AAARGH

| Accueil général | Table des matières | Suivant | Précédent |


 

LA DESTRUCTION DE RAUL HILBERG

(PAR LUI-MÊME)

********

II

Le contre-interrogatoire d'Hilberg, témoin de l'accusation, par l'avocat de la défense, Douglas Christie
3


[suite de l'analyse du "document Gerstein]

En fait, dit Christie, dans votre livre vous avez éliminé de telles affirmations ridicules de façon flagrante dans votre utilisation de sa confession.

"Bien, j'ai éliminé ce qui ne m'apparaissait pas comme plausible et vraisemblable, certainement."

Vous considérez qu'il était vraisemblable, demanda Christie, que huit cents personnes puissent être entassées sur vingt-cinq mètres carrés?

"Comme je l'ai indiqué, le nombre réel de gens qui peuvent être entassés dans un tel espace est de l'ordre de plusieurs centaines. Je ne dirais pas autant que huit cents." Hilberg admit que Gerstein avait fait cette affirmation deux fois: "Mais la question de savoir si deux ou trois cents personnes peuvent être entassées dans un tel local, ou sept cents, est intéressante pour quelqu'un qui étudie les chambres à gaz, le nombre de personnes qui sont gazées, et le calcul qui peut être fait alors. Il suffit, pour cet officier SS, qu'il y ait eu des chambres à gaz." (4-921)


Hilberg affirma que Léon Poliakov, qu'il considérait comme un chercheur "très compétent", avait utilisé le document Gerstein "plus que je ne l'ai fait".

Christie montra la page 294 du livre de Poliakov (Bréviaire de la haine) où Poliakov, en se référant au document Gerstein, avait changé le nombre de mètres carrés. Hilberg refusa de commenter: "Je ne sais pas s'il a vraiment changé ces données ou bien s'il y a une autre version de cette déclaration sous serment. Vraiment je ne pourrais pas répondre à cela." (4-922)

Christie demanda à Hilberg s'il considérait digne de foi l'affirmation contenue dans le document Gerstein qu'à Belzec et Treblinka personne ne s'était préoccupé de faire le décompte et qu'environ vingt-cinq millions de personnes, pas seulement des juifs, avaient été gazées.

"Et bien, certaines parties sont vraies, et d'autres parties sont des exagérations, manifestement des exagérations. Pour moi, le point important soulevé dans cette affirmation est qu'aucun décompte es gens qui entraient dans les chambres à gaz n'était fait," dit Hilberg.

Donc vous n'utilisez pas la partie qui est trop exagérée et vous n'utilisez que la partie que vous considérez comme digne de foi, soit celle qui affirme qu'il n'y avait pas de décompte. Vrai?, demanda Christie.

"Oui."

Je vois. C'est votre méthode de recherche.

"Dans certaines situations, avec des déclarations, quand de longues affirmations sont données et ne touchent pas à des éléments importants, on doit juger," dit Hilberg. "Il y a des choses que je n'utiliserais pas du tout, d'autres que j'utiliserais en partie." Hilberg déclara qu'il n'utiliserait jamais "évidement", la section qui parlait de vingt-cinq millions de personnes gazées puisqu'il sagissait de "rhétorique". (4-923)

Niez-vous que c'est exactement ce qu'il a dit dans sa confession?, demanda Christie.

"Vous savez, ça me semble incroyable," dit Hilberg. "Je ne nierais rien. Je ne m'en souviens même pas, à vrai dire."

Ce n'est pas un fait si énorme qu'il vous aurait frappé au point que vous puissiez vous en souvenir?, demanda Christie.

"Non, parce qu'on a parfois tendance à exagérer les chiffres et qu'on le fait visiblement sans aucun fondement. N'importe quel chercheur compétent peut voir cela sans y prêter vraiment attention."

Croyez-vous que quelqu'un qui dit "Je suis prêt à affirmer sous serment que tout ce que je dis est vrai" et qui dit ensuite cela est une personne digne de foi?, demanda Christie.

"En fait, Maître," dit Hilberg, "au risque d'offenser tous les juristes présents dans cette salle, je ne me préoccupe pas de savoir si une déclaration est faite sous serment. Certains peuvent faire des déclarations tout à fait vraies sans avoir besoin de prêter serment; d'autres peuvent faire des affirmations qui ne sont pas fondées sur les faits, même sous serment; certains ne se rendent pas compte qu'ils font de fausses déclarations. Il y a plusieurs possibilités ici Je pense que Gerstein était en état d'excitation Je ne qualifierai pas ce qu'il a dit de mensonge, parce qu'un mensonge est une fausseté délibérée. Je ne sais pas s'il considérait ce qu'il disait comme un mensonge. Le fait que vous le qualifiiez vous-même, de quelqu'un qui n'était pas très sain d'esprit, que pouvez vous dire de ses motivations?"(4-924)

Diriez-vous que quelqu'un qui a affirmé que vingt-cinq millions de personnes ont été tuées à Treblinka et Belzec était quelqu'un de raisonnable?, demanda Christie.

"Je ne le dirais pas totalement raisonnable, non, mais mon opinion n'a pas de valeur car je ne suis pas un expert en ce domaine" dit Hilberg.

Hilberg confirma que Gerstein avait affirmé dans sa confession qu'il y avait huit chambres à gaz et des montagnes de vêtements hautes de trente-cinq ou quarante mètres. S'agit-il là d'une affirmation raisonnable et digne de foi? demanda Christie.

"L'estimation de "trente-cinq ou quarante mètres" de haut est plutôt intéressante, car je me demande comment on peut estimer les hauteurs si on n'y a pas été entrainé. Et d'un autre côté, s'il dit huit chambres à gaz, doit-on se fier plus à son estimation? Bien que je croie moi-même qu'il y en avait six, je peux concevoir que quelqu'un ait cru en voir huit à cause du nombre de portes et des choses comme ça." (4-925)

Comment savez-vous le nombre de portes puisque vous n'êtes jamais allé là-bas?, demanda Christie.

"En fait, la question de savoir combien il y avait de chambres à gaz à Belzec à un moment donné dépend entièrement de ceux qui y sont allés. Il y a un certain nombre de gens qui ne sont pas simplement venus visiter ce camp, mais qui y demeuraient et qui ont témoigné par la suite sur ce nombre."

Vous n'utilisez pas ces gens dix fois comme référence, dit Christie.

"Non," dit Hilberg, "parce que ce livre a été écrit en 1961, et que les témoignages auxquels je me réfère datent d'après sa publication. C'est la raison pour laquelle il y a des éditions ultérieures."

Je suggère, dit Christie, que Gerstein a affirmé que deux cent soixante quinze milligrammes de Zyklon B étaient suffisants pour tuer huit millions de gens. A-t-il dit cela?

"Je ne m'en souviens pas. Honnêtement je ne m'en souviens pas," dit Hilberg.

Christie fit remarquer à Hilberg que Gerstein avait aussi affirmé que des millions de gens avaient disparus à Auschwitz et Mathausen dans des chambres à gaz ressemblant à des automobiles, et que la méthode pour tuer les enfants consistait à tenir un tampon et à leur faire inhaler du gaz par voie nasale. Est-ce vrai ou faux?, demanda Christie. (4-926)

"Et bien, il y a eu des gazages massifs à Auschwitz. Je ne dirais pas des millions de gens, mais certainement un million Je ne sais pas, pour les tampons. J'ai entendu à plusieurs reprises ces histoires racontées par des témoins. Je ne les ai pas cités dans mon livre parce que, sur de tels sujets, je suis extrêmement prudent."

Pas aussi prudent à propos de vos sources, dit Christie, puisque cette source affirme que cela a eu lieu et jure que c'est aussi vrai que le reste.

"Oui," dit Hilberg, "mais je n'ai cité que les passages des déclarations de Gerstein qui semblaient dignes de foi et je n'ai pas utilisé les autres."

Ne sortez-vous pas ainsi ces déclarations de leur contexte?, demanda Christie.

"Non, je ne pense pas. Puisqu'il y a de nombreuses affirmations sur des points séparés et dans des domains séparés, et tant qu'on n'altère pas l'intention et le sens de ce que quelqu'un a dit, alors je ne vois pas cela comme citer hors contexte. Si une déclaration comporte dix éléments, et que seulement deux ou trois sont dignes de foi, je vais les utiliser. Et je n'utiliserai pas les autres, c'est tout."(4-927)

Hilberg concédait qu'il avait mis de côté, parce qu'ils n'étaient pas plausibles, les passages de la confession Gerstein qui laissaient entrevoir un esprit très étrange porté à l'exagération.

Donc l'impression que vous avez laissé lorsque vous avez cité Gerstein comme source, dit Christie, est qu'il sagissait d'une source digne de foi.

"Non," dit Hilberg. "Cela veut simplement dire qu'il a fait des déclarations plausibles, et cela ne veut pas dire qu'il sagissait d'un homme digne de foi. Vous pourriez aller dans une institution pour malades mentaux et obtenir d'une personne des affirmations plausibles, mais aussi des absurdités Vous n'avez pas à rejeter tout ce que cette personne dit comme propos délirants, vous n'avez pas à rejetter tout à l'avance." (4-928)

Je suis d'accord, dit Christie, mais si je lis un livre qui relate des événements, et que l'auteur utilise le témoignage d'un fou mais ne cite que les aspects en apparence plus rationnels du malade et ignore le fait qu'il s'agit d'un fou et que beaucoup d'autres choses qu'il dit sont d'une impossibilité criante, croyez-vous que j'aie une description adéquate de la vérité en lisant ce livre? Hilberg déclara qu'il ne pouvait répondre à cette question "parce que je trouve qu'il sagit d'une question rhétorique."

Gerstein était de façon évidente une source indigne de foi, suggéra Christie.

"Il était indigne de foi pour beaucoup, néanmoins, on peut prendre des gens comme lui et découvrir qu'ils ont fait certaines déclarations d'une certaine valeur."

Hilberg confirma qu'avant sa mort Gerstein avait écrit une autre confession le 6 mai 1945 [PS-2170] mais que lui-même ne l'avait jamais utilisée.

Parce qu'elle suscite des doutes, dit Christie, des doutes encore plus sérieux sur la vraisemblance de Gerstein.

"Mais il est parfaitement possible que la condition d'un homme se détériore. Vous avez dit vous-même qu'il s'était suicidé." (4-929)

Donc vous suggérez que la deuxième confession était le produit d'une dégradation des facultés de Gerstein mais pas la première?, demanda Christie.

"Je ne l'ai jamais rencontré, et je ne me sens pas assez compétent pour poser un diagnostic," dit Hilberg. "Encore une fois, je ne suis pas médecin. Je ne peux qu'examiner les affirmations qu'il a faites. Dans beaucoup de cas, je n'ai rien vu qui me fût nécessaire, rien qui ne soit convaincant et indispensable, donc je n'ai pas utilisé ces déclarations."

Indispensable pour votre théorie, suggéra Christie.

"Non. Pour faire la lumière sur ce qui s'est passé," dit Hilberg.

Christie présenta à Hilberg le document PS-2170, produit devant le tribunal de Nuremberg lors de la séance du 26 octobre 1945 une confession faite par Gerstein le 6 mai 1945, soit dix jours après la première qu'Hilberg utilisait dans son ouvrage. Hilberg reconnut le document. (4-930)

Hilberg confirma que Gerstein était responsable administratif de la livraison de Zyklon B. Il distribuait le Zyklon B à Auschwitz, Birkenau et Lublin. Sobibor et Treblinka cependant, n'étaient pas partie intégrante du système des camps de concentration selon lui, dit Hilberg. (4-931) Christie lui signala que le document PS-1553 montrait que des quantités équivalentes de Zyklon B furent livrées à Auschwitz-Birkenau et Oranienburg le même jour. Hilberg confirma qu'il connaissait ce document. Puis-je vous suggérer, dit Christie, que si le Zyklon B était utilisé pour tuer des gens à Birkenau, alors il n'y avait aucune raison pour qu'on en livre à Oranienburg.

"Voyez-vous," dit Hilberg, "Oranienburg était le quartier général de l'administration économique et il est tout à fait possible que le gaz fût distribué à partir de là. Je n'ai aucun moyen de le savoir. Le gaz pourrait bien ne jamais avoir été utilisé à Oranienburg. Il se peut qu'il ait été entreposé là avant d'être redistribué à d'autres camps de concentration. Oranienburg était le centre d'approvisionnement des camps de concentration." (4-932)

Puis-je suggérer, dit Christie, que la véritable raison est que le Zyklon B était utilisé comme insecticide de la même façon aux deux endroits?

"Vous êtes libre de penser ce que vous voulez, mais ne m'imposez pas vos hypothèses."

Le juge Hugh Locke ordonna à Hilberg de répondre à la question.

"Je ne suis pas en d'accord. Votre explication n'est pas plausible du tout."

Hilberg admit que pour Oranienburg, son témoignage "était qu'il n'avait absolument aucune information concernant des gazages hommicides." (4-933)

Christie revint à la seconde confession de Gerstein (2170-PS) où celui-ci avait écrit sous serment:

De surcroît des tests furent menés avec de l'air comprimé. Des gens furent mis dans une bouilloire dans laquelle on injectait de l'air comprimé grace à un système mécanique.

C'est une affirmation ridicule, n'est-ce pas?, dit Christie.

"Je ne peux pas expliquer cette affirmation," dit Hilberg. "C'est une affirmation étrange, et même en prenant en considération qu'il y avait des gardes qui n'étaint pas équilibrés dans ces camps, je n'accorderais pas de crédit à une affirmation comme celle-là, je ne l'ai pas utilsée."

Christie cita un autre passage du document Gerstein qui disait:

Une méthode officielle pour tuer des gens en Pologne consistait à les obliger à monter les marches d'un escalier circulaire qui menait à une founaise. Lorsqu'ils atteignaient le sommet, on les abattait à l'aide d'un pistolet et ils disparaissaient au fond. On raconte que de nommbreuses personnes auraient péri dans un four de brique à cause du gaz qui y arrivait, et elles furent par la suite incinérées au même endroit. Cependant, mes sources ici ne sont pas à cent pour cent dignes de foi.

Christie suggéra qu'il sagissait là d'un autre récit délirant de Gerstein.

"Oui, mais il dit lui-même ne pas être sûr de ses sources," dit Hilberg. "J'ai déjà dit et je le répète, lorsqu'on utilise une déclaration de ce genre, ion doit être extrêmement prudent." (4-934)


Séance du 17 janvier 1985.


Hilberg confirma à la cour qu'il n'était pas statisticien: "Je ne suis pas statisticien au sens que l'on donne aujourd'hui à ce mot, et je me suis contenté de faire des calculs avec des additions et des multiplications et d'autres choses simples." (5-938)

Et les statistiques, suggéra Christie, lorsqu'il s'agit d'énumérations et de recensement, font partie d'un domaine technique aléatoire, n'est-ce pas?

"Cela dépend de ce qu'on veut faire avec de ces données. Je me considère comme suffisament qualifié pour faire les opérations que j'ai faites. D'un autre côté, si on veut s'engager dans des projections compliquées, alors je ne le ferais pas."

Christie affirma qu'en matière de statistiques, Hilberg n'était pas plus qualifié que Rassinier.

"Oh non, là c'est faux," dit Hilberg. "Ma capacité d'utiliser les statistiques dans le contexte qui nous intéresse et à comprendre les opérations à effectuer est tout de même, selon moi, largement supérieure à celle du monsieur que vous venez de mentionner."

Pour les qualifications universitaires, cependant, vous n'êtes pas plus qualifié que lui, dit Christie.

"Non, je suis plus qualifié que lui sur le plan universitaire pour la simple raison que les statistiques en question, celles qui se trouvent dans des documents parlant d'événements compliqués, de changements de frontières, etc. ne sont pas aisées à traiter et là, je suis plus compétent que lui."

Quelles qualifications universitaires avez-vous, demanda Christie, dans le domaine des statistiques, qui seraient supérieures à celles de M. Rassinier?

"Je ne me qualifiais pas moi-même de statisticien," dit Hilberg. "Je suis qualifié de statisticien dans la brochure. J'ai tenté de rectifier cette impression, en limitant ma compétence dans ce domaine en utilisant les chiffres seulement dans la mesure où on y fait référence dans les données historiques et où ils y sont intrinsèquement liés, quelquefois dans des situations très compliquées, et que dans cette mesure ma formation en sciences politiques me donne le droit de considérer les statistiques avec plus de compétence; et mon intérêt pour cette question depuis des années m'a donné une certaine capacité à voir ce que les statistiques veulent dire et ce qu'elles ne veulent pas dire." [sic]

La réponse est donc, dit Christie, que vous n'avez aucune qualification universitaire dans ce domaine mais que vous avez un diplôme de sciences politiques.

"Cela me donne la compétence de regarder des chiffres et de comprendre, oui."

N'est-il pas vrai que Rassinier fut prisonnier dans un camp de concentration allemand durant la guerre?, demanda Christie.

"Ceci semble être ce qu'il affirme," dit Hilberg. (5-940)

Le niez-vous?, demanda Christie.

"Je ne nie rien C'est simplement son affirmation. Je n'ai pas tenté d'étudier cette question. Je n'étais pas interessé."

Il prétend avoir une expérience directe des camps, dit Christie.

"Il a le droit de le prétendre. Il l'a affirmé. Je n'ai pas plus de commentaires là-dessus."

Dans ses livres, et vous en avez lu, dit Christie, il ne se montrait pas comme un sympathisant nazi mais comme un élu communiste à l'assemblée législative.

"Quel que soit son passé et quelles que soient les raisons qui ont mené à son incarcération," coupa Hilberg, "je ne peux que regarder les ouvrages qu'il a écrit par la suite, et c'est tout ce que je sais de lui Ce qu'il a pu être, c'est une autre question, je n'ai pas de commentaires."

Dites-moi si c'était mentionné dans le livre, dit Christie.

"Je me rappelle que c'était mentionné dans le livre," dit Hilberg. (4-941)

Vous savez donc qu'il était élu au parlement en France?, demanda Christie.

"Tout ce que je peux dire, je l'ai déjà dit. Je n'ai pas tenté de vérifier ses dires Je ne me rapelle pas tous les détails qu'il donnait. Je suis prêt à accepter ce que vous dites. Cela doit vous suffire."

Vous rappelez-vous pendant combien de temps il dit avoir été interné dans un camp nazi?

"Je ne me rappelle pas le nombre d'années. Je suis incapable de m'en souvenir."

Mais pour vous, dit Christie, il n'est pas digne de foi.

"Non, il ne l'est pas," dit Hilberg (4-942)

Christie reprit le document Gerstein, un homme auquel Hilberg attachait une certaine confiance, rappela Christie, et lut quelques affirmations supplémentaires:

"Des missions de prétendus médecins, qui n'étaient rien d'autre que de jeunes SS en blouse blanche, se promenaient à travers les villes et les villages de Pologne et de Tchécoslovaquie en limousine pour repérer les tuberculeux et les gens âgés qui étaient, peu après à la chambre à gaz."

Est-ce que cette affirmation vous semble digne de foi?, dit Christie.

"Eh bien, je ne l'ai pas utilisée," répliqua Hilberg, "bien sûr, et c'est un document complexe qui relate une série d'événements, dont certains ont réellement eu lieu ... Il y eut une tentative pour gazer les Polonais atteints de tuberculose, une tentative à grande échelle... L'opération fut montée par un Gauleiter du nom de Greiser. Il voulait gazer trente mille Polonais atteints de tuberculose parce qu'il craignait que cette maladie ne se répande chez les Allemands. En fait, ce projet fut rejeté mais il fut quand même proposé. Je vous dis que dans cette confession, il y a des éléments qui semblent véridique, un élément global comme ici, mais je ne ferais pas-" (4-943)

C'est une déclaration globale?, interrompit Christie.

"Oui, puisqu'il implique plusieurs régions, plusieurs événements sur une longue période."

Je vous suggère, dit Christie, que cette affirmation est fantaisiste, que des jeunes gens en blouse blanche ne se sont pas promenés en limousine à travers la Pologne, en Tchécoslovaquie ou n'importe où dans le Reich pour sélectionner des gens afin de les gazer. Prétendez-vous le contraire?

"Je n'ai jamais dit que c'était vrai," répondit Hilberg. "Je ne dirais pas que des hommes en blouse blanche se sont promenés en limousine à cette fin. Non, je ne pense pas que ce détail soit suffisament digne de foi pour être utilisé par un historien, je ne l'ai d'ailleurs pas utilisé."

C'est l'un des passages de la confession Gerstein que vous avez décidé d'ignorer?, demanda Christie.

"Oui, je l'ai ignoré," répondit Hilberg. (5-944)

Christie affirma à nouveau que le document Gerstein avait été cité hors contexte.

"Non," dit Hilberg, "j'ai marqué ma désapprobation hier lorsque vous avez dit cela et je le fais encore aujourd'hui. Ma position n'a pas changé. Je vous ai expliqué ce que voulait dire pour moi 'hors contexte'. Hors contexte veut dire l'utilisation de certaines phrases d'un auteur de façon à modifier le sens que celui-ci voulait donner à un énoncé. C'est ma définition de 'hors contexte'. Mais si une personne fait une série d'affirmations qui sont aisément séparables en dix, douze ou vingt, et que je considère que dix sont dignes de foi et dix ne le sont pas, ou que cinq sont dignes de foi et quinze ne le sont pas, si j'ai à choisir les bonnes, celles qui sont soit confirmées par d'autres sources, soit plausibles à la lumière d'événements que je connais, alors je ne cite pas hors contexte. Je cherche ici à dresser un récit complet des événements. Si ces données peuvent venir à l'appui ma thèse, c'est bien. Sinon, je modifierai ma thèse." (5-945) Hilberg redit qu'il avait décidé de laisser de côté les affirmations peu vraisemblables du document Gerstein. Christie demanda à celui-ci s'il permettrait que l'on qualifiât le document entier de douteux.

"Je permettrais n'importe quoi à quelqu'un d'honnête, quelqu'un de consciencieux qui cherche des réponses de façon méthodique. Je suis moi-même une personne de ce genre. Je me suis permis d'utiliser certaines sections du document parce que je disposais d'autre matériel qui me permettait d'agir ainsi. Je vous ai aussi dit que j'ai vu d'autres documents signés par Gerstein à l'époque, donc il ne s'agit pas du seul document Gerstein il y a des lettres, de la correpondance de Gerstein aussi. Lorsque je me permets d'utiliser Gerstein, je le fais en ayant aussi des lettres de 1944. Celles-ci sont aussi des documents. Ces lettres furent écrites au moment même des événements. Maintenant, si vous voulez brouiller les cartes, allez-y; moi je désire rester clair."

Christie dit à Hilberg qu'il semait la confusion en utilisant un document qui contenait beaucoup trop d'incohérences.

"Je ne vois pas comment on pourrait se sentir confus à moins de le vouloir," dit Hilberg. (5-947) Il continua: "la raison pour laquelle des gens écrivent des livres comme moi est qu'ils développent une certaine connaissance des documents. Il n'y a aucune raison qu'on me fasse une confiance aveugle. Vous pouvez vérifier n'importe quel document. Vous pouvez en tirer les conclusions que vous désirez."

Ma question, dit Christie, était de savoir si vous accepteriez les affirmations de quelqu'un qui étudierait le document PS-1553 --la confession Gerstein-- si cette personne affirmait que le document est absolument indigne de foi"

"Quelqu'un qui ne connaîtrait rien hormis ce document pourrait certainement le penser," dit Hilberg,

Quelqu'un qui ne vous ferait pas confiance pourrait aussi le penser? dit Christie.

"Alors si on ne me croit pas après avoir lu huit cents pages, alors je ne sais pas quoi dire, parce que cela signifie l'échec de toute une viece serait mon échec." (5-948)

Christie redit à Hilberg qu'il devait concéder que certaines personnes puissent voir les choses d'un oeil différent de lui et que ces gens devraient être libres de le faire; s'ils regardaient le document Gerstein et décidaient que c'était une absurdité, ils devraient avoir la liberté de le faire. Hilberg était-il d'accord?

"Je dois poser certaines réserves à ce que je vais dire; je suis désolé mais c'est nécessaire Je crois en la liberté de recherche Tant qu'il ne s'agit pas de mentir délibérément ou d'intention de frauder, je crois que cette liberté doit exister." Hilberg était "absolument" d'accord pour dire que les gens devraient être libres de publier leur opinion en ce qui concerne le document Gerstein. "Ce document est apparu dans de prestigieuses publications de langue allemande."

N'est-il pas vrai, demanda Christie, que le document Gerstein est une importante source dans votre livre parce que vous vous fondez sur lui pour établir le nombre de morts à Treblinka et Belzec?

"Non," dit Hilberg. "Dans mon livre, la première édition, je n'ai pas donné de chiffres précis pour Treblinka et Belzec parce qu'à cette époque je considérais qu'il était impossible de donner des estimations exactes. Je disposais alors de données combinées qui englobait Treblinka, Belzec et Sobibor qui provenaient d'un document allemand. Dans les années cinquante je n'étais pas capable de morceller cette estimation entre les trois camps. Je suis maintenant plus apte à le faire, mais je ne l'ai pas fait à l'époque et je ne me suis fondé ni sur le document Gerstein ni sur une autre personne." (5-949)

Christie lut un passage du document Gerstein et demanda à Hilberg s'il s'était fondé sur lui:

"Belzec, sur la route Lublin-Lemberg, dans le secteur de la ligne de démarcation russe. Maximum, quinze mille personnes par jour (Vu!). Sobibor, je ne sais pas exactement où c'est situé. Je ne l'ai pas vu. Vingt mille personnes par jour. Treblinka, 120 km au NNE de Varsovie. vingt-cinq mille personnes par jour. Vu"

"Ce sur quoi je me suis fondé dans ce document," dit Hilberg, "c'est le fait qu'il y est allé, qu'il a vu les deux faits qu'il relate. Je n'ai pas utilisé son estimation des capacités maximum pour ces camps."

Donc cette partie elle aussi était incroyable, n'est-ce pas?, demanda Chritie.

"Je n'ai pas dit ça. Un moment, s'il vous plaît. Vous me prêtez sans cesse des affirmations Le fait est que je n'avais aucun moyen, à ce moment-là, de donner une estimation quotidienne des gazages dans chacun de ces camps. Je ne connaissais que les chiffres globaux pour le 31 décembre 1942." (5-950)

N'est-il pas vrai, continua Christie, que le jugement du Tribunal international de Nuremberg, dans le cas Pohl, et en particulier celui [rendu] par le juge Michael Musmanno, citait abondamment le document Gerstein, PS-1553, en ignorant d'autres passages comme vous l'avez fait?

"En fait, le juge Musmanno avait de bonnes raisons de le faire, c'était un juge compétent."

Un autre cas de lecture sélective avec de bons motifs, n'est-ce-pas? demanda Christie.

"Maintenant vous accusez un juge des mêmes choses que moi je ne répondrai pas à cela." Hilberg confirma que son estimation du nombre de gazés à Auschwitz était d'environ un million: "C'était mon estimation alors. J'ai refait mon calcul, il est identique aujourd'hui." (5-951)

Hilberg confirma que dans l'énoncé des conclusions du jugement de Michael A. Musmanno, pour le cas Pohl, (NMT Série verte, vol V, p.1131), Musmanno citait la déclaration sous serment de Rudolf Hoess, l'ancien commandant d'Auschwitz:

Rudolf Hoess déclara sous serment qu'il avait personnellement supervisé les exécutions jusqu'au premier décembre 1943, et qu'à cette date, deux millions cinq cent mille personnes avaient été "exécutées et exterminées dans les chambres à gaz et les fours crématoires"

Christie fit remarquer que ce chiffre de deux millions cinq cent mille était de deux fois et demie plus élevé que ce qu'Hilberg estimait. (5-951 à 954)

"C'est deux fois plus que l'estimation que j'ai donnée dans mon livre en 1961," dit Hilberg. Il croyait que son chiffre était le bon.

Diriez-vous alors, demanda Christie, que le jugement du Tribunal de Nuremberg était faux sur ce point?

"Il sagit selon moi d'une erreur," dit Hilberg. "La cour a cité Hoess dans ce cas."

Il semble alorst, dit Christie, qu'Hoess est un élément important dans cette croyance aux six millions.

"Non," dit Hilberg. "Il fut commandant du camp d'Auschwitz du début jusqu'au mois de novembre, 1943. Il fut de nouveau présent à Auschwitz durant l'été 1944. Il dut s'absenter du camp en d'autres occasions à cause de certaines obligations. Il détient cependant, des informations importantes à propos d'Auschwitz."

Par qui fut-il capturé monsieur?, demanda Christie.

"Il fut --j'essaie de me rappeler s'il sagissait de l'armée britannique d'occupation. Je pense que c'était dans le nord de l'Allemagne, où se trouvait l'armée britanique."

Il a écrit un livre dans lequel il disait avoir été torturé et battu par les Britanniques, vrai? demanda Christie.

"Je ne suis pas au courant de cela," dit Hilberg. "J'aimerais bien voir cela." (5-955)

Christie montra le livre Le commandant d'Auschwitz parle et cita la page 174 de la version anglaise:

Lors de mon premier interrogatoire, on me força à faire des aveux en me battant. Je ne savais pas ce qui se trouvait dans le procès-verbal, bien que je l'aie signé. [note: un document dactylographié de huit pages, que Hoess signa à 2h30 du matin, le 14 mars 1946. Celui-ci ne différait pas substantiellement de ce qu'il dit ou écrivit par la suite à Nuremberg et Cracovie.]

"Je ne connais pas cette édition," dit Hilberg. "J'ai l'édition allemande Il se peut que je n'aie pas de souvenir exact de ce passage dans l'édition allemande. Je ne discute pas ce qui est dit ici. C'est ce qu'il dit. Il dit qu'il s'est fait battre et qu'il a signé un procès-verbal."(5-956)

Christie continua de lire le livre:

L'alcool et la cravache, c'était trop pour moi. Cette cravache était la mienne, et s'était trouvée, par hasard, dans les bagages de ma femme. Elle n'avait pratiquement jamais frappé mon cheval, encore moins un prisonnier. Néanmoins, l'un de mes interrogateurs était convaincu que je l'avais constamment utilisée pour frapper des prisonniers.

Au bout de quelques jours, je fut amené à Minden-sur-la-Weser, au principal centre d'interrogatoire dans la zone britannique. Là, je fus encore maltraité par le procureur général britannique, un major."

"Il semble d'après ce que vous avez lu qu'il prétendait avoir été battu avec sa propre cravache," dit Hilberg.

Vrai, dit Christie. Et il ne comprenait pas ce qu'il signait mais l'a quand même signé.

"C'est ce qu'il semble dire," dit Hilberg.

Christie aborda le sujet de Franz Ziereis. Hilberg admettait avoir cité Ziereis auparavant. Etait-il lui aussi prisonnier?, demanda Christie.

"Je ne connais pas tous les détails de l'histoire, dans la mesure où celle-ci est compliquée," dit Hilberg. (5-957)

Christie mentionna que Ziereis était le commandant du camp de Mauthausen en Autriche, qu'il avait été torturé et blessé de trois balles au cours de son interrogatoire, ou un peu avant, qu'il savait qu'il allait mourir bientôt, que son interrogatoire dura entre six et huit heures dans la nuit du 22 au 23 mai, et qu'il mourut ce matin-là.

Hilberg confirma que Ziereis était le commandant de Mathausen, mais rien d'autre.

"Non, je ne pourrais pas dire cela. J'ai lu deux ou trois versions différentes de ses blessures et de sa mort consécutive Il est incontestable qu'il est mort un peu après la guerre à la suite de blessures qu'il avait reçues. Selon une version il a tenté de s'échapper. Selon une autre, des prisonniers en colère l'ont blessé. Vous n'avez fait que lire une autre version. Malheureusement je ne peux pas choisir entre ces versions. Je ne peux que confirmer qu'il fut blessé, qu'il a fait une confession, et qu'il est mort ensuite." (4-958) Christie produisit la déclaration sous serment de Hans Marsalek, qui était la traduction aglaise du document 3870-PS (Conspiration nazie et agressions, vol. VI, p.790) Marsalek écrivit sous serment:

Franz Ziereis fut interrogé par moi en présence du commandant de la 11 e division blindée américaine, Seibel; l'ancien prisonnier et médecin, le docteur Koszeinski; et en présence d'un autre citoyen polonais, nom inconnu, le tout pendant 6 ou 8 heures. L'interrogatoire eut lieu durant la nuit du 22 au 23 mai 1945. Franz Ziereis était sérieusement blessé, il avait trois balles dans le corps, et il savait qu'il allait mourir bientôt. Il me dit ceci:

Hilberg admit que ce document contenait les souvenirs de Marsalek, un document qui fut utilisé par le procureur à Nuremberg. Hilberg indiqua que la déclaration de Marsalek affirmait que des soldats américains avaient tiré sur Ziereis alors qu'il tentait de s'évader et qu'il fut interrogé en présence d'un officier de la 11e division blindée. Hilberg témoigna qu'il ne contesterait pas que le document se trouvait bien devant la cour. (5-961, 962) 962)

"Je pourrais ajouter," dit Hilberg, "que le fait qu'un tel document porte un numéro tel que 3870-PS ne veut pas dire que ce document fut produit comme pièce à conviction. Ce n'est pas une preuve que ce document fut produit comme pièce à conviction. Cela veut simplement dire que ce document fut répertorié par l'accusation, et qu'on lui donna un numéro. Il peut par la suite avoir été utilisé; mais toutes les pièces de l'accusation ne furent pas utilisés" (5-962)

Christie demanda à Hilberg s'il pensait, en tant que personne normal, qu'il y avait quelque chose d'anormal dans le fait de produire comme pièce à convition, non pas une confession de Ziereis portant sa signature, mais un déclaration émanant d'une autre personne qui affirmait rapporter ce que Ziereis aurait dit avant de mourir.

"Voici ce que j'en pense," répondit Hilberg. "Lorsqu'un homme a été le commandant d'un camp de concentration et qu'il a été blessé, la question de savoir s'il doit ou ne doit pas être soumis à un interrogatoire est essentiellement une question médicale. Que des médecins aient été consultés ou non, je n'ai aucun moyen de le savoir. Lorsque j'examine le document --et je l'ai effectivement examiné-- je pourrais l'utiliser ou ne pas le faire, et ma décision dépendrait des critères que j'ai déjà mentionnés: les informations contenues dans le document sont-elles dignes de foi, plausibles, corroborées ou confirmées." (5-963)

Christie dit à Hilberg que Marsalek affirmait dans sa déclaration que Ziereis avait dit qu'entre un million et un million et demi de personnes avaient été tuées au château d'Harteim. Etait-ce vrai?

"Des gens ont été gazés à Hartheim," dit Hilberg, "certainement pas le nombre que vous avez cité, non tout ce que je peux dire, c'est que je n'ai pas utilisé cette donnée particulière. Je pense que dans la première édition je n'ai même pas mentionné Hartheim, qui était un endroit où l'on gazait des incurables le fait qu'Hartheim était un lieu d'euthanasie pour des malades neurologiques et des malades mentaux et aussi pour des prisonniers du camp insoumis ou physiquement à bout de forces a été confirmé maintes et maintes fois." Hilberg indiqua cependant, qu'il ne s'agissait pas de son domaine principal de recherche. Il accordait que le chiffre mentionné dans la déclaration sous serment de Marsalek était "manifestement démesuré", et "totalement faux pour tout ce qui concernait Hartheim" (5-964,965).

Christie suggéra à Hilberg que ce type de document n'était pas rare et que la torture était fréquente; que des gens comme Franz Ziereis, Rudolf Hoess, Hoettl, Konrad Morgen, Joseph Kramer et Eric von Manstein furent torturés. "Tous les noms que vous avez nommés me sont familliers. Les allégations de torture, pour la plupart des gens que vous avez nommé, ne me disent rien," dit Hilberg.

Vous n'avez pas cherché à savoir jusqu'à quel point leurs aveux furent donnés librement, vrai?, demanda Christie.

"Non, non. Je suis, bien sûr, très intéressé par la question de la validité d'une déclaration sous serment. J'ai déjà dit que dans ma méthode de travail je me fondais avant tout sur des documents, et que lorsque ceux-ci ne donnaient pas suffisamment d'éléments, alors je prenais des témoignages. J'examine toutes ces affirmations attentivement, qu'elles aient été données librement ou sous la contrainte dans des cas extrêmes." (5-966) Hilberg confirma qu'il se définissait avant tout comme un empiriste.

Seriez-vous d'accord, dit Christie, pour dire que l'empirisme est une méthode où l'on utilise des expériences concrètes pour trouver des choses?

"Je ne vais pas étendre la définition d'empirisme pour inclure l'expérience comme une conséquence nécessaire. Il y a toutes sortes de manipulations, quelques-unes qui consistent en simulations, d'autres en expériences, et d'autres qui ne sont ni l'une ni l'autre ma méthode consiste à examiner des documents, des faits qui y sont relatés, de partir de petits détails pour arriver à dresser un tableau plus large des événements, et c'est ce que j'appelle l'apprche empiriste. Il y a peut-être d'autres approches possibles, mais c'est là la mienne. 'Expérience' pour moi, veut dire des choses qui peuvent être manipulées dans un laboratoire. Cela, je ne le fais pas." (5-967)

Puis-je vous suggérer, dit Christie, qu'expérimentation peut vouloir dire aller sur les lieux d'un événement et y mener des tests scientifiques?

"On peut effectuer des tests scientifiques. Je ne l'exclus pas."

L'avez-vous fait?, demanda Christie.

"Non. J'ai répété souvent je crois que je n'étais pas chimiste, ni géologue. Je ne suis pas expert en interprétation de photos. Je ne fais pas ces choses-là."

Je vous demande, dit Christie, si vous avez déjà mené une expérience scientifque sur les éléments qui nous intéressent.

"Non, non."

Connaissez-vous un seul rapport scientifique qui démontre que des chambres à gaz furent utilisées à un endroit ou l'autre? Si oui, nommez le, dit Christie.

"Que voulez-vous dire par rapport scientifique?, dit Hilberg.

Je n'ai pas l'habitude de définir des mots aussi simples, dit Christie, mais par rapport scientifique j'entend un rapport de quelqu'un de qualifié qui examine les preuves physiques. Nommez-moi un rapport de ce type qui montre l'existence de chambres à gaz n'importe où dans les territoires occupés par les nazis. (5-968)

"Je ne comprends toujours pas le sens de votre question," dit Hilberg. "Voulez-vous dire un rapport allemand, ou un rapport d'après guerre -"

Je ne me soucie pas de l'origine, allemand, pendant ou après la guerre, allié, soviétique, n'importe quelle source. Nommez-en une, dit Christie.

"Pour prouver quoi?," demanda Hilberg. Pour conclure qu'ils ont vu une chambre à gaz, des éléments qui prouvent que tel ou tel local a été utilisé à cet effet. Un rapport scientifique, répéta Christie.

"Je suis vraiment dérouté. Je suis rarement aussi dérouté, mais Je ne peux que dire qu'il y a eu des photographies aériennes qui ont été analysées. Peut-être que ce n'est pas là votre définition du mot science. Il y a des documents qui démontrent la toxicité extrême du gaz qui fut employé. Peut-être que ces choses ne sont pas importantes à vos yeux, il y a des documents-" (5-969)

Excusez-moi, coupa Christie, mais je veux comprendre clairement. Le second point que vous avez mentionné, à vos yeux, qu'est-ce qu'il prouve?

"L'aspect toxique, mortel du gaz. La nature du poison employé et comment celui-ci agit signé par des scientifiques de l'industrie chimique allemande." Hilberg était d'accord pour dire que les canettes de Zyklon B portaient une étiquette décrivant ce gaz comme un poison: "C'est exact. Aucun de ces exemples ne va vous satisfaire parce que vous voudriez que cet élément soit plus intimement relié aux chambres à gaz..Je pourrais dire aussi qu'une évidence scientifique se trouve dans les filtres pour masques à gaz, ce qui indique quelle précaution on doit prendre si on est en contact avec ce gaz. Tout cela est lié aux chambres à gaz."

Est-ce là votre réponse?, demanda Christie.

"Pour le moment, ce sont des exemples qui me viennent à l'esprit. Si vous en voulez plus, je peux toujours puiser à même d'autres exemples, mais je suis toujours dérouté par le sens de votre question." (5-970)

Au moment d'écrire votre livre, La Destruction des Juifs d'Europe, si vous aviez eu un rapport scientifique démontrant l'existence de chambres à gaz, l'auriez-vous utilisé?, demanda Christie.

"Si vous parlez d'un rapport qui prouve scientifiquement l'existence de chambres à gaz d'un point de vue matériel, de façon directe, il n'y en a pas. Maintenant si vous parlez d'un rapport scientifique décrivant ce qui arrivait aux gens dans une chambre à gaz au moment où ils inhalaient le gaz, c'est autre chose"

Je ne vous ai pas demandé cela, dit Christie.

"C'est pour cela que je vous ai dit que je n'étais pas sûr du sens de votre question. Quel scientifique ferait un rapport sur quelques centaines de gens entassés dans une chambre à gaz, ce qui leur est arrivé physiologiquement, lorsque vous avez des sources allemandes la description exacte de ce que ce gaz va faire s'il est inhalé par des êtres humains?" (5-979)

Je vous suggère, dit Christie, qu'il est possible scientifiquement de détermner si de l'acide cianhydrique est entré en contact avec de la brique, du motier, un mur. Connaissez-vous une seule expertise scientifique qui aurait été menée en 1945 pour démontrer la présence de tels résidus dans un de ces endroits?

"Nous disposons de nombreux documents allemands qui décrivent des structures et l'utilisation de gaz pour des buts divers. Le gaz auquel vous référez fut livré au camp, nous avons des documents, et quelques-unes de ces structures furent hermétiquement scellées pour plus de sécurité, d'autres moins, en fonction de leur utilisation. Evidement pour moi, il faut considérer l'existence de fumigations... Des batiments, des bateaux... Pas nécessairement juste pour les poux, les cafards aussi."

Les insectes étaient desinfectés avec du Zyklon B, vrai?, demanda Christie.

"Comment ça les insectes étaient désinfectés? ils étaient tués," dit Hilberg. "Pardonnez-moi de vous donner une réponse plutôt longue encore une fois, mais ce 'B' renvoie à la puissance du gaz. Il y avait aussi du Zyklon C et B tout au début, et en fonction des buts visés, de la toxicité requise, on utilisait le gaz approprié (5-980). Je veux que vous me disiez, répéta Christie, si vous connaisez un seul rapport scientifique concernant l'analyse des résidus de Zyklon B?

"Non, je ne connais aucun rapport de ce type à moins qu'il ne se trouve quelque part dans les archives de la Commission d'investigation soviétique de Lublin, Madjanek, parce que vous devez vous rappeler qu'à coté des chambres à gaz de Lublin, connu sous le nom de Majdanek, et celles d'Auschwitz qui existent encore, il ne pourrait pas y avoir aucune -"

Le juge Locke interrompit: "Docteur, connaissez-vous un rapport du genre?"

"Non," répliqua Hilberg.

N'est-il pas vrai, monsieur, demanda Christie, que le professeur René Fabre, un toxicologue, fut chargé, en 1945, d'examiner les corps de gens que l'on présumait gazés à Struthof-Natzweiler, un endroit distant de 5 kilomètres de Strasbourg en Alsace et fit des prélèvements dans le camion et dans les chambres à gaz présumées, où Kramer était censé avoir gazé des gens, et que le résultat du rapport fut qu'il n'y avait aucune preuve que des gazages y auraient été commis?

"Je ne connais pas bien du tout ce rapport," dit Hilberg. (5-981)

Y avait-il, à votre connaissance, un seul rapport d'autopsie démontrant que la mort d'une personne fut consécutive à l'ingestion ou l'inhalation d'acide cyanhydrique ou Zyklon B?, demanda Christie.

"Sauf si vous parlez du rapport du professeur August Hirt, qui fit gazer des juifs à Natweiler dans le but d'étudier leurs crânes pour une étude anatomique, oui, ça pourrait être ça Je pense que j'ai rencontré cela dans un document, mais il ne donne pas la description détaillée de ce qui s'est déroulé lors du gazage, puisque ce n'était son but Il les a fait gazer pour utiliser leurs crânes dans le cadre de recherches anatomiques Vous trouverez cela dans les documents de Nuremberg. Je regrette de ne pas pouvoir vous donner les chiffres."

Vous ditez donc, dit Christie, que des rapports existent et qu'ils prouvent que des gens furent tués à l'aide d'acide prussique, d'acide cyanhydrique ou de Zyklon B?

"Je dis," rétorqua Hilberg, "que cet homme a été la cause du gazage de plusieurs pesonnes parce qu'il désirait étudier leur crâne dans le cadre de recherches anatomiques. C'est ce qu'il a fait et ensuite il a utilisé leurs crânes. Il s'est assuré qu'ils mourraient d'une dose appropriée de Zyklon B dans une chambre à gaz." (5-982)

Vous avez dit, déclara Christie, qu'il y a eu une sorte de commande d'effectuer ces gazages?

"Il y a un échange de lettres. Il y a eu une commande pour l'expédition de plusieurs individus."

Aaaaah, dit Christie, c'est ce que nous avons, une correspondance, une demande pour l'envoi d'un certain nombre de personnes.

"Peut-être que je pourrais simplement mentionner que -"

Aucun rapport de ce type n'existe, coupa Christie. C'est ce que sous-entend votre réponse.

"Je n'irai pas jusqu'à dire qu'aucun rapport de ce type n'existe, mais ce que vous désirez -"

Je veux ce rapport, dit Christie.

"Parfait," dit Hilberg. "Si vous voulez un rapport médical détaillé de ce qui est arrivé à un individu après avoir été gazé, je n'en ai pas vu, c'est tout."

Je ne veux pas un rapport détaillé de ce qui est arrivé à une personne après avoir été gazée, dit Christie. Je veux un rapport rédigé, avant, pendant ou après la guerre, qui montre que quelqu'un a été tué par l'une de ces substances.

"En fait, il y a une multitude de ces rapports, mais vous voulez un rapport scientifique rédigé par un médecin," dit Hilberg.

Une autopsie, précisa Christie.

"Non, non. A moins que nous ne parlions de ces documents d'August Hirt, pour lesquels je n'excluerai pas la possibilité d'une autopsie, mais je ne peux pas le jurer." (5-983)

Pourriez-vous avoir l'obligeance de me dire, insista Christie, si vous avez vu un seul document qui prouve que quelqu'un a été tué à l'aide d'acide prussique?

"Je ne désire pas répondre à cette question trop rapidement," dit Hilberg, parce qu'il est possible que j'aie vu quelque chose de ce genre mais je n'ai pas l'esprit orienté vers ces, vers ces sortes de détails."

Christie fit de nouveau confirmer par Hilberg qu'il y avait de multiples documents qui attestaient du meurtre massif de juifs. Christie produisit alors un article intitulé "Devant les implications morales de l'Holocauste", publié en dans le numéro d'avril 1978, de Sciences de l'éducation et demanda à Hilberg s'il en était l'auteur.

"Je suis désolé de ne pouvoir vous donner une réponse nette là-dessus aussi, dit Hilberg, "la référence vous indiquera-"

Christie lut la référence que l'article était de Raul Hilberg, professeur à l'université du Vermont, et que l'article était la transcription d'un discours qu'il avait donné à la suite d'un e rencontre organisée par la ligue contre la diffamation du B'nai Brith à New-York du 9 au 11 octobre 1977. Hilberg déclara qu'il se rappelait cet événement.

"La transcription est pleine d'erreurs de lecture que je n'ai pas eu le temps de corriger." (5-985)

Christie lut l'article et demanda à Hilberg de confirmer s'il avait tenu les propos suivants: Il y avait des emplois particuliers du langage, un langage dont Butz, qui nie que l'Holocauste ait eu lieu, affirme qu'il faut l'interpréter littéralement. Réinstallation, par exemple, et des mots semblables, qui étaient des euphémismes pour dire 'tuer'. J'ai cherché pour trouver un seul document, n'importe quel document, qui aurait contenu le mot `tuer'. Après avoir éplucher des dizaines de milliers de documents, j'ai trouvé le mot il y a deux semaines à peine, dans le rapport d'une opération de tuerie, mais pour des quadrupèdes, des chiens. Le mot 'tuer'a été utilisé pour des chiens. Les êtres humains recevaient un 'traitement spécial': ils étaient 'réinstallés', ou le 'prblème juif était résolu'.

"Voilà qui reflète convenablement la situation," dit Hilberg. "Tout ce que je dis ici c'est que le mot 'tuer', toeten en allemand, ne fut pas utilisé en ce qui concerne la population juive d'Europe."

Mais vous voudriez que nous croyions, dit Christie, que tous les allemands et les soldats SS qui recevaient des ordres auraient appris soudainement un noveau langage où le mot 'tuer'se trouvait derrière le terme 'réinstallation et que le 'problème juif résolu' voulait dire'tuer'?

"Je ne vous oblige pas à me croire," dit Hilberg. "J'ai dit, en me fondant sur mes compétences, qui ne sont pas forcément suffisantes, que dans l'échange correspondance il existait des règles habituelles des règles de base qui indiquaient très précisément comment l'on devait parler du processus de massacre. Il est même vrai que certains de ces euphémismes, après avoir été utilisés systématiquement, furent proscrits, lorsque par exemple Korherr, le statisticien de la SS, utilisa le mot 'traitement spécial', qui était un euphémisme pour tuer. Ce mot avait été utilisé si souvent, il était si connu qu'Himmler dit qu'il ne voulait plus que ce mot soit utilisé dans le rapport et qu'il désirait qu'un autre mot lui soit substitué durchgeschleusst."

Christie fit remarquer à Hilberg que Richard Korherr écrivit une lettre à un journal allemand en 1977 pour affirmer qu'il avait tenté à l'époque de savoir ce que le mot sonderbehandlung (traitement spécial) voulait dire.

"J'ai quatre déclarations sous serment de Korherr à propos de son rapport. Je ne connais aucune lettre de lui adressée à un journal en 1977," dit Hilberg. (5-986,987) Hilberg déclara qu'il serait surprenant que Korherr soit encore en vie.

"Il doit être très vieux... Richard Korherr a fait plusieurs affimations, des déclarations que j'ai toutes lues, devant les procureurs allemands. En 1960, on lui demanda de faire une nouvelle déclaration, et il affirma qu'il en était incapable. C'était en 1960. C'est pourquoi je suis surpris de cette lettre écrite en 1977, puisqu'il ne se sentait pas capable de faire une déclaration en 1960... Un procureur allemand tenta d'obtenir une déclaration de Korherr, et il ne put l'obtenir à cause de son incapacité affirmée." (5-989)

Selon Hilberg, les déclarations de Korherr en 1977, affirmant que 'traitement spécial' voulait dire réinstallation dans le district de Lublin "n'étaient pas correctes." (5-990)

Christie aborda le cas de Simone Veil et demanda à Hilberg s'il savait qu'elle était censée être morte dans les chambres à gaz.

"Je ne puis en aucune façon vous répondre," dit-il, "parce qu'il y a des gens que cela intéresse, mais pas moi." Il ne savait pas si elle était encore en vie. (5-991)

Christie passa à la question de la responsabilité juive dans le déclenchement de la seconde guerre mondiale. Hilberg déclara que la brochure Did Six Million Really Die? semblait "affirmer que les juifs eurent un rôle prédominant dans le déclenchement de ce conflit." Christie se dit d'accord et dit qu'il allait soumettre à Hilberg certaines données historiques et lui demander si celles-si venaient à l'appui des affirmations de la brochure.

N'est-il pas vrai, dit Christie, qu'en 1933 Samuel Untermeyer déclara qu'il fallait faire la guerre à l'Allemagne?

"Il est possible que j'aie vu ça," dit Hilberg, mais il y a eu plusieurs discours, et c'était l'un d'entre eux. Je ne m'en souviens pas." Hilberg se refusa à qualifier Untermeyer de 'personne très importante' bien qu'il ne se souvînt pas de la position que celui-ci occupait. "Je ne m'en souviens pas, mais je me souviens qu'il ne s'agissait pas de quequ'un de très important."

Hilberg n'avait pas lu le récit concernant Untermeyer à la une du New York Times du 7 août 1933. "Je n'ai pas lu cet article en particulier. J'ai probablement vu un titre, mais je n'ai jamais lu le texte complet de ce discours. J'ai déjà dit qu'il y avait eu de nombreux discours. Il est humainement impossible et superflu de lire toutes les déclarations de gens plus ou moins importants en réaction à la persécution de 1933. Il y a eu beaucoup de discours." (5-992 à 5-994)

Vous ne connaissez pas ce discours du tout?, demanda Christie.

"Non, je ne l'ai jamais lu."

Est-ce que cela vous surprend, dit Christie, que des discours, rapportés à la une du New York Times, aient affirmé, en 1933, qu'une campagne d'extermination avait lieu?

"Le New York Times, je dois le dire, particulièrement à l'époque, --et je peux le certifier -- publia de nombreuses choses," dit Hilberg. " Il est de notoriété publique qu'il n'y avait pas, à l'époque, de campagne d'extermination des juifs, --je l'ai déjà dit-- en 1933. J'ai témoigné et j'ai écrit sur l'évolution de ce processus. On tuait des juifs parce qu'ils étaient juifs en 1933, mais il n'existait pas, en 1933, de menace immédiate de liquidation physique complète de la population juive d'Allemagne. (5-994)

Donc, dit Christie, si quelqu'un affirmait en 1933 qu'Hitler organisait une monstrueuse extermination des juifs en collant des affiches sur leurs vitrines, en décrétant un boycott de leurs établissements, en emprisonnant les boutiquiers juifs, alors il s'agissait de la diffusion de fausses nouvelles?

"C'est une forme de rhétorique, puisque tout le monde savait en réalité ce qui se passait. Ces évenements étaient largement rapportés dans les médias. Les gens savaient ce qui se passait réellement puisque c'était une période de paix et que des correspondants en Allemagne rapportait tous les jours ce qui s'y passait."

Christie aborda ensuite la question des procès de Nuremberg et de leur description dans la brochure. Hilberg réitéra que que Did Six Million Really Die? était un ouvrage de parti-pris. "Il y a tellement de désinformation dans cette brochure que je dis que c'est un ramassis de mensonges, demi-vérités, des vérités occasionnelles, une phrase ou une demi-phrase de temps en temps."

Hilberg considérait comme "largement fausse" l'affirmation de la brochure que les procès de Nuremberg avaient été le résultat de tortures et étaient fondés sur des culpabilités préétablies.

Vous ne considereriez pas les procès de Nuremberg comme une partie de lynchage?, demanda Christie.

"Absolument pas," dit Hilberg. (5-995, 996)

Christie montra le livre, Fiske Stone, Pillar of the Law, par Alpheus Thomas Mason et lut la page 716:

"Son irritation grandissant devant la gêne que provoquait l'absence prolongée du juge Jackson provoquait chez lui de plus en plus de commentaires intempestifs. "Jackson est là-bas en train de conduire sa partie de lynchage à Nuremberg," remarqua-t-il. "Je ne me soucie pas de ce qu'il fait aux nazis, mais je ne supporte pas qu'on prétende que Jackson préside un tribunal ordinaire et qu'il procède selon lee droit des gens. C'est un simulacre trop hypocrite pour mes principes démodés."

Hilberg assura qu'Harlan Fiske Stone était le président de la Cour suprême des Etats-Unis; le juge Robert Jackson était membre de cette cour et fut procureur américain à Nuremberg.

"C'était un procureur des Etats-Unis à Nuremberg. Avant d'être à la Cour suprême des Etats-Unis, il avait été procureur général des Etats-Unis". (5-997)

Christie suggéra à Hilberg qu'Harlan Fiske Stone parlait des procès de Nuremberg lorsqu'il parlait d'une 'partie de lynchage'.

Hilberg répondit: "Il se peut que M. Thomas Mason, qui a écrit cette biographie, ait cité une remarque intempestive du président de la Cour, ennuyé par le séjour prolongé d'un juge de la cour à Nuremberg. Il était, comme il s'est décrit lui-même, de la vielle école. Maintenant il peut avoir utilisé ce langage intempestif --je ne doute pas de l'exactitude de la citation, mais il faut la remettre dans le contexte, du livre, de la remarque, des circonstances rapportées et de tout le reste Je ne peux pas sonder l'esprit de tous les juristes, il y eut, incontestablement, de nombreuses difficultés légales soulevées par le principe de la mise en accusation, en particulier la notion de crime contre la paix, qui n'a rien à voir avec l'holocauste, et on a largement écrit sur cette question. Il n'y a aucun doute que ce procès particulier a causé des discusions chez beaucoup de juristes du monde, que ce soit en matière de preuves produite, ou de substance, particulièrement dans le cas des crimes contre la paix. J'ai dit plus tôt que le juge Jackson a été procureur général des Etats-Unis. On lui a demandé, en tant que procureur général, s'il était conforme à la constitution américaine de permettre le transfert de 50 destroyers en Grande Bretagne, à l'époque où ce pays était seul face à l'Allemagne. Il a conclu que c'était conforme à la constitution américaine et aux lois internationales. Il a expliqué qu'envoyer 50 destroyers vers un autre pays pour assurer sa défense et celle d'autres pays contre une agression n'était pas un acte de guerre. Il a insisté sur l'idée d'agression. Il a affirmé cela de façon claire lors de la conférence de Londres, en établissant la charte du Tribunal Militaire International. Cette question a soulevé une contreverse." (5-998,999)

Christie continua par la lecture d'un extrait de la page précédente du livre et demanda à Hilberg s'il était d'accord (p. 715): "Lorsque le président Truman désigna l'ancien procureur général Francis Biddle comme juge aux procès de criminels de guerre, le président de la cour suprême marqua sa désapprobation en refusant de recevoir son serment comme Biddle le lui demandait demandait. "Je ne souhaite pas," expliqua-t-il, "paraitre, si peu que ce soit, donner ma bénidiction aux procédures de Nuremberg."

Hilberg reconnut qu'il n'y avait aucun doute sur la désapprobation du président Stone envers la procédure suivie à Nuremberg. Il expliqua qu'il ne sagissait cependant que d'une citation: "Je ne sais pas ce qu'il a réellement dit." Hilberg lui-même n'était pas d'accord avec les commentaires de Stone. (5-1000,1001)

Christie mentionna qu'à la même page, le juge en chef était cité dans une lettre qu'il avait envoyée à l'éditeur du magazine Fortune:

"Pour votre information, mais non pour publication en mon nom, je voudrais spécifier que la cour suprême n'a rien eu à voir, de près ou de loin, avec les procédures de Nuremberg, ou la décision du gouvernement de les autoriser. Je ne fus pas mis au courant de la participation du juge Jackson autrement que par le biais des journaux lors de sa nomination. "Dans la mesure où les procès de Nuremberg ont pour vocation de justifier le pouvoir du vainqueur sur le vaincu parce que celui-ci a mené une guerre d'agression, je n'aime pas du tout voir ces procès revêtus d'une fausse façade de légalité". Le mieux que l'on en puisse dire c'est qu'il sagit d'un acte politique d'états victorieux qui peut être moralement louable, comme le fut l'emprisonnement de Napoléon en 1815. Mais les Alliés de cette époque ne ressentirent pas le besoin de justifier cet acte par l'appel à des principes juridiques inexistants.


Ce texte a été affiché sur Internet à des fins purement éducatives, pour encourager la recherche, sur une base non-commerciale et pour une utilisation mesurée par le Secrétariat international de l'Association des Anciens Amateurs de Récits de Guerre et d'Holocauste (AAARGH). L'adresse électronique du Secrétariat est <[email protected]>. L'adresse postale est: PO Box 81475, Chicago, IL 60681-0475, USA.

Afficher un texte sur le Web équivaut à mettre un document sur le rayonnage d'une bibliothèque publique. Cela nous coûte un peu d'argent et de travail. Nous pensons que c'est le lecteur volontaire qui en profite et nous le supposons capable de penser par lui-même. Un lecteur qui va chercher un document sur le Web le fait toujours à ses risques et périls. Quant à l'auteur, il n'y a pas lieu de supposer qu'il partage la responsabilité des autres textes consultables sur ce site. En raison des lois qui instituent une censure spécifique dans certains pays (Allemagne, France, Israël, Suisse, Canada, et d'autres), nous ne demandons pas l'agrément des auteurs qui y vivent car ils ne sont pas libres de consentir.

Nous nous plaçons sous la protection de l'article 19 de la Déclaration des Droits de l'homme, qui stipule:
ARTICLE 19 <Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontière, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit>
Déclaration internationale des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU à Paris, le 10 décembre 1948.


[email protected]

| Accueil général | Table des matières | Suivant | Précédent |

L'adresse électronique de ce document est:

http://aaargh-international.org/fran/tiroirs/tRH/tRH4.html