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La Suisse et les fonds juifs en déshérence


René-Louis Berclaz

 


 

 

"[...] les histoires des centaines de milliers de survivants constituent en elle-même une forme de négation de l'Holocauste."


Norman Finkelstein

L'Industrie de l'Holocauste, page 127 de la version française.


 

Introduction


La Suisse a pu bénéficier d'une réputation moralement exemplaire jusqu'à l'affaire dite des fonds juifs en déshérence. Cette réputation ne s'est pas faite en un jour : fruit d'une stabilité politique et sociale éprouvée par plus de 150 ans de régime démocratique, confortée par une politique de neutralité active reconnue par le reste du monde et par son engagement au service de la paix entre les nations, cette réputation méritée, due à la volonté du pays d'édifier une communauté nationale basée sur des principes identitaires mais respectueux des cultures étrangères , la Suisse n'a jamais eu de colonie fut brutalement remise en question au printemps 1996 lors d'une campagne médiatique sans précédent orchestrée de main de maître par un certain lobby. Ce lobby accusait la Suisse en général et ses banques en particulier d'avoir camouflé derrière le masque de la vertu des agissements coupables, voire criminels. Sous couvert de neutralité, la Suisse aurait profité de sa situation de non-belligérance pendant la Deuxième Guerre mondiale pour spolier par milliers des Juifs fuyant l'"Holocauste". En refoulant les réfugiés juifs, les autorités suisses savaient les vouer à une mort certaine. La Suisse s'est rendue ainsi coupable de complicité de crime contre l'humanité, avec comme mobile inavouable l'intention de s'approprier le patrimoine des victimes. Une fois la guerre terminée, la loi et le secret bancaire auraient permis d'occulter le crime et de blanchir les biens volés. De tels agissements seraient à l'origine de l'enviable prospérité économique de la Suisse et de ses citoyens, comme le suggère sans ambages le Sunday Times du 9 mars 1997 en guise de présentation du livre de Tom Bower, L'Or nazi, les Banques suisses et les Juifs (Plon, 1997, 380 pages), en montrant à ses lecteurs un éloquent photomontage du portail d'Auschwitz, avec la devise Arbeit macht frei (le travail rend libre), s'ouvrant, non pas sur de sinistres baraquements entourés de barbelés, mais sur un idyllique paysage suisse de carte postale. La légende de cette photo-choc ne laissait planer aucun doute: "Le prix du sang. Durant un demi-siècle, les pendules à coucou et les cloches des vaches suisses ont caché un terrible secret. Tom Bower commence le récit de cette conspiration visant à soutenir Hitler et à tirer profit de l'Holocauste."

Ce scénario incroyable, élaboré par un lobby essentiellement représenté par le Congrès juif mondial et relayé par des milieux influents de la côte est des Etats-Unis, avait pour objectif de détruire le crédit moral de la Suisse. Loin de se limiter à une simple campagne médiatique, ce lobby formula à l'encontre de la Suisse et de ses banques d'énormes exigences financières sous prétexte de dédommager les survivants de l'"Holocauste" victimes de spoliations. Par de fortes pressions, allant jusqu'à des menaces de boycott et de sanctions économiques et financières rigoureuses, les banques suisses furent contraintes de verser la somme de 1,25 milliard de dollars aux organisations juives censées représenter les "victimes nécessiteuses de l'Holocauste". De plus, le gouvernement suisse s'engagea à créer une fondation en faveur des victimes, alimentée par la vente d'une partie des imposantes réserves d'or de la Banque nationale suisse.

Il n'est pas évident de comprendre les tenants et les aboutissants d'une affaire volontairement embrouillée par des experts maîtres dans l'art de tirer les ficelles, ni d'en saisir les dessous sur la base des seuls discours tonitruants du "lobby qui n'existe pas". Ne parlons même pas des dérisoires tentatives de justification d'un gouvernement suisse frappé d'impuissance. La Suisse a pu faire l'objet d'une telle agression parce que le terrain avait été soigneusement miné au préalable, afin de paralyser d'avance toute velléité de riposte efficace. Ce minage est surtout le fait d'une loi nouvelle limitant drastiquement la liberté d'expression (article 261 bis du Code pénal suisse). Si la Suisse avait su se défendre efficacement, elle aurait pu démontrer qu'elle ne pouvait être complice d'un crime, tout simplement parce que ce crime n'a pas eu lieu. De même, la spoliation des victimes n'a pu être réellement prouvée, et cela aussi aurait pu être démontré. Rappelons que l'affaire des fonds juifs en déshérence a éclaté au printemps 1996 et que l'article 261 bis du Code pénal entra en vigueur en 1995. Cette loi sur mesure a pour effet d'interdire toute critique dirigée contre le lobby juif, sous prétexte de "discrimination raciale" envers celui qui se considère toujours comme le "Peuple élu". Un système qui fonctionne à sens unique, puisque le rédacteur en chef de U.S. News and World Report, Mortimer B. Zuckermann, n'hésitait pas à qualifier les Suisses de "cupides, profiteurs, blanchisseurs, receleurs, voleurs, pillards et menteurs" (édition du 22 juin 1998) sans provoquer d'autres réactions que l'habituel babil faussement moralisateur d'une intelligentsia veule et corrompue, toute dévouée aux intérêts d'un lobby à qui l'on pourrait retourner mot pour mot, et avec une pertinence légitime, les propos choisis de Mortimer B. Zuckermann.


1 Chronologie des événements

En octobre 1929, la bourse s'effondra brutalement à New York, engendrant une crise économique sans précédent qui terrassera d'abord l'Amérique avant de se propager en Europe. Conséquence d'une spéculation effrénée et d'un endettement considérable, les cours des valeurs boursières chutèrent de 75 % aux Etats-Unis. L'Allemagne de Weimar comptera jusqu'à 6 millions de chômeurs, suite à la baisse de près de 50 % de la production nationale.

En août 1931, conséquence de la faillite de la Danat Bank, la République de Weimar instaura un contrôle des changes des fonds quittant l'Allemagne. Cette décision concernait particulièrement une Suisse qui, à l'époque, comptait près de 200 000 résidents allemands, une proportion considérable par rapport à une population totale à peine supérieure à quatre millions d'habitants, selon le recensement fédéral de 1930.

Le 30 janvier 1933, après un nouveau succès électoral du parti national-socialiste, le président Hindenburg nommait Adolf Hitler chancelier du Reich.

Le 23 mars 1933, le Reichstag votait par 441 voix contre 84 l'acte dit de "Réhabilitation", loi destinée à soulager la détresse du Reich et à combattre la misère du peuple allemand. En fait, cette loi consacrait le retour à l'indépendance pour l'Allemagne et la fin du régime de servitude incarné par le régime de Weimar issu du Traité de Versailles.

Le 24 mars 1933, le journal anglais Daily Express, qui, à l'époque, tirait à 4 millions d'exemplaires, publia à la une: "Les Juifs déclarent la guerre à l'Allemagne. Les Juifs du monde entier s'unissent. Boycott des marchandises allemandes. Démonstration de masse." Cette déclaration sera relayée par la presse à plusieurs reprises, dont le 24 mai 1934 par le rédacteur en chef de American Hebrew, David A. Brown, qui déclara: "Nous préparons une guerre contre l'Allemagne" (We are going to bring a war on Germany).

Les déclarations belliqueuses de leurs coreligionnaires américains inquiétaient particulièrement les Juifs allemands: non seulement, en tant qu'Allemands, ils violaient la loi s'ils possédaient des avoirs non déclarés à l'étranger, mais en plus, en tant que Juifs, ils étaient considérés comme faisant partie d'une communauté hostile au Reich.

En juin 1933, une loi"contre les actes de trahison envers l'économie allemande"confirmait que tous les Allemands devaient déclarer leurs avoirs à l'étranger.

En juillet 1933, une loi sur la confiscation des biens appartenant aux ennemis du peuple et de l'Etat allait permettre au Reich de se saisir du patrimoine des citoyens allemands (y compris celui des Juifs allemands) considérés comme "traîtres à la patrie" dans le sens de la loi de juin 1933.

Dans ces conditions, le gouvernement suisse, avec l'accord des banques, introduisit une nouvelle législation afin de placer le secret bancaire sous la protection du Code pénal, afin de renforcer les dispositions existantes du Code civil. La loi du 8 novembre 1934 instituant le secret bancaire (article 47 du Code pénal suisse) rendit passible d'une peine de prison ou d'une forte amende celui qui violerait le secret bancaire. Par exemple, un directeur de banque pouvait être condamné à une peine de prison pour avoir simplement révélé l'existence d'un compte bancaire sans la permission du client. Seule exception: le secret bancaire pouvait être levé en cas d'infractions relevant du Code pénal, mais uniquement dans le cas d'une enquête ordonnée par la justice suisse. Ces dispositions créèrent un droit nouveau en faveur du client, qui obtenait ainsi une protection renforcée de son patrimoine. Autre nouveauté pour la clientèle, le compte à numéro. Au lieu d'un nom, c'est un nombre qui est attribué au client. La banque connaît évidemment le nom et l'adresse de son client, mais ces renseignements ne sont connus que de deux ou trois personnes, cadres ou directeurs, et ne sont pas divulgués aux autres employés. Cette mesure avait l'avantage de limiter au maximum les risques de corruption ou d'indiscrétion d'un employé. Seul le numéro apparaît sur les relevés de compte: de même, il est utilisé par le client pour la correspondance et pour valider des ordres ou des chèques.

Jean-Pierre Ghelfi, économiste, ancien vice-président du Parti socialiste suisse, commentait ainsi ces dispositions: "Lorsque les autorités fédérales en ont introduit le principe en 1934 [le principe du secret bancaire], c'était pour des raisons humanitaires, afin de protéger les Juifs allemands qui avaient déposé des fonds en Suisse." (Claude Torracinta, Les Banques suisses en question, éditions de l'Aire, 1981, page 38). Il est vrai qu'en 1934 les socialistes n'élevèrent aucune objection contre le secret bancaire. Notons que l'apôtre télévisuel de la tolérance, le journaliste Claude Torracinta, deviendra président de la Licra suisse.

De telles dispositions étaient en quelque sorte faites sur mesure pour rassurer la clientèle traditionnelle et attirer une clientèle nouvelle inquiète pour le futur dans une Allemagne moins complaisante aux intérêts juifs. On peut supposer que le secret bancaire et le compte à numéro, en service dès novembre 1934, furent effectivement utilisés par des Juifs allemands, parmi d'autres clients, tous désireux de mettre leur fortune à l'abri d'un pays où ils s'étaient rendus indésirables. Par contre, on sait que seul un petit nombre de Juifs allemands s'établirent en Suisse avant ou pendant la guerre, ce qui permet de supposer que les fonds déposés en Suisse ne furent le plus souvent que des capitaux en transit.

Ces mesures de sécurité présentaient, certes, un inconvénient: exemple actuel, si un client qui utilise une carte bancaire pour prélever de l'argent dans des distributeurs de billets oublie son numéro de code, il ne pourra pas obtenir la prestation demandée; par contre, s'il perd la carte ou si elle est volée, il ne sera pas possible de l'utiliser pour prélever de l'argent à ses dépens. Dans l'affaire des fonds juifs en déshérence, le principe est le même.

Si ce compte n'est identifiable que par un numéro, sécurité oblige, en cas d'oubli ou de pertes, il deviendra alors plus difficile aux ayants droit de prouver le bien-fondé de leurs prétentions. Si un client ne se manifeste plus, on ne pourra reprocher à la banque de conserver son dépôt, puisqu'un tel cas de figure est envisagé dans les conditions générales que chaque client est censé connaître en ouvrant un compte. En effet, lors de l'entretien qui précède l'ouverture d'un compte, il est systématiquement demandé au client la liste des ayants droit (héritiers ou bénéficiaires), et ce client est dûment informé du fait que, selon la loi, si un compte ne fait l'objet d'aucun mouvement de fond, et reste sans nouvelles de son détenteur ou de ses ayants-droit pendant vingt ans, l'argent reviendra légalement à la banque. Pour justifier cette mesure, sur le plan de l'éthique et de la morale, les banquiers invoquaient le fait que si certains clients, créanciers de la banque, ne donnaient plus signe de vie, d'autres, ceux-là débiteurs, faisaient de même. Entre les prêts irrécupérables et les dépôts en déshérence, le banquier assurait les risques du métier en faisant la part des choses, autrement dit un usage judicieux du compte de pertes et profits. N'importe quelle entreprise ayant le souci d'une saine gestion essayerait de faire de même, d'autant plus que de telles dispositions sont parfaitement conformes à la loi !

La banque de dépôt avait par conséquent l'obligation légale de respecter les conditions générales, connues, approuvées et signées par le client, avec les droits et devoirs inhérents à chacune des parties.

En 1946, les banques suisses dépensèrent plusieurs millions de dollars en vue de retrouver leurs clients juifs ou de rechercher et d'identifier leurs héritiers. Il ne fait pas de doute que certains de ces clients laissèrent dans les banques suisses des fonds non réclamés, ni d'ailleurs que des bénéficiaires de crédits bancaires disparurent de même dans la nature. Les banques suisses, appuyées par le gouvernement, affirmèrent que cet argent avait été rapatrié en Israël ou remis à des héritiers juifs. Des organisations juives internationales, de même que l'Etat d'Israël, ont contesté ces affirmations et n'ont pas craint de prétendre publiquement que les chiffres suisses étaient falsifiés et qu'au moins 30 millions de dollars non récupérés se trouvaient toujours en Suisse.

En 1954, le gouvernement israélien intenta un procès aux banques suisses. Il s'agissait d'une action menée en faveur des orphelins et des héritiers juifs de familles juives qui avaient, sans aucun doute, déposé de l'argent en Suisse avant de finir dans les "chambres à gaz homicides" du Troisième Reich. Ces poursuites furent soutenues par une campagne de diffamation extrêmement virulente dont les médias du monde entier se firent l'écho. Notons qu'à cette époque les autorités de Tel-Aviv s'en tinrent de manière très précise au chiffre de 30 millions de dollars, qui correspondait, affirmaient-elles, aux estimations suisses et représentait le solde des fonds non réclamés en dépôt dans les banques suisses. Le gouvernement israélien craignait que cet argent ne soit finalement attribué aux banques dépositaires, une fois échu le délai légal de vingt ans. Tous les pays, y compris Israël et les Etats-Unis, appliquent la loi de déshérence pour les dépôts en souffrance, car il arrive parfois que des clients déposent de l'argent en banque avant de décéder sans avoir désigné d'héritier ou sans avoir laissé d'instructions à la banque au sujet de la destination du dépôt après leur mort. En fonction des événements, guerres, révolutions, catastrophes, accidents, il arrive aussi que les héritiers disparaissent dans les mêmes circonstances que le déposant. Puisque la loi n'exige pas des banques de déclarer l'argent des dépôts privés, il n'existe aucune statistique permettant de connaître de façon précise le montant des fonds inscrits dans des comptes en sommeil. Dans ces conditions, on ne voit pas comment le gouvernement israélien pouvait arriver au chiffre précis de 30 millions de dollars. A titre de comparaison, dans le seul Etat du Texas, qui à la même époque n'avait pas de loi de déshérence, plus de 100 millions de dollars reposaient dans des comptes en sommeil. L'Association suisse des banquiers fit valoir, preuves à l'appui, que tous les moyens avaient été mis en oeuvre, entre 1945 et 1946, pour retrouver les héritiers et les ayants droit. Cette Association démontra que des millions de dollars avaient alors été transférés en Israël et repoussa les revendications du gouvernement israélien: de même, elle refusa de lui reconnaître le droit d'agir en faveur des Juifs tués ou disparus pendant la guerre. L'Association suisse des banquiers, toujours soutenue par le gouvernement helvétique, déclara que les prétentions israéliennes n'étaient pas plus fondées que celles que pourrait avoir, par exemple, le Vatican pour prétendre hériter de fonds en déshérence de catholiques romains. De droit, la position des banques suisses était inattaquable: c'est pourquoi le gouvernement israélien ainsi que les organisations juives ne pouvaient que jouer la carte de l'émotion pour dénoncer le formalisme juridique borné et insensible de banquiers suisses capables de s'enrichir au détriment des six millions de victimes juives assassinées dans les chambres à gaz. Mais toutes les solutions envisagées pour trouver une solution à cette affaire allaient à l'encontre de l'opinion publique suisse d'alors, des statuts des banques et de la législation helvétique: il était encore impensable, il y a quarante ans, d'accorder à une commission étrangère le pouvoir de venir enquêter dans les banques suisses.

La procédure s'enlisa jusqu'en 1962, quand le Conseil fédéral trancha en contraignant les banques à fournir des renseignements relatifs aux comptes dormants depuis 1945 susceptibles d'appartenir aux étrangers ou apatrides victimes de persécutions raciales, politiques ou religieuses. Toutefois, cette décision n'autorisait aucun organisme extérieur à vérifier ces comptes, ce qui aurait été contraire à la législation en vigueur.

En 1964, plus de quatre cents établissements bancaires suisses avaient retrouvé 1 048 comptes appartenant à des étrangers ou des apatrides, d'un montant global d'environ 9,4 millions de francs suisses. Israël, le Congrès juif mondial et les autres organisations juives protestèrent vivement: ils estimaient cette somme dérisoire par rapport aux fortunes considérables que les Juifs avaient, selon la rumeur, cachées à Zurich, Bâle ou Genève. Une telle rumeur était, certes, de nature à perpétuer l'image du Juif cousu d'or, mais, ceci impliquant cela, comment faire pour justifier autrement ces nouvelles revendications ?

En 1966, on recensait encore 824 comptes dormants non réclamés, dont on n'avait retrouvé ni les dépositaires ni les héritiers. Le Département fédéral de Justice et Police décida que l'on abandonnerait les recherches si le dépôt était inférieur à 500 francs suisses; en dessous d'un tel montant, les frais de recherche étaient considérés comme prohibitifs.

En 1969, 19 % de ces comptes avaient pu être soldés au profit des ayants droit retrouvés, pour un montant total de 1,6 million de francs suisses. Il restait alors un reliquat d'environ 4,8 millions de francs suisses. La recherche des ayants droit posait un problème dans le cas où les pistes aboutiraient derrière le Rideau de fer. Dans ce cas, il n'était pas question de prendre directement contact avec d'éventuels héritiers, au risque de leur attirer de graves ennuis de la part des autorités de ces pays communistes. Ces comptes furent alors transférés dans un fonds spécial, intitulé "avoirs non réclamés".

En 1970, le même Département décida de porter à 1 000 francs suisses la limite à partir de laquelle les recherches seraient abandonnées, toujours en fonction des frais de recherche prohibitifs. Les 325 dépôts concernés, d'une valeur approximative de 111 000 francs suisses, furent également transférés dans ce fonds spécial.

En 1972, les recherches prirent fin sur la base d'une décision officielle du Conseil fédéral. Le bilan de ces investigations était alors le suivant: les 9,4 millions initialement retrouvés furent portés à 10,8 millions suite à de nouvelles vérifications. La moitié de cette somme, 5,4 millions, fut versée dans le fonds spécial ouvert en faveur des ayants droit supposés des pays de l'Est. Sur la somme restante, les ayants droit retrouvés reçurent 1,4 million, et le solde, moins les frais, c'est-à-dire 2,4 millions de francs suisses fut réparti entre un fonds de charité suisse, la Fédération des communautés israélites de Suisse, ainsi que la Hongrie et la Pologne, en vertu d'accords de compensation passés dans les années 50 avec ces deux pays. Ces deux pays s'étaient alors engagés à verser cet argent aux survivants hongrois et polonais des "camps de la mort".

En 1989, la chute du Mur de Berlin entraîna celle des régimes communistes du bloc de l'Est. Dès lors, les ressortissants de ces pays n'avaient plus à craindre d'être spoliés par l'Etat dans le cas où ils deviendraient bénéficiaires du fonds spécial ouvert spécialement à leur intention en 1969. Dans ce nouveau contexte, les organisations juives allaient pouvoir aider les Juifs d'Europe centrale et orientale à faire valoir leurs droits. C'est pourquoi ces organisations créèrent en 1993 la World Jewish Restitution Organization, avec pour mission d' oeuvrer spécialement en faveur des Juifs des anciens pays communistes.

En septembre 1994, suite à un référendum populaire, une nouvelle loi destinée à réprimer le racisme fut approuvée par le peuple à une faible majorité. Notons que cette votation fut entachée de graves irrégularités, les médias refusant de publier les arguments des opposants, même dans le cas d'annonces payantes. La pratique des tribunaux depuis le premier janvier 1995, date de l'entrée en vigueur d'une loi contraire à l'esprit de l'article 19 de la Déclaration universelle des droits de l'homme, garantissant formellement les libertés d'opinion et d'expression, montre que celle-ci, très habilement formulée, sert en fait à interdire toute critique envers le tout-puissant lobby juif.

En mai 1995, dans un discours de circonstance prononcé à l'occasion du cinquantième anniversaire de la fin de la Deuxième Guerre mondiale, le conseiller fédéral Kaspar Villiger, président de la Confédération en exercice, présenta des excuses parce que la Suisse avait demandé avant-guerre aux autorités allemandes de faire apposer un tampon "J" sur le passeport des Juifs allemands.

En juin 1995, les médias américains se firent les porte-parole dociles du Congrès juif mondial en engageant une nouvelle et violente campagne de presse contre la Suisse sur le thème des fonds juifs en déshérence. Cette fois, l'escalade consistait à obtenir l'ouverture des sacro-saintes archives bancaires, afin de permettre aux ayants droit de récupérer les fonds qui leur reviendraient. L'application d'une telle mesure signifiait ni plus ni moins la fin du secret bancaire et ne manquerait pas de susciter l'inquiétude chez tous les titulaires de compte.

En septembre 1995, le multimilliardaire juif Edgar Bronfman, président du Congrès juif mondial et principal héritier d'une fortune édifiée au temps de la prohibition aux Etats-Unis grâce à la contrebande d'alcool, décida de prendre les choses en main: accompagné de trois spécialistes responsables de la campagne de diffamation orchestrée il y a quelques années contre le président autrichien Kurt Waldheim, Bronfman rencontra à Berne George Krayer, président de l'Association suisse des banquiers. Cette rencontre avait été préparée de longue date par Rolf Bloch, président de la Fédération des communautés israélites de Suisse. L'ingénu Krayer annonça triomphalement que le fonds spécial ouvert en 1969 en faveur des ayants droit des pays de l'Est se montait maintenant à 38 millions de francs suisses, ce qui représentait un rendement annuel d'environ 8 %. Pour Krayer et l'Association suisse des banquiers, un tel rendement était la preuve de leur bonne volonté. Krayer s'imaginait naïvement que Bronfman serait ravi et empocherait la cagnotte pour solde de tout compte, avec à la clé une excellente publicité en faveur des sérieuses et honnêtes banques suisses. En fait de remerciements, Bronfman répliqua qu'il n'était pas venu pour parler chiffres, mais méthode: il s'agissait pour le président du Congrès juif mondial de vérifier tous les comptes en déshérence, sans tenir compte des anciennes recherches. Autrement dit, la démarche de Bronfman ne visait rien de moins qu'à abolir le secret bancaire suisse. Finalement, l'Association suisse des banquiers autorisa une telle enquête, mais seulement sur les comptes dormants. Bronfman insista sur le fait que rien ne devait filtrer tant qu'un accord financier ne serait pas conclu par les parties concernées, à savoir entre lui, en tant que président du Congrès juif mondial, et les banques suisses. On peut supposer, pour des raisons faciles à comprendre, que Bronfman croyait possible de conclure l'affaire seul, afin d'en tirer un profit exclusif pour son prestige personnel et ses propres intérêts. A l'évidence, si l'affaire se traitait sur la place publique, cela ne manquerait pas d'attirer de nombreuses revendications, ce qui compliquerait le partage du butin. Au cours des semaines suivantes, le rabbin Israel Singer, secrétaire général du Congrès juif mondial, se rendit plusieurs fois à Berne pour discuter avec les responsables de l'Association suisse des banquiers. Dépité de voir que les banquiers ne se pliaient pas à toutes ses exigences, Singer prit conscience que le caractère secret des négociations, voulu au départ par Bronfman, permettait à l'Association suisse des banquiers de faire de la résistance. Pour tourner l'écueil, une nouvelle stratégie s'imposait. Bronfmann se rendit compte que pour l'emporter, il serait obligé de remettre l'affaire sur la place publique. Pour cela, il lui fallait trouver un allié de poids, qu'il trouva en la personne d'Alfonse d'Amato, sénateur de l'Etat de New York et président de la Commission bancaire du Sénat, un politicien élu grâce à l'influence de l'électorat juif.

En décembre 1995, Bronfman et le sénateur Alfonse d'Amato, représentant de la population juive la plus riche et la plus nombreuse du monde, conclurent un accord en vue de contraindre les banques suisses à satisfaire aux exigences des "victimes de l'Holocauste" dont ils prétendaient représenter les intérêts.

En février 1996, lors de sa conférence de presse annuelle, l'Association suisse des banquiers publia officiellement les résultats de l'enquête sur les fonds juifs en déshérence: 775 comptes étaient inactifs depuis 1945, pour un montant total de 38 millions de francs suisses. Ce chiffre était bien évidemment le même que Bronfman avait entendu en septembre 1995. Une telle obstination allait mettre le feu aux poudres.

En mars 1996, le sénateur d'Amato brandit triomphalement un rapport de 1945 des services secrets américains révélant qu'une entreprise de Genève, la Société générale de surveillance, avait reçu 8,4 millions de francs suisses de 182 clients juifs. Le rapport précisait que les intéressés n'avaient jamais pu récupérer leurs biens. Il fut très facile à l'Association suisse des banquiers d'expliquer que cette société n'était pas une banque, et que, par conséquent, elle n'était en rien responsable des agissements du Juif Jacques Salmanovitz, propriétaire de la société incriminée

Le 23 avril 1996, le sénateur d'Amato commença la série d'"auditions" devant le Sénat, autrement dit de procès publics où il jouerait le rôle du procureur, en vue de prouver que les banques suisses avaient bel et bien spolié des victimes de l'"Holocauste". Une Juive de Roumanie, Greta Beer, âgée de 75 ans, témoigna ce jour devant le Sénat: pendant la guerre, son père, un riche industriel du textile employant plus de mille personnes, confia à sa femme et à ses deux enfants qu'il avait déposé de l'argent dans une banque suisse. En 1962, Greta Beer, qui s'était établie près de New York, se rendit en Suisse faire des recherches qui restèrent infructueuses. Une enquête établira par la suite qu'un de ses oncles était passé avant elle et avait vidé le compte en toute légalité

Le 2 mai 1996, l'Association suisse des banquiers, le Congrès juif mondial et la World Jewish Restitution Organization décidèrent de créer un "Committee of Eminent Persons", mieux connu sous le nom de Commission Volcker, du nom de son président. Cet ancien président de la Banque centrale américaine fut mandaté pour conduire une enquête de grande envergure dans toutes les banques suisses afin d'identifier tous les comptes en déshérence ouverts avant, pendant ou immédiatement après la Deuxième Guerre mondiale. Pendant que des cohortes d'enquêteurs passaient une nouvelle fois au crible les comptes des banques suisses, après que le conseiller fédéral Kaspar Villiger eut autorisé la suspension provisoire du secret bancaire, d'autres enquêteurs fouillaient les Archives nationales américaines dans l'espoir de trouver des preuves d'une complicité criminelle entre le Troisième Reich et la Confédération helvétique. Les recherches conduites par la Commission Volcker avaient pour objectif de piéger les banques suisses en trouvant des exemples de spoliation plus crédibles que les cas Salmanovitz et Beer. Malgré tous ces efforts, l'espoir de trouver enfin le "compte en banque secret de Hitler en Suisse" se réduisait de jour en jour. C'est alors que Greville Janner, vice-président du Congrès juif mondial et député travailliste au Parlement britannique, se souvint qu'au catalogue des horreurs nazies peu égalaient l'extraction méthodique des dents en or, arrachées de la bouche des cadavres sortis des chambres à gaz homicides. Cet or, une fois transformé en lingots anonymes, devait sans doute se trouver caché dans les coffres de la Banque nationale suisse.

Le 10 septembre 1996, The Times de Londres titra "L'or nazi: des informations tirées des archives britanniques". Suivait un rapport de 23 pages selon lequel on estimait à 200 millions de dollars le montant de l'or dérobé retenu dans les banques helvétiques. Selon d'autres sources, ce montant était évalué à 500 millions de dollars. Comme la Suisse avait restitué la contre-valeur de 58 millions de dollars en or en vertu des Accords de Washington de 1946, il devait rester environ 450 millions de dollars dans les coffres de la Banque nationale. Avec l'inflation, l'or valait maintenant quelque 4 milliards de dollars. Une fois l'Atlantique traversée, l'histoire reprise par le Washington Post racontait que la Suisse "détenait encore 90 % de l'or pour une valeur de 6 milliards de dollars, y compris les couronnes en or des victimes de l'Holocauste qu'on avait fondues en lingots". Le porte-parole du Congrès juif mondial, Elan Steinberg, n'hésita pas à déclarer que c'était là le plus grand cambriolage de l'histoire de l'humanité. On parla moins du fait que 5 tonnes "d'or nazi" se trouvaient encore dans les coffres de la Banque d'Angleterre et 2 tonnes dans ceux de la Banque centrale américaine.

Le 16 septembre 1996, lors d'une conférence de presse, le conseiller fédéral Flavio Cotti crut nécessaire de déclarer que "la Suisse n'avait jamais eu l'intention de s'approprier l'or des nazis". Selon lui, les bénéfices réalisés sur les transactions d'or pendant la guerre ne dépassaient pas 20 millions de francs suisses. La faiblesse, voire la complaisance des autorités suisses incitèrent l'Association suisse des banquiers à réagir en mettant en garde le Conseil fédéral: "Cette question ne devrait pas être constamment jetée dans l'arène politique sur la base de quelques cas tragiques, suppositions et documents qui, dans certains cas, sont hautement suspects." Comment expliquer autrement que l'étude publiée en février 1996 faisait état de 38 millions de francs suisses trouvés sur les comptes dormants, alors que le porte-parole du Congrès juif mondial affirmait à qui voulait l'entendre que la Confédération dissimulait entre 7 et 20 milliards de dollars spoliés aux victimes de l'"Holocauste". C'est alors que Robert Studer, président de l'Union de Banques Suisses, excédé par les grossières exagérations du Congrès juif mondial, qualifia de peanuts les montants en question. Après de telles passes d'armes, les esprits étaient à point pour entamer le deuxième round des auditions devant le Sénat américain.

Le 16 octobre 1996, le sénateur d'Amato pouvait ouvrir cette deuxième audition en présence de six nouveaux témoins, tous survivants de l' "Holocauste" et victimes autoproclamées des banques suisses: deux plaintes collectives venaient d'être déposées devant la justice américaine pour soutenir une cause défendue par le sénateur d'Amato en ces termes: "Nous sommes très préoccupés du fait que des citoyens et des sociétés suisses aient tiré un profit flagrant de l'Holocauste, alors que les intérêts des survivants ont été totalement négligés Nous voulons savoir où sont passés les centaines de millions de dollars des avoirs que les nazis ont déposés dans les banques suisses Il est temps que justice soit rendue. Temps de connaître la vérité." Non seulement le sénateur bluffait à 100 %, mais, de plus, d'Amato impliquait directement le gouvernement suisse en soutenant que des avoirs de Juifs polonais et hongrois tombés en déshérence avaient fait l'objet d'un accord compensatoire avec la Pologne et la Hongrie pour indemniser des biens suisses nationalisés par les régimes communistes de ces deux pays. Le lendemain, devant les Chambres fédérales, le conseiller fédéral Flavio Cotti réfuta l'argument comme dénué de tout fondement: "Ce qui a été dit sur la Suisse, surtout dans la presse étrangère, est à la limite du tolérable." En fait, les biens suisses nationalisés n'avaient pas été indemnisés par le gouvernement suisse, mais par les gouvernements polonais et hongrois. Afin, une fois de plus, de montrer sa bonne volonté, le Conseil fédéral annonça la création d'une commission chargée d'enquêter sur les accords passés entre la Suisse et les pays de l'ancienne Europe de l'Est et prit enfin conscience de la nécessité de se défendre efficacement face à une agression non prévue par les éminents stratèges du Département militaire fédéral.

Le 24 octobre 1996, le conseiller fédéral Cotti, chef du Département fédéral des affaires étrangères, créa un groupe opérationnel interdépartemental ayant pour mission de coordonner les activités des divers services de l'administration fédérale. L'ambassadeur Thomas Borer fut désigné à la tête de cette Task force, du nom des forces navales américaines de la guerre du Pacifique: un américanisme ridicule pour faire croire sans doute à une opinion publique suisse sous le choc que la "Flotte de Haute mer" lémanique, en ordre de bataille, allait cingler sur l'heure vers la Côte Est pour en découdre avec l'U.S. Navy et ses alliés à papillotes L'avenir montrera que le fringant ambassadeur sut se couvrir de gloire en fréquentant assidûment les cocktails mondains de Washington et d'ailleurs au bras d'une accorte ex-miss Texas Il est vrai que s'il existe deux manières de "boire la tasse", notre amiral diplomatique n'a certes pas choisi la plus désagréable !

Le 13 décembre 1996, le Conseil fédéral adopta un arrêté fédéral "concernant les recherches historiques et juridiques sur le sort des avoirs ayant abouti en Suisse à la suite de l'avènement du régime national-socialiste". Pour permettre de telles recherches, cet arrêté prévoyait la levée du secret bancaire concernant ces avoirs pendant cinq ans. Cet arrêt constitua la base juridique des nouvelles investigations promises au "lobby qui n'existe pas" afin de faire toute la lumière sur la prétendue complicité de la Suisse avec le régime hitlérien.

Le 19 décembre 1996, le Conseil fédéral créa une commission indépendante d'experts, composée de neuf historiens et juristes, suisses et étrangers, présidée par l'historien suisse Jean-François Bergier. Sa mission était d'examiner, sous l'angle historique et juridique, le sort des biens placés en Suisse durant la période du régime national-socialiste, ainsi que les transactions sur l'or et les devises entre le Troisième Reich et la Suisse, les relations commerciales et la politique suisse des réfugiés. Derrière le fantoche Bergier oeuvrait activement une camarilla d'historiens juifs dirigés par Saul Friedländer, un autre miraculé des camps de la mort.

Le 31 décembre 1996, le conseiller fédéral Jean-Pascal Delamuraz, au dernier jour de son mandat de président de la Confédération helvétique, accordait un entretien à la Tribune de Genève dans lequel il exprimait sans détours son sentiment sur l'affaire des fonds juifs en déshérence, parlant d'une entreprise de déstabilisation de la Suisse et utilisant le terme de "chantage" pour qualifier les pressions et les menaces de boycott et celui de"rançon"pour les prétentions financières du Congrès juif mondial. Le conseiller fédéral avait été informé, entre autres sources autorisées, par l'ambassadeur de la Confédération en poste à Washington, Carlo Jagmetti, qui avait utilisé le terme de "guerre" pour décrire la situation dans un rapport ultra-confidentiel. Ce rapport avait été très rapidement connu des médias grâce à des fuites provenant du Département fédéral des affaires étrangères. Les sanctions suivirent sans tarder, mais ne furent pas dirigées contre ceux qu'on pensait: l'ambassadeur Jagmetti fut contraint de démissionner et le conseiller fédéral Delamuraz dut exprimer publiquement ses regrets à Bronfman, président du Congrès juif mondial, pour avoir blessé ses sentiments et ceux de nombreuses autres personnes Dans la foulée, Avraham Burg, président de l'Agence juive et membre de la commission Volcker, brandit une nouvelle fois la menace d'un boycottage mondial des banques suisses ainsi qu'un retrait général des fonds déposés. Pour ce dernier, le président de la Confédération avait ourdi "un complot destiné à saboter les négociations entre nous afin d'éviter à la Suisse d'avoir à endosser la responsabilité de ses actes pendant la guerre".

Le 8 janvier 1997, l'ambassadeur Borer informait Burg que le Conseil fédéral avait suggéré aux banques de créer un fonds en faveur des victimes du génocide, financé par les comptes en déshérence. "Ils essaient de nous acheter avec de l'argent qui n'est pas à eux !" s'indigna Burg, au grand dépit d'un Borer qui avait cru bien faire. Le lendemain, Borer apprit qu'un obscur employé de l'Union de Banques Suisses, Christoph Meili, avait sauvé de la destruction des archives datant de la Deuxième Guerre mondiale. Il se doutait que cette nouvelle allait apporter de l'eau au moulin de Burg et consorts, qui pourraient prétendre que cette banque cherchait à détruire des preuves de sa complicité avec les criminels nazis. Ce qu'ils ne manquèrent pas de faire, à grand renfort de déclarations indignées. Exilé volontaire aux Etats-Unis, entouré de ses nouveaux protecteurs et à bonne école, Meili exigera que son ancien employeur lui verse pour tort moral une indemnité de 2,56 milliards de dollars. Trois ans plus tard, Meili attendait toujours son pactole, et les archives miraculeusement sauvées étaient oubliées, ses protecteurs d'un jour n'ayant rien pu tirer de ces documents.

Le 5 février 1997, les espoirs de Borer furent comblés quand les trois grandes banques suisses -- Union de Banques Suisses, Société de Banque Suisse et Crédit suisse -- décidèrent de mettre ensemble la somme de 100 millions de francs suisses à disposition d'un fonds humanitaire en faveur des victimes du nazisme. Ce fonds spécial recevra par la suite d'autres contributions de l'industrie et de la Banque nationale suisse, portant le montant total à 265 millions de francs suisses. Bien entendu, le versement de ce montant ne correspondait nullement à une créance reconnue, mais ce "geste" devait être considéré comme une mesure d'apaisement prouvant la bonne volonté des Suisses, susceptible de mettre un terme aux incessantes campagnes de diffamation. Rolf Bloch, président de la Fédération suisse des Communautés israélites, fut sollicité pour la présidence du fonds, trois des sept membres de la direction du fonds étant par ailleurs désignés par la World Jewish Restitution Organization. Ces décisions avaient été prises pendant les rencontres discrètes et informelles du Forum économique de Davos, début février, quand Flavio Cotti se laissa convaincre par Edgar Bronfmann et Israel Singer que la politique choisie par la Suisse était suicidaire à long terme. Les pressions se feraient de plus en plus intenses et les menaces de plus en plus précises, allant jusqu'à remettre en question les autorisations qui permettaient aux banques suisses de travailler aux Etats-Unis. Les effets de la mondialisation ne permettaient pas à la Suisse de passer outre: la survie du pays était, paraît-il, en jeu.

Le 5 mars 1997, Arnold Koller, président de la Confédération helvétique, annonça la création d'une fondation de solidarité dotée d'un capital de 7 milliards de francs suisses et alimentée par la vente d'une partie des importantes réserves d'or de la Banque nationale suisse. La moitié des intérêts de ce capital seraient versés aux étrangers victimes de la pauvreté, de graves violations des Droits de l'homme ou de calamités naturelles. L'autre moitié servirait à des buts humanitaires en faveur de la population suisse. La première surprise passée, ce projet généreux mais vague suscitait déjà bien des controverses, alimentées par la question de savoir si les victimes de l' "Holocauste" pourraient bénéficier de cette nouvelle manne en plus du fonds créé spécialement à leur intention

Le 15 mai 1997, la commission bancaire du Sénat américain siégea afin d'entendre le sous-secrétaire d'Etat au Commerce Stuart Eizenstat présenter son rapport intitulé: "Les efforts américains et alliés pour retrouver et restituer l'or et les autres actifs volés ou cachés par l'Allemagne durant la Seconde Guerre mondiale". Selon ce rapport les transactions d'or entre la Suisse et le Troisième Reich posaient un sérieux problème du fait qu'une partie de l'or acheté par la Banque nationale suisse à la Reichsbank avait été pillée par le Reich aux banques centrales des pays occupés ou volé aux victimes de l'Holocauste. L'objectif de ce rapport était d'obliger le Conseil fédéral à renégocier les Accords de Washington de 1946, lesquels avaient réglé de manière définitive la question de l'or acheté par la Suisse à l'Allemagne nationale-socialiste. En 1940, après la défaite de la France, la Banque nationale suisse avait transféré toutes ses réserves d'or aux Etats-Unis. En juin 1941, six mois avant l'entrée en guerre des Etats-Unis, le gouvernement américain bloqua tous les avoirs suisses, y compris les réserves d'or. C'est dire qu'en 1946 le gouvernement américain tenait le couteau par le manche pour obliger la Suisse à signer un traité qui faisait la part belle aux intérêts américains. A l'époque, les négociateurs suisses n'eurent guère de choix pour obtenir la levée du séquestre des avoirs suisses et de l'or.

Le 18 juin 1997, la BBC diffusait un documentaire très virulent contre la Suisse. Ce film, intitulé Nazi Gold, tendait à présenter la Suisse comme un pays criminel, complice et allié du Troisième Reich. Le scénario était tellement invraisemblable que le résultat fut contraire à celui recherché: d'anciens réfugiés, y compris des Juifs, internés en Suisse pendant la guerre, prirent spontanément la parole pour témoigner en faveur du pays qui les avait accueillis; des historiens dénoncèrent les mensonges grossiers du scénario, comme par exemple celui des trains transportant des déportés juifs traversant la Suisse en route vers les inévitables "camps de la mort" du Troisième Reich.

Le 23 juillet 1997, l'Association suisse des banquiers publia dans les principaux journaux suisses une première liste de 1 756 comptes en déshérence appartenant à des étrangers, d'un montant total de 61,2 millions de francs suisses.

Le 19 octobre 1997, Robert Studer, président de l'Union de Banques Suisses, exprimait publiquement ses regrets concernant ses déclarations sur la valeur dérisoire (peanuts) des fonds en déshérence et pour l'affaire Meili.

Le 29 octobre 1997, une deuxième liste fut publiée par l'Association suisse des banquiers comportant au total 14 562 comptes en déshérence dont 10 875 comptes de clients suisses et 3 687 comptes de clients étrangers, pour un total de 18,8 millions de francs suisses, dont 6,17 millions pour les comptes étrangers. La publication de ces listes pouvait faire croire que les banquiers suisses n'avaient pas tout dit et que de telles investigations étaient nécessaires. En réalité, le champ des recherches avait été considérablement élargi, au point qu'on retrouva, par exemple, un compte en déshérence dont le titulaire n'était autre que Serrano Suner, ancien ministre des Affaires étrangères d'Espagne pendant la guerre, que son titulaire avait dû oublier, vu le faible montant dont il était crédité. Une analyse attentive de ces listes confirma l'absence de toute découverte significative concernant les fonds juifs en déshérence. Alors que les banquiers suisses s'en tenaient aux chiffres des livres de compte, qui ne pouvaient dire autre chose que ce qu'on y trouvait, les "spoliés" préféraient se situer dans les hautes sphères holocaustiques où les chiffres n'ont plus qu'une valeur symbolique. Il ne s'agissait plus de rembourser ce qui était légalement dû, mais de réparer les "crimes" prétendument commis, ce que les banquiers suisses terre-à-terre n'avaient visiblement toujours pas compris.

Le 2 décembre 1997 s'ouvrit à Londres une conférence internationale chargée de faire la lumière sur le sort de l'or volé par le Troisième Reich dans les pays occupés et aux victimes de l'Holocauste. L'objectif de cette conférence était de récupérer l'or volé en faveur des survivants de l'Holocauste "vivant dans la détresse". Edgar Bronfman en profita pour dénoncer une nouvelle fois la Suisse, coupable à ses yeux de recel d'or volé, ce qui impliquerait des dédommagements se situant cette fois entre deux et trois milliards de dollars. Arnold Koller, président de la Confédération, repoussa ces prétentions dénuées de tout fondement et les qualifia même de "provocations".

Le 8 décembre 1997, lors d'une conférence réunissant quelque deux cents représentants de collectivités publiques américaines, les "spoliés" firent comprendre sans ambiguïté aux autorités suisses que le moment était venu de capituler sans conditions. Les menaces de boycott contre les banques suisses furent confirmées et un dernier délai de réflexion, autrement dit un ultimatum, fixé au 31 mars 1998. Quelques jours plus tard, les représentants des trois grandes banques suisses rencontrèrent à Zürich le sous-secrétaire d'Etat américain Stuart Eizenstat afin de trouver une solution dans le cadre d'un accord global susceptible de mettre fin au conflit.

Début janvier 1998, le conseiller fédéral Flavio Cotti, chef du Département des affaires étrangères, osa se plaindre des attaques injustifiées provenant de la côte est des Etats-Unis. Cette timide remarque souleva l'indignation de Kalman Sultanik, vice-président du Congrès juif mondial. Selon lui, ces propos étaient de même nature que ceux du criminel de guerre Kurt Waldheim lorsque ce dernier s'était déclaré victime des groupes de pression de la côte est. Aussitôt, le responsable financier de la ville de New York, Alan Hevesi, et ses homologues de quatre Etats américains firent chorus aux critiques de Kalman Sultanik et exigèrent des excuses de Flavio Cotti, car ils considérèrent que ses propos pouvaient être interprétés comme une manifestation d'antisémitisme. Flavio Cotti refusera toutefois de satisfaire à ces nouvelles exigences.

Le 5 janvier 1998, la chaîne de télévision britannique Channel 4 diffusa un documentaire sur le sort de 6 000 réfugiés juifs venant d'Allemagne, prétendument traités comme des criminels par les autorités suisses de l'époque. Ces graves accusations seront reprises peu après par le Centre Simon Wiesenthal de Los Angeles, lequel affirmait notamment qu'entre 17 000 et 22 000 réfugiés juifs furent internés dans des camps de concentration en Suisse pendant la guerre et exploités comme des esclaves. De nombreux anciens réfugiés juifs furent scandalisés d'entendre de tels mensonges et le firent savoir. Là encore, le Conseil fédéral devait démontrer la fausseté de ces accusations en rappelant que les camps d'internement n'avaient rien à voir avec les camps de concentration et que les réfugiés n'étaient pas des prisonniers, ce dont personne n'avait douté jusqu'alors.

Au début du mois de février 1998, le sénateur d'Amato trouva une nouvelle occasion d'exercer ses talents: deux des plus grandes banques suisses, l'Union de Banques Suisses et la Société de Banque Suisse avaient annoncé leur intention de fusionner. d'Amato déclara que ces banques devaient d'abord répondre, toutes affaires cessantes, aux survivants de l'Holocauste, comme si rien n'avait été fait jusque-là. D'une parfaite mauvaise foi, d'Amato avait déjà "oublié" l'existence du fonds spécial créé par les banques et l'industrie suisses en faveur des survivants de l'Holocauste, doté de 265 millions de francs suisses.

En février 1998, deux compagnies suisses d'assurances, la Bâloise et la Winterthur, refusèrent d'ouvrir leurs archives aux enquêteurs américains à la recherche de polices d'assurances en déshérence susceptibles d'appartenir aux victimes de l'Holocauste. Ces deux compagnies estimèrent qu'elles n'avaient pas de comptes à rendre aux autorités de surveillances américaines. Cette attitude provoqua l'indignation d'Elan Steinberg, directeur exécutif du Congrès juif mondial, qui qualifia d'"obscène"l'argumentation juridique, et d'Israel Singer, secrétaire général de la même institution, qui considéra cette attitude comme "empreinte de mépris", relevant au passage que ce comportement lui rappelait celui des banques suisses dans l'affaire des fonds juifs en déshérence. La question des assurances contractées par des victimes de l'Holocauste avait fait surface en juin 1997 quand des survivants déposèrent une plainte collective contre seize compagnies d'assurances européennes, en leur réclamant 16 milliards de dollars pour les polices en déshérence dont elles auraient spolié leurs ayants droit.

Le 11 mars 1998, la tension monta encore d'un cran lorsque Edgar Bronfman, président du Congrès juif mondial, ne craignit plus de menacer publiquement la Suisse d'une guerre économique totale au cas où les banques suisses continueraient à refuser un règlement global de la question des avoirs juifs en déshérence. La Suisse se trouvait alors quasiment dans la même situation que l'Allemagne de 1933: il suffit de relire les collections de journaux de l'époque, en particulier l'article incendiaire du Daily Express du 24 mars 1933, pour retrouver les mêmes imprécations et les mêmes menaces, à la différence près que six millions de victimes juives de l'"Holocauste" exerçaient aujourd'hui une redoutable pression psychologique auprès d'une opinion publique incitée à prendre pour de l'antisémitisme la moindre tentative de critique visant le lobby juif.

Le 26 mars 1998, dans une déclaration commune, les gouvernements américain et suisse demandèrent aux parties impliquées de renoncer aux sanctions économiques annoncées, les trois grandes banques suisses s'étant finalement engagées à négocier un accord global qui réglerait l'ensemble des plaintes dont elles font l'objet.

Le 3 avril 1998, Flavio Cotti, alors président de la Confédération, exclut la possibilité d'une participation du gouvernement suisse à ces négociations, une décision également adoptée par Hans Meyer, président de la Banque nationale suisse.

Le 27 avril 1998, les négociations commencèrent, réunissant, d'un côté, les deux principales banques suisses, représentant l'ensemble des établissements bancaires du pays, la Banque nationale suisse ainsi que la grande industrie helvétique; de l'autre, le Congrès juif mondial ainsi que les auteurs des plaintes collectives déposées devant les tribunaux américains, avec le sous-secrétaire d'Etat Stuart Eizenstat dans le rôle de "médiateur".

Le 25 mai 1998, la Commission Bergier publia son premier rapport intermédiaire intitulé "La Suisse et les transactions sur l'or pendant la Seconde Guerre mondiale". Selon ce rapport, la Suisse savait dès 1941 que l'or en provenance de la Reichsbank venait en partie des réserves d'or des pays occupés par les armées du Troisième Reich. En outre, près de 120 kg d'or volé aux victimes de l'"Holocauste"figuraient de manière certaine dans les livraisons d'or faites à la Suisse par l'Allemagne. A la décharge des responsables de la Banque nationale suisse, ceux-ci ignoraient l'origine de cet or. Le Conseil fédéral considéra que rien dans ce rapport ne permettait de remettre en question les Accords de Washington de 1946, et qu'il était par conséquent exclu d'entrer en matière pour renégocier ces accords. Le second rapport Eizenstat, publié quelques jours plus tard, admettait la gravité des menaces planant sur la Suisse pendant la Deuxième Guerre mondiale et la nécessité vitale pour la Confédération de commercer avec les puissances de l'Axe.

Le 19 juin 1998, pour couper court aux pressions toujours plus insistantes des organisations juives, les deux grandes banques suisses annoncèrent publiquement que leur dernière offre de 600 millions de dollars était à la limite du supportable. Aussitôt, les avocats des plaignants et le Congrès juif mondial déclarèrent que cette offre était totalement inacceptable, alors que la World Jewish Restitution Organization la qualifiait même d'insultante. Du côté des organisations juives, on laissait entendre qu'un règlement global acceptable devrait être de l'ordre de 1,5 milliard de dollars.

Le 29 juin 1998, faisant encore monter la pression, les avocats Michael Hausfeld et Melvyn Weiss déposèrent au nom des victimes de l'"Holocauste" une plainte contre la Banque nationale suisse devant la Cour fédérale du district de Columbia. Peu après, la World Jewish Restitution Organization annonça envisager de déposer elle aussi une plainte collective contre la Banque nationale suisse. Le Conseil fédéral estima ces plaintes "injustifiées sur le fond, politiquement inacceptables et injustifiables juridiquement".

Le 1er juillet 1998, des représentants des villes et des Etats américains, réunis en conseil de guerre à New York, décidèrent de lever le moratoire sur le boycott des banques suisses. L'Etat de Californie déclara qu'il ne ferait plus appel aux banques suisses pour ses opérations financières, l'Etat de New York annonça une série de mesures progressives sanctionnant les banques et les entreprises suisses allant jusqu'au boycott total des produits suisses dès 1999. La Suisse réagit vivement à ces nouvelles, et le Conseil fédéral rappela que ces sanctions allaient à l'encontre de tous les traités conclus entre la Suisse et les Etats-Unis, et de plus étaient contraires aux règles de l'Organisation mondiale du commerce. Sous la pression de l'opinion publique suisse, quelques politiciens proposèrent de prendre des mesures de rétorsion en boycottant les produits américains. La réplique ne tarda pas, sous la forme d'une inculpation pour violation de la loi dite antiraciste. La polémique augmenta encore quand Alan Hevesi accusera le Conseil fédéral de n'avoir pas respecté son engagement de participer aux négociations. L'ambassadeur Thomas Borer, chef de la Task force, déclara alors qu'Alan Hevesi propageait de fausses nouvelles. La réplique ne tarda pas, Avraham Burg, président de l'Agence juive, demandant le renvoi de l'ambassadeur Borer. Autre source de conflit, la prochaine audition de la Commission bancaire du Sénat américain, présidée par Alfonse d'Amato, qui doit se réunir pour envisager une possible renégociation des Accords de Washington de 1946. Le Conseil fédéral refusant de se faire représenter à cette audition, le sénateur d'Amato pourra accuser le gouvernement suisse de "poursuivre sa politique d'obstruction". Arrivées au point de rupture, les banques suisses n'avaient plus que le choix de rompre les négociations ou de trouver un compromis, en faisant une ultime concession. L'opinion publique suisse ne comprendrait pas que le Conseil fédéral s'engage directement dans des négociations concernant en fait des intérêts privés. Mais la résistance du pays avait alors atteint ses limites, la Suisse n'étant pas de taille à affronter sur le champ de bataille économique la toute-puissante Amérique. Comprenant alors qu'il y aurait plus à perdre qu'à gagner en prolongeant un combat trop inégal, les responsables des banques suisses prirent conscience de la nécessité vitale d'un arrangement.

Le 12 août 1998, après un dernier et intense round de négociations, les parties aboutirent à un accord conclu sous l'autorité du juge fédéral Edward Korman. Cet accord prévoyait, dans le cadre d`un règlement global de l'affaire des fonds juifs en déshérence et de "l'or nazi", qu'un montant de 1,25 milliard de dollars, soit environ 1,8 milliard de francs suisses, serait versé par les banques aux survivants de l'Holocauste. Cet accord impliquait le retrait de toutes les plaintes collectives déposées contre les banques suisses, y compris celles déposées contre la Banque nationale suisse. Il impliquait également l'abandon de toutes les sanctions prévues ou effectives contre la Suisse, de même que toute action future contre des entreprises suisses ou le gouvernement helvétique. Une première tranche de 250 millions de dollars devra être versée dans les 90 jours, le solde sur trois ans. L'accord excluait toutefois les compagnies d'assurances, la question des polices en déshérence devant faire l'objet d'un autre règlement. L'annonce qu'un accord avait finalement pu être conclu mit apparemment fin à une crise ouverte deux ans auparavant.


2 Des conséquences insoupçonnées

Par la suite, les principaux protagonistes de ce conflit connurent un sort bien différent : en novembre 1998, Benyamin Nétanyahou, alors premier ministre d'Israël, remit personnellement de hautes distinctions honorifiques à Edgar Bonfman et Alfonse d'Amato, auteurs des accusations les plus virulentes portées contre la Suisse. On apprit aussi qu'Edgar Bronfman obtint de Bill Clinton un appui discret mais efficace, nécessaire dans son bras de fer avec des banques suisses. Pour preuve, le lundi 11 septembre 2000, lors de la cérémonie inaugurant le plan de distribution des indemnités versées par les banques suisses, Edgar Bronfman remercia publiquement Bill et Hillary Clinton pour leur soutien actif. Cette thèse est soutenue par l'Italo-Américain Angelo Codevilla, professeur à l'Université de Boston et spécialiste des relations internationales, dans un ouvrage paru récemment sous le titre Between The Alps and A Hard Place, publié en 2000 chez Regnery à Washington. Le professeur Codevilla précise encore qu'Edgar Bronfman a soutenu pour un montant de 1 261 700 dollars la campagne Clinton-Gore en 1995-1996. On alla même jusqu'à prétendre que Bill Clinton marchanda son appui au Congrès juif mondial en échange de l'abandon de la procédure engagée contre lui dans le cadre de l'affaire Monica Lewinski. Il est évident que l'argent obtenu grâce au chantage ne coûte pas cher et constitue pour le lobby juif une masse de manoeuvre utile pour faire ou défaire les hommes politiques, sans compter les possibilités offertes par le financement occulte des partis: qui oserait demander l'exacte destination des fonds destinés "aux victimes nécessiteuses de l'Holocauste" serait immédiatement accusé de commettre un sacrilège inouï. Quant aux responsables politiques suisses en charge de cette affaire, les conseillers fédéraux Delamuraz, Koller et Cotti, ils démissionnèrent peu après sans faire de vagues. De même, le personnel dirigeant des grandes banques suisses fut entièrement renouvelé, si bien que la langue anglaise est pratiquement devenue la langue de travail des cadres et de la direction.

Dans l'ensemble, la presse suisse a subi pendant la crise des fonds juifs en déshérence une évolution inquiétante: la défense des intérêts du pays s'effaça peu à peu pour être remplacée par un prêchi-prêcha exaltant le sentiment de culpabilité des citoyens suisses, car des prises de position trop engagées ne pouvaient que susciter un antisémitisme larvé. Selon les médias, les accusations portées contre la Suisse n'étaient pas toutes infondées. Un examen collectif de conscience était nécessaire face aux "nouvelles valeurs" émergentes, issues de la globalisation des marchés. Parmi ces "nouvelles valeurs", le devoir de mémoire, autrement dit le culte de l'"Holocauste", est systématiquement mis en avant, sans doute pour remplacer une mentalité patriotique jugée rétrograde. Ce constat s'est traduit par une évolution rapide des moeurs qui a coïncidé avec l'affaire des fonds juifs en déshérence, évolution qui s'est manifestée par la promotion de l'homosexualité, la distribution gratuite de drogues, la multiplication des divertissements d'ilotes et la dévalorisation des valeurs familiales. Contrairement aux maîtres, les esclaves n'ont ni famille, ni patrie, ni histoire, mais il faut bien laisser aux plus dociles quelques petites compensations.

La crise des fonds juifs en déshérence a touché la Suisse de plein fouet parce que ce petit pays incarnait aux yeux du monde entier l'indépendance et la démocratie, et avait montré qu'il était possible de vivre en paix et en harmonie avec le reste du monde sans faire partie d'organisations internationales. L'exemple ainsi donné par la crise des fonds juifs en déshérence avait de quoi faire réfléchir ceux qui doutaient encore de la puissance du "lobby qui n'existe pas". Les clients des banques suisses savaient dorénavant que le secret bancaire avait trouvé ses limites, et réfléchiraient à deux fois avant de placer leur confiance et leur argent auprès d'une institution affaiblie. La démonstration avait été faite de la puissance d'une organisation telle que le Congrès juif mondial. Initiée comme une affaire privée -- un différend entre des banques et leurs clients --, cette affaire a rapidement dépassé le cadre privé pour englober la sphère publique et devenir une affaire d'Etat. Les organisations juives ont pu faire la démonstration qu'elles étaient de taille à faire céder les règles fondamentales du droit, puisque les banques reconnurent une juridiction étrangère, alors que le for juridique des banques impliquées se trouvait en Suisse.

Certes, d'autres pays que la Suisse furent confrontés au problème des fonds en déshérence, y compris Israël. Dans les années trente, des Juifs d'Europe déposèrent des fonds dans des banques de Palestine, alors sous mandat britannique. Pendant la guerre, ces biens furent séquestrés par les autorités britanniques. Après la création de l'Etat d'Israël, ces biens furent restitués au nouvel Etat hébreu, mais les autorités israéliennes n'ont jamais publié la liste de ces comptes. Quant aux banques israéliennes, elles doivent en principe transférer au bout de dix ans leurs fonds en déshérence auprès du ministère de la Justice, mais cet usage n'est nullement contraignant. Dans un entretien publié par le Nouveau Quotidien du 15 octobre 1997, Chmonel Tzur, administrateur au ministère israélien de la Justice, faisait la déclaration suivante: "Les banques ont de très nombreux comptes en sommeil. A ce jour, seules quelques-unes nous ont confié les valeurs qui y avaient été déposées. Nous les avons relancées à de nombreuses reprises à ce sujet, mais elles ne se montrent pas très coopératives." Se référant au secret bancaire dont les banques israéliennes vantent les avantages, celles-ci refusent catégoriquement de publier leurs comptes en déshérence. Dans un autre entretien accordé au Financial Times du 2 décembre 1997, Chmonel Tzur déclarait sans ambages: "Les banques [israéliennes] ne sont pas disposées à faire un véritable effort pour rechercher les ayants droit. () Que l'on pense aux montants que les banques auraient à payer comme intérêts composés sur ces capitaux !" Ce n'est qu'en juin 1998 que le Parlement israélien fut saisi d'un projet de loi visant à obliger les établissements financiers à lever le secret bancaire sur les comptes en déshérence, au nombre d'environ dix mille, un grand nombre appartenant très certainement à des victimes de l'"Holocauste". Toutefois, nulle commission internationale n'a été constituée à cette occasion comme ce fut le cas en Suisse avec la Commission Volcker. Pourquoi le Congrès juif mondial, intransigeant à l'égard des banques suisses, reste-t-il sans réagir face à la spoliation de victimes de l'"Holocauste" par des banques israéliennes ?

L'affaire des fonds juifs en déshérence a donné le coup d'envoi à de nombreuses demandes d'indemnisation visant entre autres des entreprises allemandes et autrichiennes ayant eu recours à des"travailleurs forcés"pendant la guerre, une catégorie de victimes déjà prise en compte dans les accords d'indemnisation. Bien dressées, ces entreprises ne perdirent ni temps ni argent à essayer de négocier avant de payer ce qu'on exigeait d'elles. Un diplomate impliqué dans cette affaire comme l'a été Thomas Borer a fini par reconnaître: "Certaines organisations juives ne veulent plus d'informations historiques ou de débat philosophique. Elles veulent seulement de l'argent."(Le Temps du 20 mai 1998). Nahum Goldmann, ancien président du Congrès juif mondial, ne disait-il pas la même chose dans ses mémoires quand il affirmait: "La vie juive est composée de deux éléments: ramasser de l'argent et protester." (Nahum Goldmann, Le Paradoxe juif, Stock, 1976, page 67).


3 Epilogue provisoire

Le 26 juillet 2000, le juge Edward Korman, chargé de ratifier l'accord conclu le 12 août 1998 entre les grandes banques suisses et les organisations juives, a fait état, à la surprise générale, d'un amendement secret qui obligerait les banques cantonales et les banquiers privés à ouvrir leurs archives aux enquêteurs de la Commission Volcker. En cas de refus, ces banques seraient exclues des Accords d'août 1998 et pourraient faire l'objet de nouvelles plaintes collectives. Thomas Sutter, porte-parole de l'Association suisse des banquiers, a fait part de sa stupéfaction dans un entretien accordé au quotidien Le Temps du 29 juillet 2000: "La surprise vient du fait que cet accord, négocié il y a deux ans, n'exigeait pas que l'ensemble des banques y participe puisque les deux grands établissements du pays négociaient pour tout le monde. Nous n'étions pas davantage au courant d'un amendement. Sans parler des industriels qui doivent également annoncer dans les trente jours s'ils ont employé des travailleurs forcés dans leurs filiales en Allemagne." Un banquier privé, Jacques Rosset, confiera ainsi son sentiment: "Nous estimons avoir été trompés sur le fond, alors que nous avons travaillé en toute bonne foi. Et je dirai même que nous sommes passablement fâchés." (Le Temps du 29 juillet 2000). Si les grandes banques ont déjà accepté cet amendement, les autres établissements concernés doivent maintenant se prononcer. Un chantage ne finit jamais, car il faut savoir que par"survivant de l'Holocauste", il faut comprendre, selon le rabbin Israël Singer, tous les Juifs: "[l'argent des indemnités de l'Holocauste doit] assurer les besoins du peuple juif tout entier et non simplement des juifs qui ont eu la chance de survivre à l'Holocauste et de vivre vieux." (Haaretz du 31 mars 2000).

Après avoir terrassé les vilains gnomes de Zürich, l'insatiable Congrès juif mondial a trouvé maintenant une nouvelle proie à la mesure de ses appétits: selon un document américain rendu public, l'Autriche détiendrait des biens juifs en déshérence pour un montant de dix milliards de dollars (Jerusalem Post du 14 mars 2000). Déjà, les Etats de l'Est européen sont dans le collimateur et même la Russie, pourtant ruinée par huitante ans de communisme, se voit réclamer des indemnités pour les victimes juives de la révolution judéo-bolchevique de 1917 ! On croit rêver, au sujet d'un pays pillé une deuxième fois après la chute du Rideau de fer par une caste de prédateurs sans scrupules.

La Suisse aurait tort de se croire maintenant à l'abri de nouvelles attaques : pour y faire face, notre pays doit se forger des armes à la mesure de celles de l'adversaire. L'arme médiatique, nouvelle reine du champ de bataille, capable de subjuguer les esprits sans toucher à l'outil économique, est toutefois une arme à double tranchant d'un maniement délicat: preuve en est le résultat d'un récent sondage effectué par l'Institut zurichois Cultur Prospect auprès de la jeunesse (Tages Anzeiger du 30 décembre 2000), laquelle reste opposée à plus de 54 % à l'entrée de la Suisse dans l'Union européenne et à l'ONU. Notre jeunesse reste fidèle dans sa majorité à l'idée d'une Suisse indépendante et neutre, une évolution encourageante par rapport aux chiffres d'il y a dix ans. Reste à savoir si cette évolution n'est pas la conséquence de la manière dont la Suisse fut attaquée dans l'affaire des fonds juifs en déshérence, auquel cas nous assisterions à une prise de conscience salutaire pour l'avenir du pays.


4 Qui paie ne commande pas toujours

Le bilan final de l'affaire des fonds juifs en déshérence se pose de la manière suivante: qui paiera en fin de compte les indemnités, le manque à gagner des banques et les frais, le tout représentant une somme bien supérieure au 1,25 milliard d'indemnités. La réponse n'est pas difficile à trouver : la rançon sera finalement supportée par le dernier payeur, autrement dit les débiteurs des banques et les contribuables, en amortissement des intérêts dus à titre privé ou public. Qui paie ne commande pas toujours




Bibliographie sommaire

 

Tom Bower, L'Or nazi (les banques suisses et les Juifs), Editions Plon, Paris, 1997, 380 pages

Philippe Braillard, Tragédie et Mascarade (autopsie de la crise des fonds juifs et de l'or nazi), Editions Georg, Genève, 1999, 190 pages

Edouard Chambost, Guide de la Banque suisse et de ses secrets, Editions Balland, 1987, 317 pages

T.R. Fehrenbach, Les Banques suisses, Editions Stock, Paris, 1967, 315 pages

Norman Finkelstein, l'Industrie de l'Holocauste, La Vieille Taupe, Paris, 2000, 160 pages

Nahum Goldmann, Le Paradoxe juif, Editions Stock, Paris, 1976, 260 pages

Yves de Montfort, La Pratique bancaire helvétique, Settime, Londres, 1985, 476 pages

Collectif, La Suisse face à l'Empire américain (l'or, le Reich et l'argent des victimes), Editions Georg, Genève, 1997, 270 pages.

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Vérité & Justice, case postale 355, CH-1618 Châtel-Saint-Denis, Suisse, février 2001.







 

 


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