La question s'est posée récemment de savoir si M.
Faurisson peut-être poursuivi pour avoir publié,
sur un site anglais, un texte (supposé)contrevenir à
la loi Gayssot. Il semble en effet qu'un tribunal français
l'ait mis en examen de ce chef.
Nous allons tenter de donner une réponse rationnelle à
cette question.
1. Inventaire des textes applicables
Ces textes entrent dans les rubriques suivantes:
1. Textes définissant le délit appelé vulgairement
"révisionisme" (Loi Gayssot)
2. Textes définissant les moyens par lequel le délit
peut être commis
3. Texte définissant l'application de la loi pénale
dans l'espace
1.1 Définition du "révisionisme"
La définition de ce que l'on appelle vulgairement le révisionisme
se trouve énoncée dans l'article 24 bis de la loi
du 29 juillet 1881, modifiée par la loi n· 90-615
du 13 juillet 1990 dite "Loi Fabius Gayssot" qui stipule:
Seront punis des peines prévues par le sixième alinéa de l'article
24 ceux qui auraont contestés, par l'un des moyens énoncés à
l'article 23, l'existence d'un ou plusieurs crimes contre
l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du
tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8
août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une
organisation déclarée criminelle en application de l'article 9
dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels
crimes par une juridiction française ou internationale.
1.1.1 Observations sur la portée de ce texte:
Observations tirées de l'absence de naturalisation du texte
en
droit français: nous noterons pour commencer que la loi
se réfère
à une loi étrangère qu'elle ne cite pas.
La question se pose, du
point de vue de la forme, de savoir si elle est réellement
applicable vu que le texte que nous avons sous les yeux ne
reproduit pas, et n'a donc point "naturalisé"
en droit français,
la définition précise du délit.
Se pose donc, en premier lieu, la question du contenu de la loi
car la définition des "crimes contre l'humanité"
qu'il est interdit de constester n'est pas concrétement
définie. Il est à remarquer sur ce point qu'aucun
juriste spécialisé dans la défense des auteurs
taxés de négationnistes n'a relevé ce point
qui est absent d'un article spécialisé de Maître
Eric Delcroix que vous trouverez facilement sur le Net (Mots clefs:
Delcroix +
Gayssot). Ne fréquentant pas assidument les sites concernés,
nous ne pouvons pas vous en donner l'adresse de mémoire.
1.2 Les moyens de la commission du délit
Ces moyens sont définis à l'article 23 qui énumère
les moyens suivants:
1. Discours, cris ou menaces proférés dans des lieux
ou réunions publics
2. Ecrits, dessins, gravures, peintures, emblèmes, images
3. Tout autre support de l'écrit, de la parole ou de l'image
vendus ou distribués, mis en vente ou exposés dans
les lieux ou réunions publics
4. Placards, affiches exposés au regard du public
5. Soit par tout moyen de communication audiovisuelle
1.2.1 Observations
Nous intérèsse tout particulièrement le point
5 qui recouvre l'Internet et la radiophonie.
1.3 Les limitations à l'application de la loi pénale
dans l'espace
Les articles qui nous intéressent sont:
1. L'article 113-2 du Code Pénal qui stipule que l'infraction
est réputée commise sur le territoire de la République
dès lors qu'un de ses faits constitutifs a eu lieu sur
ce territoire.
2. L'article 113-5 qui stipule qu'est punissable quiconque s'est
rendu s'est rendu coupable sur le territoire de la République,
comme complice, d'un crime ou d'un délit commis à
l'étranger si le crime ou le délit est puni à
la fois par la loi française et par la loi étrangère
et s'il a été constaté par une décision
définitive de la juridiction étrangère.
3. L'article 113-6 qui stipule que la loi pénale française
est applicable aux délits commis par des Français
hors du territoire de la République si les faits sont punis
par la législation du pays où ils ont été
commis.
4. L'article 113-8 qui précise que dans les cas prévus
aux articles 113-6 et 113-7 la poursuite des délits ne
peut être exercée qu'à la requête du
ministère public. Elle doit être précédée
d'une plainte de la victime ou de ses ayants droit ou d'une dénonciation
officielle par l'autorité du pays où le fait a été
commis.
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2. Discussion
Le cadre juridique ayant été fixé nous pouvons
examiner le problème posé. M.Faurisson, ou tout
auteur suspecté de "révisionisme" peut-il
être poursuivi pour avoir publié des pages de Web
qui en France tomberaient sous le coup de la loi?
Déduction tirées de 1.2.5: l'auteur français
d'une page de Web qui
contiendrait des mentions tombant sous le coup de la définition
du délit visé en 1.1 pourrait être poursuivi
si le site est bien situé physiquement en France, à
savoir que la page doit être publié sur un domaine
français ou une machine située physiquement en France
même si le nom de domaine n'est pas un nom de domaine en
"fr".
Peut-on poursuivre l'éditeur français d'un site
qui exploiterait une machine située hors de France? Il
faudrait faire intervenir ici le fait de savoir si la société
qui gère cette machine est française ou non. Si
l'exploitant est une société française et
bien que la machine soit située à l'étranger,
il est fort probable qu'il n'échapperait pas à des
poursuites du fait que ses
intérêts sont en France. Dans ces conditions, la
machine, bien que située hors de France serait considéré
comme un élément patrimonial d'exploitation de la
société française à l'origine.
Observations relatives à l'article 113.2: On a soutenu
à maintes reprises que l'envoi d'un fichier contenant un
texte dont la publication en France serait punissable en tant
qu'élément constitutive de l'infraction. Ce raisonnement
est faux pour les raisons suivantes:
1. Il est indispensable de démontrer qu'une infraction
préexiste à son élément constitutif
or le fait, pour un site étranger de publier une page de
Web qui tomberait sous le coup de la loi française ne peut
constituer l'infraction recherchée, en effet:
1. Le responsable de ce site étranger ne peut être
poursuivi en
France comme complice du fait de l'article 113-5 car le délit
de
révisionisme n'existe pas en Angleterre (et aux USA).
2. L'article 113-6 ne permet de poursuivre des délits commis
par des Français hors du territoire de la République
(que) si les (mêmes)faits sont punis par la législation
du pays où ils ont été
commis.L'absence d'équivalence conduit à une réponse
négative.
L'article 113-6 doit être lu de la manière suivante:
la loi pénale française est applicable aux délits
(selon le point de vue de la loi française) commis par
des Français hors du territoire de la République
si les faits sont punis par la législation du pays où
ils ont été commis.
En fait nous allons voir que l'article 113-2 n'ajoute rien: il
n'est pas nécessaire en effet de rechercher si l'envoi
d'un fichier est un élément constitutifs du délit
car l'article 113-6 dit que l'action commise à l'étranger
qui, en France, constituerait un délit, ne peut pas être
poursuivi dans le cas où ce délit n'est pas puni
par la législation du pays où il a été
commis.
A titre subsidiaire, on peut ajouter que l'envoi d'un fichier
destiné à une communication sur un Web n'est pas,
intrinsèquement, un délit, car cet acte de transfert
électronique n'implique, en soi, aucune publicité.
L'article 113-6 disant de façon positive que la publication
de ce fichier à l'étranger n'est pas punissable
en l'absence de réciprocité, il n'y a pas d'infraction
originaire et s'il n'y a pas d'infraction originaire, il est vain
de prétendre pouvoir rechercher un "élément
constitutif" de quelque chose qui n'existe pas. L'article
113-2 n'est donc pas applicable et s'il l'était, il appartiendrait
au ministère public de prouver que c'est bien l'auteur
qui a envoyé le fichier, ce qui est impossible car il peut
fort bien avoir écrit le texte ailleurs qu'en France et
l'avoir confié à un tiers hors de France.
Toute affirmation dans ce domaine est impossible.
3. Examen de la thèse selon laquelle une communication
sur l'Internet peut violer la loi française depuis l'étranger
Bon nombre de juristes, prenant leurs désirs répressifs
pour des réalités,ont échafaudé la
thèse selon laquelle le fait de publier, en français
et sur un site étranger, un texte qui, publié en
France, tomberait sous le coup de la loi serait un viol de la
loi française.
Nous avons vu que l'article 113-5 n'envisage la poursuite du responsable
du site étranger fautif que dans le cas où il y
a réciprocité, à savoir qu'un même
délit se trouve défini dans les mêmes termes
par la loi étrangère du pays considéré
et par la loi française. Ce n'est pas le cas...
Bien que l'article 113-5 fasse obstacle à la possibilité
exposée, ils ont imaginé une thèse qui s'appuie
sur une définition de la communication publique que l'on
peut tenir pour fautive. Le fait que tel ou tel conseiller d'état
ait pu, hors de tout arrêt, prétendre que serait
"publique une communication dont le nombre et l'identité
des destinaires ne peut être déterminé"
ne change strictement rien à l'affaire.
Cette sorte de communication n'est publique que virtuellement
car à la différence d'un livre qui constitue en
soi une publicité dès lors qu'il existe, une communication
par le biais d'Internet n'existe qu'à partir du moment
où une personne requiert le fichier numérique considéré.
Or, la requête dont il s'agit, ne constitue nullement une
opération de publicité conçues selon les
termes l'article 23 car en règle générale
le réquérant agit pour son compte personnel et exclusif
et s'il diffusait le produit de
sa requête l'opération constituerait bien un délit
mais un délit distinct de la requête permettant l'obtention
du fichier numérique.
D'autre part, le cas du Web est encore différent de celui
de la radiophonie en ce sens qu'un amateur de radio n'a pas le
choix du programme, il lui est imposé ce qui n'est pas
le cas d'un internaute lorsqu'il actionne un moteur de recherche
en fonction d'un besoin précis.
D'autre part, s'il fallait punir l'internaute qui se procure un
texte "révisioniste" pour son usage personnel
exclusif et à seule fin d'exercer son discernement en présence
de l'objet, il faudrait également poursuivre les conservateurs
de bibliothèques qui laissent l'accès à des
collections d'ouvrages qui s'ils étaient réédités
tomberaient sous le coup de la loi.Or, de nombreux ouvrages historiques
susceptibles de tomber sous le coup de
la loi pour discrimination sont accessibles au grand public sans
formalité particulière dès l'instant qu'il
s'agit d'un public majeur.
Enfin il faut noter, que les juristes dont on parle ont inventé
dans la foulée une théorie du cumul des infractions
qui a pour effet, comme l'on noté certains observateurs,
d'aboutir à un cumul des différentes censures gouvernementales.
En d'autres termes, avant de publier quoique ce soit, chaque internaute
devrait s'enquérir de la somme des interdits en usage sur
la planète et s'y conformer. Comme l'on noté les
observateurs hostiles à cette théorie, il est bien
vrai qu'elle conduit à une véritable folie furieuse
car il suffirait que quelque pays musulmans décident d'appliquer
ce principe pour que l'on arrive à un véritable
blocage du système puisque toute photographie d'une femme
non voilée serait considérée comme un délit.Ainsi
les théories contestées sont le résultat
d'une évidence absurdité bien peu digne de juristes
qui seraient soucieux d'un minimum de crédibilité.
4. Conclusions
Nous tenons pour établi que jusqu'à preuve du contraire,
il n'existe aucune possibilité de poursuivre les auteurs
français qui publieraient des textes révisionistes
sur un site étranger où alors il conviendra d'en
faire la démonstration.
Ces poursuites ne pourraient résulter que d'une dérogation
explicite aux article 113-5 et 113-6. On notera que de telles
dérogations existent puisqu'il s'en trouve une qui a été
incorporée à l'article 227-26.L'existence même
de cette dérogation suffit du reste à prouver sa
nécessité pour entrer en condamnation.
Il nous reste à prier tout lecteur de bien vouloir opposer
à cette analyse une réfutation convenablement argumentée
s'il estime que nous nous sommes trompé ou que nous avons
omis tel ou tel article.
J.-.F Fournel
Docteur en droit
Pour nous écrire:
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++++++++++++++++++++++++++++++++
Récupéré le 10 décembre 1997 sur <http://www.geocities.com/CapitolHill/Lobby/9307/>
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