AAARGH

 

Paris, le 23 février 1998

 

Fugit irreparabile tempus

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QUAND RITTERSPORN ECRIT A FAURISSON ET AU JOURNAL LE MONDE

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Voici, extraite des archives du révisionnisme, une lettre de Gábor T. Rittersporn datée de Paris, le 18 juillet 1989. Elle ne comporte pas le nom du destinataire mais, faisant référence à "votre sommation du 14 juillet" à propos d'un projet de loi, elle ne peut être qu'une réponse à la lettre circulaire de R.r Faurisson qui demandait leur avis à de nombreuses personnalités sur les projets de "lex faurissonia", qui se concrétisèrent un an plus tard (loi dite Fabius-Gayssot du 13 juillet 1990).

En voici le texte:

 LETTRE CIRCULAIRE ADRESSEE PAR M. FAURISSON A SEPT CENTS CORRESPONDANTS

 

LE 14 JUILLET 1989

 

Monsieur, Madame,

MM. Laurent Fabius et Jacques Chirac se sont prononcés pour des mesures législatives permettant de poursuivre et de condamner les auteurs d'écrits révisionnistes (Le Monde, 26-27 mars 1989, p.18).

Une proposition de loi déposée par les députés socialistes en vue de "combattre les thèses révisionnistes" prévoit contre les auteurs de ces thèses une peine d'emprisonnement d'un mois à un an, une amende de 2.000 à 300.000 F ou l'une de ces deux peines seulement, et les frais afférents de publication judiciaire forcée (Journal Officiel, Assemblée Nationale,numéro 1247, 2 avril 1988).

Ainsi la France pourrait-elle légiférer contre la libre recherche historique à l'heure où, aux États-Unis, s'instaure un débat public autour de l'ouvrage d'Arno J. Mayer, historien juif de l'université de Princeton, qui écrit à propos d'Auschwitz:

    Les sources pour l'étude des chambres à gaz sont à la fois rares et douteuses (Why Did the Heavens not Darken? The "Final Solution" in History, New York, Pantheon Books, 1988, p. 362).
    [Cet ouvrage de CINQ CENTS pages, qui défend la thèse du "judéocide", a été lu en manuscrit par les trois historiens d'origine juive: Raul
    Hilberg (E.-U.), Hans Mommsen (R.F.A.) et Pierre Vidal-Naquet (France); ce dernier tient à y saluer "le plus important effort jamais fait par un historien pour penser l'impensable, de façon critique".]

Visé, comme bien d'autres, par cette tentative de répression, je me permets de vous poser les questions suivantes:

1) Approuvez-vous le principe de telles mesures?

2) Si vous réprouvez ces mesures (qui conduiraient, par exemple, à envoyer un professeur en prison parce qu'il ne croit pas aux "chambres à gaz"), comment entendez-vous manifester votre réprobation?

3) M'autorisez-vous à faire état de votre réponse dans l'étude que je me propose de publier sur le sujet?

 

Je vous remercie de l'attention que vous voudrez bien accorder au dossier ci-joint ainsi que de votre réponse à mes questions.

Veuillez recevoir,
P.J.:

  • Texte de la proposition de loi L. Fabius-G. Sarre (2 pages)
  • "Le révisionnisme français après le Rapport Leuchter" (3 pages)
  • "Pour qui ne croirait pas aux chambres à gaz: la prison!" (2 pages)


 Réponse de Rittersporn

 

Paris, le 18 juillet 1989

Cher Ami,

Je ne sais vraiment pas que faire de votre sommation du 14 juillet -- au fond la tentation est grande de ne rien répondre. Mais puisque vous insistez d'en avoir, voici ma réponse.

Je pense que la législation en vigueur contre l'incitation à la haine ethnique et raciale est suffisante pour réprimer ce genre dde délit. Je ne vois donc aucune nécessité d'y rajouter des clauses concernant les khmers, les coréens, les arméniens, les russes, les polonais et tous les autres, avec tous les malheurs qui pouvaient les visiter au fil de l'histoire.

Ceci étant dit, je ne vois pas non plus, en quoi cette loi ou la clause proposée entraveraient la liberté de la recherche. Il y a une certaine différence entre ce que vise cette clause et la recherche sur des problèmes bien définis. Si je la comprends correctement, elle est dirigée contre la négation du fait que quelque chose de bien tragique est arrivé à un groupe ethnico-religieux, chose dont la nature et les modalités ne sont pas précisées dans le texte incriminé, si bien que rien ne semble interdire qu'on enquête là-dessus.

Et si j'ai bien compris le sens de vos travaux, il y a onze ans, vous ne sembliez pas penser, à l'époque, que la législation discriminatoire des nazis ou que la déportation n'étaient pas à l'origine de souffrances bien réelles, quelle que soient les conditions concrètes de leur mise en oeuvre et quelle que soit l'imagerie qu'en entretiennent les média. Je ne vois donc pas en quoi cette proposition de loi (qui est loin d'être un projet de loi en bonne et due forme) vous empêcherait de reprendre vos recherches originales dont je n'ai pas vu grand-chose, depuis fort longtemps.

Une dernière chose. Je me sens vraiment comme le lard fumé à un festin de Bar Mitzvah dans vos textes où je sers pour quelque chose comme une caution juive. Je ne suis pas croyant, je n'appartiens en aucune façon à ce qu'on appelle la communauté juive -- comme je n'appartiens en général à aucune communauté. Si je me suis bien gardé de cautionner vos démarches de ces dernières années, c'est exactement parce que je n'avais aucune envie d'être évoqué de la sorte dans des tracts qui n'ont rien à voir avec les recherches que je pensais nécessaires de défendre et que vous ne semblez plus poursuivre. Pour éviter tout malentendu, je vous demande de ne pas faire référence à ma pauvre personne et à mes modestes faits d'armes.

Bien cordialement à vous

***

On ne peut pas dire que cette lettre brille par sa lucidité puisque la loi qui a fini par s'imposer empêche effectivement toute recherche sérieuse.

Autre lettre de G. T. Rittersporn, beaucoup plus récente puisqu'elle apparaît dans Le Monde du 21 février 1998, p. 4:

 CORRESPONDANCE

Une lettre de Gabor Rittersporn

A la suite de la publication de notre article "Une taupe "révisionniste" à Berlin" (Le Monde du 13 février), nous avons reçu de Gabor Tamas Rittersporn la mise au point suivante:

1. Je n'ai jamais nié et je ne nie aucunement l'existence des chambres à gaz et, plus généralement, l'entreprise industrielle d'extermination des juifs d'Europe menée par les nazis. Je condamne les thèses "négationnistes" et "révisionnistes".

2. Par un jugement en référé, le tribunal du Land de Berlin, que j'ai saisi, a interdit dorénavant que votre confrère allemand, auteur de cet article calomnieux, ou la Berliner Zeitung, ne répète ces allégations. Je porte plainte pour diffamation afin que la justice allemande se prononce sur le fond.

3. Si j'ai effectivement participé, en 1980, à une démarche judiciaire, ainsi qu'au comité de patronage d'un ouvrage qui sert, depuis, de fondement à la défense du "négationnisme", je croyais défendre l'expression de toute opinion, quelle qu'elle soit, même aussi absurde que celle de Robert Faurisson. J'ai vite compris l'erreur que j'ai faite alors et regrette que cette prise de position ait contribué à accréditer les idées "négationnistes".

Je n'ai donc, bien entendu, jamais tenu les propos que le journaliste berlinois me prête, et je m'en remets à la justice allemande. Tout cela fait, en outre, le jeu des "négationnistes" en propageant leurs thèses et en prétendant confirmer l'implication d'historiens dans leurs absurdités.


 

***


Tout cela appelle quelques commentaires car si Ritterpsorn peut s'estimer diffamé, que devraient dire les révisionnistes ???


Sur le premier point: GTR prononce le sésame, la formule magique qui, croit-il va lui ouvrir les portes de la liberté. Il faut faire bouillir la marmite, les femmes et les enfants coûtent cher, il faut bien gagner sa croûte. C'est entendu. Mais la formule "je n'ai jamais nié et je ne nie pas" fait un peu serment d'ivrogne. Il est probable qu'elle est et sera tout à fait insuffisante pour les gardiens du temple. Ce qu'ils veulent entendre, c'est: "J'ai nié et je me renie". Il faut une conversion, un changement de croyance et non pas l'affirmation d'une douteuse continuité.

Sur le second point, on apprend donc que GTR fait un procès en diffamation à la Berliner Zeitung qui devra donc, pour se justifier, exhiber ses sources: le dossier préparé par les épurateurs lyonnais qui ne se satisferont pas de mettre GTR à genoux: ils le voudront à plat ventre, et léchant leurs bottes. Faire confiance à la justice allemande, c'est, comme disait Montaigne en d'autres circonstances, "chier dans un panier et se le mettre sur la tête". Le fanatisme des juges allemands est sans limites.

Sur le troisième point, on voit que GTR regrette aujourd'hui de s'être mêlé de la défense de la liberté d'expression au moment même où la sienne a le plus grand besoin d'être défendue. Il comprend donc enfin ce que tout le monde sait: la liberté d'expression est bonne pour les gens au pouvoir et inutile ou néfaste pour leurs adversaires. Les propos que lui prêtent Maxim Leo, lui aussi juif allemand né à l'Est, pourraient avoir été tenus par lui dans une autre vie: la condamnation morale du régime nazi ne dépend pas de l'existence ou non des chambres à gaz... L'existence des chambres à gaz n'est pas prouvée... Qui pourrait dire si le dossier préparé par les persécuteurs ne comprend pas de tels propos tenus à date ancienne?

On aurait pu attendre d'une rétractation en bonne et due forme qu'elle comporte une explication, une raison, celle par exemple qu'il a donnée au Tagespiegel : "Il y a deux ou trois ans, un livre a apporté la preuve". Pourquoi cette raison ne figure-t-elle pas dans sa lettre au Monde? Parce qu'en France elle aurait déclenché l'hilarité ?

Les révisionnistes français ont donc bénéficié pendant dix-huit ans de la présence à leur côté d'un historien connu et apprécié. On croit même savoir que des membres éminents de cette savante corporation se sont portés à son secours. Certes, cette présence était purement passive, quasiment fantomatique. Gens éminemment concrets, les révisionnistes préfèrent des formes concrètes de soutien, des actions, des travaux, des études. Ils se passeront très facilement des présences ectoplasmiques.

Ils voient surtout dans cette affaire l'application du modèle de l'abjuration. On sent qu'un terrible désarroi gagne les partisans d'Israel qui n'arrivent plus à se maintenir, même dans le sang et les massacres. La division s'est installée parmi eux, et de manière sanglante aussi. L'abjuration ou l'élimination des juifs révisionnistes -- ou des personnes imaginairement représentées comme telles -- devient un besoin essentiel pour relancer un dynamisme unitaire. Après David Cole, Gabor Rittersporn, qui?

Dans tout cela, ce qui frappe le plus est l'absence totale d'argumentation. Comme le faisait remarquer le vieux professeur qu'était Yeshouha Leibowicz, la société israélienne a tendance à se fasciser. Elle produit des métastases dans les communautés de la diaspora. GTR n'a pas compris que plier était inviter ses persécuteurs à redoubler de fureur et il n'a pas fini d'en payer le prix.


23 février 1998.

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