporary" occupation without paying
any significant and immediate price for it. Under such circumstances
it was easy to combine nationalist-religious messianism, Likud-style
secular chauvinism, and the security-above-all ideology of Mapai
and Ahdut Avoda to conquer Israel's political culture.
Even today, most of the public simply does not know that every
violent step taken against the Palestinians -- let alone the aggregate
of those steps -- borders on war crimes, and cannot see the black
flag of illegality flying over each of those steps. A state that
regards itself as enlightened cannot behave like a terror-state,
even if it suffers from terrorism. Statesmen, generals and simple
citizens must see that black flag before it's too late and we
are all stained with the blackest of the black.
Ha'aretz, Tuesday, March 27, 2001
First Display on aaargh: 10 May 2001
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ARTICLE 19
<Tout individu a droit à la liberté d'opinion
et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être
inquiété pour ses opinions et celui de chercher,
de recevoir et de répandre, sans considération de
frontière, les informations et les idées par quelque
moyen d'expression que ce soit>
Déclaration internationale des droits de l'homme,
adoptée par l'Assemblée générale de
l'ONU à Paris, le 10 décembre 1948.