AAARGH
Lettre de Vincent Reynouard, professeur de mathématiques, suspendu, à Monsieur le Ministre de l'Éducation Nationale. (dès le 22 avril au matin, V. Raynouard était informé de sa révocation)
Honfleur, le 21 avril 1997
Monsieur le Ministre,
D'après les informations diffusées le lundi 14 avril au soir par FR3 Normandie-Caen, la commission de discipline devant laquelle j'avais comparu le matin même, aurait proposé à l'unanimité ma révocation du poste de professeur de Mathématiques que j'occupais au Lycée de la Côte Fleurie à Honfleur.
Mon sort, celui de mon épouse et de mes deux jeunes enfants sont donc maintenant entre vos mains.
N'ayant commis aucune faute professionnelle, aucune faute pédagogique, c'est un procès d'opinion qui nous ramène au temps de l'Inquisition qui a été instruit contre moi, par des commissaires politiques, non pas du fait de mes activités pédagogiques, mais du fait des travaux de recherche historiques que j'ai effectués en dehors de mes activités d'enseignant en mathématiques, en particulier sur le drame d'Oradour sur Glane, et du fait, plus généralement, de mes opinions.
Une telle sanction dans ces conditions remettrait en cause la laïcité de l'Etat, la liberté des enseignants, et la liberté de la recherche historique, et constituerait un pas supplémentaire vers l'institution du totalitarisme.
Au-delà des sanctions pénales et des mesures de répression et de censure, au-delà des livres interdits par simple décision administrative, au mépris des accords d'Helsinki, sous le simple prétexte xénophobe qu'ils seraient d'origine étrangère, il s'agit cette fois d'une nouvelle étape avec l'introduction de l'interdiction professionnelle pour les mal-pensants.
Sauf à recevoir dans les plus brefs délais des assurances formelles sous une forme adéquate que cette sanction n'est pas envisagée, je vous informe que devant cette menace de dégradation grave de la liberté en France, j'envisage de saisir l'opportunité offerte par M. le Président de la République, et de me porter candidat à Honfleur, aux élections législatives anticipées, pour y défendre la liberté de l'Esprit et de la recherche, et appeler la population à une nécessaire résistance, pour la défense du pluralisme et des libertés élémentaires, et pour dévoiler et dénoncer la censure dont le peuple français est victime.
En l'attente d'une communication de votre part qui me rassurerait partiellement sur l'état des libertés en France, je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le ministre, l'expression de ma déférence suspendue.
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