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Nuremberg II ou les Faux Monnayeurs

Maurice Bardèche

 

 

CHAPITRE IV

LES ÉCRIVAINS



Naturellement, les protestations sporadiques, improvisées avec l'événement lui-même, réactions instinctives de l'opinion ou des consciences accompagnant l'actualité, gardant par là le caractère de l'improvisation, interjections de surprise ou d'indignation, nécessairement peu coordonnées et peu constructives, ont été, quelque temps après, suivies d'études d'ensemble, livres ou brochures, articles étendus, plus cohérents, plus systématiques, qu'il est indispensable de faire connaître également pour donner une notion assez nette des réactions provoquées par le verdict de Nuremberg.
On notera d'abord un phénomène qu'on peut trouver, comme on voudra, naturel ou étrange: dans chaque pays du monde, dans chaque langue du monde, il existe un livre contre le procès de Nuremberg; passionné ou objectif, timide ou implacable, ce livre aboutit toujours à la même condamnation. Il s'est trouvé dans chaque pays un homme, cette fois sans mandat, pour se créer le devoir de protester, pour s'en faire une obligation. Les écrivains français, seuls, se sont tus. Dans chacun de ces pays, il existait dans la législation un article punissant l'apologie des crimes. Le gouvernement français, seul, s'en est servi. On méditera, comme on voudra, sur ces constatations. Elles expliquent peut-être incidemment pourquoi nos livres ne se vendent plus à l'étranger.
Nous rendons donc hommage à tous ceux qui, pasteurs, prêtres, juristes, écrivains, ont eu l'honnêteté de protester publiquement contre ce qu'ils regardaient comme une injustice. Ce livre n'est pas un palmarès. J'oublie certainement beaucoup de noms. Je m'en excuse auprès de ceux qui sont injustement omis sur les difficultés que peut trouver un particulier à réunir sur un tel sujet une documentation complète. Je ne cite ici que les ouvrages ou les brochures dont j'ai eu connaissance et qui sont les plus caractéristiques. On trouvera peut-être ce chapitre un peu long. Mais ce sera un jour une consolation.
Nous commencerons ici encore par les pays anglo-saxons. L'esprit protestant a cela de grand qu'il ne peut supporter une tache sur la conscience; il a le courage de la confession publique qui est en effet à l'égard de l'irréparable la seule forme de réparation envers soi-même et envers autrui. Je ne peux me souvenir sans tendresse de ce pasteur dont je parlais au début de ce livre et qui, au milieu de 1944, condamnait tranquillement dans son bulletin paroissial les massacres des femmes et des enfants allemands. Comme lui, d'autres hommes se sont dressés partout contre l'injustice, presque seuls d'abord, puis s'enhardissant. Je ne crois pas qu'un jour on voie la tempête du mal tomber, assagie par ces voix lointaines comme par la flûte d'Orphée. Mais je crois que de tels livres sont notre honneur. Il en arrivera ce qui pourra.
Voici donc ce qu'écrivait dès 1947 sur le verdict de Nuremberg un intellectuel anglais nommé Montgomery Belgion dans un livre auquel il donna pour titre Epitah on Nuremberg, ce qu'on peut traduire, je crois, par Lettre sur Nuremberg. Cette lettre est censée être adressée à un pasteur de ses amis.
Elle reprend et résume d'abord les objections les plus souvent faites sur la composition et la compétence du tribunal.

Le tribunal était l'instrument judiciaire d'une des parties en cause. Le tribunal n'était qu'un prolongement du Ministère public. On trouvait ainsi un Ministère public assis sur le siège, en plus du Ministère public debout au Parquet. Cette difficulté, ni l'audience ni le jugement ni aucun article du statut ne pouvaient la résoudre. La difficulté qu'on rencontrait était la question: Quelle garantie avons-nous de l'impartialité des juges? A cette question, la seule réponse possible est que nous n'avons aucune garantie de leur impartialité Ils étaient nommés pour confirmer la ligne politique des grandes Puissances victorieuses Même si nous estimons que le vaincu mérite de porter la responsabilité de cette guerre, il est si évidemment de l'intérêt du vainqueur d'en rejeter toute la responsabilité sur le vaincu que le vainqueur est dans l'incapacité de se faire prendre au sérieux quand il fait porter sur l'autre cette responsabilité Que les vainqueurs aient cherché à rejeter sur le vaincu toute la responsabilité de la guerre au moyen d'une cérémonie ostensiblement judiciaire mais dans laquelle ils étaient à la fois accusateurs et juges, cela montre un mépris réellement stupéfiant de la justice et de la vérité en même temps qu'une confiance maniaque en tout ce qui est frelaté.
Le procès de Nuremberg, selon moi, a eu pour objet de renforcer l'allégation exprimée dans ce passage du message de Montgomery (il vient de citer le discours où Montgomery dit: «Nous ne vous laisserons pas oublier que vous avez été coupables de prendre l'initiative de cette guerre»). Pour reprendre l'expression du juge Jackson que je citais tout à l'heure, il a eu pour objet de «démontrer aux Allemands que le crime pour lequel leurs chefs vaincus étaient traduits en justice ne fut pas d'avoir perdu la guerre, mais de l'avoir déclarée». Je ne pense pas, comme le juge Jackson feint de le croire, que le procès a eu pour objet de déclarer tel ou tel survivant du cabinet allemand ou tel ou tel général ou amiral allemand, ou d'autres, coupable d'un acte technique d'agression. Mais en dépit de la déclaration du juge Jackson que «nous n'avons pas à nous laisser entraîner dans un procès sur les causes de la guerre», je constate que le procès de Nuremberg a eu pour objet de créer l'illusion qu'on découvrait par des méthodes légales ce que nous voulions démontrer, à savoir que l'Allemagne était responsable de la guerre. Je pense que le fait de créer cette illusion favorable à notre démonstration était précisément cette opération de grande politique qui avait été confiée au tribunal quand on le chargea de condamner la plupart des accusés.

Mais, pour la première fois dans ce livre, on voit un auteur aller bien au-delà de ces objections habituelles. En dénonçant le jugement de Nuremberg comme une opération politique destinée à justifier les vainqueurs, il en dénonce aussi le caractère d'opération de propagande, préparée et préméditée, exactement comme ce fut le cas pour d'autres opérations de propagande de la seconde guerre mondiale.

Alors qu'en 1918, écrit-il, c'est la vérité de Versailles qui fit endosser solennellement au vaincu toutes les responsabilités de la guerre, cette fois-ci, au lieu d'attendre le traité de paix pour proclamer l'Allemagne responsable de la seconde guerre mondiale, nous avons décidé d'avoir des procès qui devaient, pensait-on, établir de façon concluante sa culpabilité aux yeux du monde entier et aussi aux yeux des Allemands eux-mêmes. Tel fut, je le prétends, le réel objet du procès de Nuremberg. Telle est, je le prétends, sa véritable, sa complète explication. En outre, on expliquerait aux Allemands par de belles émissions bien détaillées les audiences du procès. Le procès de Nuremberg a été une gigantesque mise en scène. Le procès de Nuremberg a été une gigantesque opération de propagande.
L'intention de propagande peut être subodorée dans le ton des articles préparatoires. Pour beaucoup de gens en Angleterre et aux Etats-Unis et aussi bien, à cet égard, en France, le maximum de la monstruosité allemande fut découvert grâce aux descriptions de la situation des camps de concentration. En face de détails qui furent soudain rendus publics en avril 1945 sur les indicibles horreurs de Belsen, de Buchenwald et autres lieux, une vague d'indignation et de colère balaya le monde anglo-saxon. C'était une indignation honnête et une colère généreuse. Néanmoins, si nous nous arrêtons un instant pour remarquer l'énorme publicité qui fut donnée aux nouvelles concernant la situation des camps à ce moment précis et si nous la comparons avec le silence observé sur quelques autres sujets, le soupçon s'impose inévitablement à nous que ces découvertes ne se produisirent pas par pur hasard, à l'aube de la victoire. Elles semblaient avoir eu un objet précis. Elles semblaient bien avoir été réservées pour exploiter des sentiments honorables dans le c_ur du public et pour exacerber la haine du vaincu Comme la voix de la propagande peut être soupçonnée sur ce point, je la soupçonne aussi dans le déroulement actuel des procès intentés aux Allemands, et avant tout dans le procès de Nuremberg. Les mains ont pu être les mains de la Justice, mais la voix était la voix de la Propagande.
La caractéristique de l'époque à laquelle nous vivons est que la défaite de l'ennemi dans la guerre n'est plus suffisante désormais. Comme la guerre elle-même est devenue de plus en plus terrifiante par la puissance et le nombre des armes mises en action, par l'étendue des destructions et de la détresse infligée aux hommes, par la violence des passions déchaînées, ainsi en est-il de l'après-guerre. Vaincre l'ennemi sur le champ de bataille ne suffit plus. Une fois vaincu, l'ennemi doit, en outre, être proclamé responsable de la guerre et il faut le contraindre à admettre lui-même cette responsabilité. Ce n'est pas assez qu'il ait perdu la guerre: il doit porter encore tout le poids du mal provoqué par cette guerre.
Je n'ai pas l'intention de soutenir que les dirigeants allemands étaient innocents de toute responsabilité dans cette guerre. Mais je ne suis pas assez naïf pour penser qu'une agression se produit jamais dans un ciel serein. Je ne suis pas assez naïf pour supposer que les grandes Puissances étaient toutes des agneaux avec des toisons blanches comme neige, folâtrant pacifiquement et joyeusement, tandis que l'une d'elles et une seule était un grand méchant loup.
Je ne prends pas la défense d'une tolérance qui, regardant toutes les opinions comme également valables, finirait par rendre toutes les opinions également insignifiantes. Mais je reprends mes paroles précédentes. La confiance dans le triomphe final d'une opinion correcte exige que cette opinion correcte soit confrontée avec l'opinion fausse et que a priori l'une et l'autre soient également soumises à la réfutation. C'est seulement par ce débat entre opinions contraires que la passion de la vérité conserve sa vie. L'invincible conscience n'est invincible qu'à la condition que l'ennemi soit toujours devant les portes. Si on lève le siège, la conscience succombe à la langueur et s'atrophie. Nous n'avons le droit, nous Anglais, d'affirmer que nous avons raison que si les Allemands ont le droit eux aussi d'affirmer que nous avons tort. Que la vérité surgisse de la confrontation de la thèse, de l'antithèse et de la synthèse est une question qui reste à débattre. Mais ce qui est certain, c'est que la vérité est une question de découverte: elle n'a pas à être un objet manufacturé.

C'est également dans ce livre que, pour la première fois, on voit un écrivain accuser les armées et les gouvernements alliés d'avoir commis eux-mêmes les atrocités pour lesquelles ils ont condamné les chefs militaires et politiques allemands. Reprenant point par point les griefs de l'acte d'accusation, Montgomery Belgion complète ainsi, à sa manière, la documentation du Ministère public allié:

L'opinion publique mondiale ne sait pas le dixième de ce qui a été ordonné par les gouvernements britannique, américain, français et russe ou par leurs commandants militaires, après la reddition allemande. L'opinion mondiale ne sait pas le dixième de ce que les soldats britanniques, américains, français et russes, ou en accord avec eux, de ce que les civils russes, français, polonais, yougoslaves et autres ont fait, sur ordres directs, pendant la même période. L'opinion mondiale n'a jamais été informée.
Cette opinion mondiale fut informée la veille de la reddition allemande de l'exécrable infamie des camps de concentration allemands. On ne parla pas, soit alors, soit après, des camps de concentration non allemands. En juillet 1946, à Nuremberg, on fit une annonce, pleine d'un humour assurément inconscient mais cependant sardonique, qui était la suivante: La délégation américaine à la Conférence de la Paix, se tenant alors à Paris, avait proposé que des clauses relatives au crime curieusement nommé «raciste » la tentative d'extermination d'un groupe racial soient incluses dans tous les traités de paix et que tout gouvernement signant un traité soit forcé d'inclure dans son code criminel une stipulation que qui que ce soit qui attaque la vie, liberté, propriété d'un groupe racial, national ou religieux, est coupable de racisme. L'humour sardonique contenu dans cet avis provient du fait que, en ce qui concerne le «crime contre l'humanité» nommé «génocide», tout le monde sait qu'il y a des camps de concentration (ou leurs équivalents) pour les Polonais en Pologne, pour les Tchèques et Slovaques en Tchécoslovaquie, pour les Croates, Slovènes et Serbes en Yougoslavie, pour les Roumains en Roumanie, pour les Bulgares en Bulgarie, pour les Hongrois en Hongrie, pour les Français en France, pour ne pas mentionner d'autres pays d'Europe.
Le délit des hommes et des femmes confinés dans ces camps est précisément le délit sur le compte duquel, de 1933 à 1945, des Allemands furent enfermés dans des camps de concentration en Allemagne. Ils ont professé des opinions politiques répugnant à leur gouvernement. Qui en Angleterre ou aux U.S.A. peut déclarer ignorer que ces hommes et femmes ont été traités avec une certaine cruauté? Et même si leur traitement pouvait être tout ce que l'on peut désirer, ils seraient encore des hommes et des femmes privés de liberté et de la jouissance de leurs biens. Ceux d'entre eux qui appartiennent aux minorités raciales ou politiques ne sont-ils pas ainsi des victimes du racisme?
Sur la liste des «crimes de guerre» figuraient les déportations en masse des «territoires occupés» de citoyens robustes, dans telles et telles conditions de transport et de situation Des actes de même nature sont mentionnés comme ayant été accomplis par le gouvernement russe, ses soldats, ses policiers et officiels, au moment où, en septembre 1939, la Russie et la Pologne étant en paix, la moitié Est de la Pologne devint «territoire occupé», c'est-à-dire territoire polonais sous occupation militaire russe. Des actes de même nature sont mentionnés comme ayant été accomplis par le gouvernement russe et ses âmes damnées, après l'invasion des Etats de la Baltique, Estonie et Lituanie, par les armées russes, sans déclaration de guerre.
Les déportations massives de Polonais en Russie eurent lieu en février, avril et juin 1940, et en juin 1941. Il y eut un dernier rassemblement en 1943 après que tous les habitants de la Pologne annexée eurent été déclarés citoyens soviétiques. Les déportations massives de Baltes eurent lieu après l'invasion des pays Baltes par la Russie en juin 1940. Pour une très bonne raison, les chiffres exacts de ces déportations ne sont pas connus. En 1944, toutefois, Miss Keren déclara qu'elle avait obtenu certains chiffres approximatifs, de la Croix-Rouge américaine et de la Croix-Rouge internationale. Elle établit qu'en Estonie 60.940 célibataires de toutes classes et âges et des deux sexes furent déplacés et qu'en Lettonie également plus de 60.000 personnes disparurent. Selon le livre polonais intitulé The Dark Side of the Moon, en Lituanie 700.000 personnes sur un total de 3.000.000 d'habitants furent inscrites sur les listes de déportation. Le premier gouvernement polonais à Londres estimait que les déportations de Polonais avaient atteint entre un million et un million 600.000 personnes Les cercles polonais à Londres ajoutent qu'environ 400.000 déportés polonais périrent durant leur voyage à l'intérieur de la Russie. Sur 144.000 enfants polonais déportés, 77.834 étaient portés manquants lorsque l'heure de la libération sonna en 1941.
Assurément, la déportation par le gouvernement russe de millions d'hommes est apparentée aux «crimes contre l'humanité» spécifiés dans la mise en accusation de Nuremberg. On pouvait penser qu'il n'y avait pas à s'y tromper. On pouvait penser que les exigences de la justice étaient très simples. Si, en se chargeant du châtiment des prétendus criminels de guerre les Puissances victorieuses désiraient, au lendemain de leur victoire, faire un acte de justice et honorer le principe que tous les individus sont soumis à la même loi, on pouvait penser qu'il n'était pas suffisant d'entreprendre le procès des chefs du gouvernement allemand et de milliers de soldats et de fonctionnaires allemands, mais qu'il était nécessaire aussi de faire le procès des membres du gouvernement russe et de milliers de soldats et de fonctionnaires russes. Au lieu de cela, le gouvernement russe fit partie du procès des prétendus «criminels de guerre» et deux des juges du Tribunal militaire international chargé de juger les prétendus «grands criminels de guerre» étaient des personnes désignées par le gouvernement russe. Que peuvent donc avoir voulu dire les apologistes du jugement des «criminels de guerre», quand en Angleterre et aux Etats-Unis ils invoquaient la justice? Comment le procureur américain peut-il avoir proclamé qu'on ne commit aucune injustice? Comment le procureur britannique peut-il avoir représenté le résultat du procès de Nuremberg comme encourageant pour amener un jour le règne de la loi et de la justice? De tels jugements en de telles circonstances résonnaient comme un outrage à la justice
Selon des chiffres avancés par M. E. Bevin, ministre des Affaires étrangères à la Chambre des Communes le 26 octobre 1945, on estime à environ 4 millions le nombre des Allemands qui ont été refoulés des régions annexées de Pologne vers Stettin, et à environ 4 millions ou 4 millions et demi le nombre de ceux qui ont été expulsés de Tchécoslovaquie, de Hongrie et d'autres pays, soit un total d'environ 9 millions. Ces déportations ou expulsions ont été approuvées par la Grande-Bretagne et les U.S.A. Elles devaient avoir lieu, selon le Protocole de la Conférence de Berlin, «d'une façon ordonnée et humaine». Comment la décision fut accomplie, vous pouvez en juger d'après la description suivante de quelques groupes de déportés aperçus à Berlin:
«Aujourd'hui j'ai vu des milliers de civils allemands, vieillards, hommes et femmes, enfants de tous âges, réduits à la plus affreuse misère et condamnés à des souffrances pires que celles que les nazis infligèrent aux autres durant leur régime J'ai vu à la gare de Stettin de misérables restes d'humanité; la mort se peignait déjà dans leurs yeux au terrible regard vide: quatre étaient déjà morts, un cinquième et un sixième étaient étendus à côté d'eux, comme abandonnés sans espoir par le médecin, ayant juste la permission de mourir. Les autres étaient assis ou allongés, gémissant, pleurant ou simplement attendant.»
En février 1946, on estimait qu'à la suite d'une guerre annoncée comme devant donner la paix et le bonheur à l'humanité et comme devant lui apporter les quatre libertés de la Charte de l'Atlantique, y compris la liberté qui met à l'abri du besoin et de la peur, 17 millions de personnes avaient été chassées de chez elles et privées de leurs biens et que sur le continent entre 25 et 40 millions d'individus étaient sans toit
Il n'y avait pas que les Russes qui déclaraient aux prétendus «criminels de guerre» allemands: «Quand vous avez fait ce que j'ai fait, c'était un crime. Quand je le fais, c'est très bien.» Ce n'est pas seulement dans l'Est de l'Allemagne qu'on pille et maltraite les civils sans défense. Cela se produisit aussi à l'Ouest, pendant les semaines de l'invasion. Cela continua après l'invasion. Les armées alliées se conduisirent avec toute la licence et la sauvagerie de quelque horde primitive de barbares. Le pillage est défendu par la loi militaire britannique sous peine de lourdes punitions. A cette occasion, toutefois, il fut activement encouragé à tous les échelons. M.Leonard O.Mosley, correspondant de guerre aux armées, trouva, dit-il, surprenant que la fièvre du pillage ait atteint même les plus hauts membres de l'armée britannique. Il y avait aussi les réfugiés, dit-il. Les milliers d'étrangers qui furent rapidement connus sous le nom de personnes déplacées furent autorisés à piller et à détruire, tout en étant protégés contre les Allemands qu'ils dépouillaient. Des soldats revinrent de l'Armée du Rhin surchargés de butin. Par la suite, de plus en plus d'Allemands furent expulsés de chez eux en quelques heures, en exécution d'ordres de réquisition. L'entassement des Allemands porta à un niveau incroyable le mauvais état sanitaire. L'Armée du Rhin elle-même s'adonna à la boisson et à la licence.
Les crimes de guerre selon la définition de Nuremberg comportaient le retrait des territoires occupés de toute matière première, de tout outillage industriel, la confiscation ou la vente forcée des entreprises, des usines, etc. Vous avez déjà constaté que les Russes ont considéré cette sorte de crime de guerre comme particulièrement attirante. Ils ne furent pas les seuls. En 1945, le territoire allemand occupé par les Allemands fut largement dépouillé de ses plus importantes usines. Vers la fin de septembre de la même année, le général Eisenhower annonça que cinq des plus grandes entreprises allemandes allaient être démantelées et envoyées en des lieux qu'il ne désigna pas autrement. Un mois plus tard, on annonça que les trois grandes usines de l'I.G. Farben en zone américaine ainsi que cinq autres établissements industriels allaient être détruits. En zone britannique, le déménagement ou la destruction de l'outillage et des mines était encore en cours en juillet 1946, alors qu'à cette date il avait cessé en zone américaine. Un des plus vastes docks d'Hambourg fut détruit à cette époque et 12.000 tonnes d'acier furent anéanties. En novembre 1946, on fit savoir que 18.000 habitants des villes industrielles de la Rhur étaient sur le point d'être réduits au chômage par la fermeture projetée des firmes. Bien plus, ce n'était pas seulement l'outillage industriel ou les usines, ou du moins l'équipement essentiel en général qu'on allait mettre à la ferraille. Le 12 septembre 1945 on annonça que les forêts de l'Allemagne du Nord-Ouest allaient être exploitées à la limite. Dans le même mois de septembre, les Puissances victorieuses exigèrent que les familles allemandes et aussi les autorités, sociétés et associations, remissent aux représentants des Alliés tout l'or et l'argent qu'ils détenaient sous forme de monnaie, le platine et le cuivre sous toutes leurs formes, leurs devises étrangères et les monnaies étrangères qui étaient en leur possession. Le pillage se manifesta sous toutes les formes et depuis les sphères les plus élevées qui volèrent les formules chimiques et les secrets industriels jusqu'aux plus humbles des G.I. ou des personnes déplacées qui volaient une bouteille d'alcool ou une paire de chaussures En ce qui concerne le pillage dans les sphères dirigeantes, M.R.R. Stokes déclara aux Communes le 26 juillet 1946: «Comme industriel, j'ai trouvé les réactions de certains personnages officiels sur la soustraction frauduleuse des secrets industriels extrêmement et totalement répugnantes Je trouve immonde que, lorsqu'un ennemi est complètement impuissant, les industriels de notre pays envahissent son territoire comme un vol de vautours et arrachent des lambeaux de chair sur son cadavre.»
Je n'ai encore rien dit des Français. Peu d'informations sont parvenues en Angleterre sur la zone d'occupation française. Ce n'est pas seulement sur la zone russe et sur les pays de protectorat russe qu'on a fait descendre un rideau de fer. Cependant, dans l'été de 1946, un Américain, M.James P. Warburg, put visiter les quatre zones d'occupation et dans un reportage publié en Angleterre il déclara: «Dans toute la zone française, on rencontre des exemples de la loi "_il pour _il, dent pour dent"» Il est choquant de s'apercevoir que les Français ont démonté une des deux voies de la ligne Fribourg-Mulheim-Offenbourg, dans le but de faire profiter les lignes de chemin de fer françaises de l'autre côté du Rhin de l'important trafic Nord-Sud du pays, ou qu'ils ont déménagé de fond en comble une usine de matériel chirurgical y compris les coffres, les stocks et les caisses
En parlant des Français, je suis amené à la question des prisonniers de guerre. Le meurtre et le mauvais traitement des prisonniers de guerre figurent, vous vous en souvenez, au nombre des crimes de guerre spécifiés par l'Acte d'accusation de Nuremberg. En Angleterre et aux Etats-Unis, on ne sait rien des prisonniers de guerre emmenés en Russie. On sait seulement que beaucoup ont disparu. M.F.A. Voigt a noté, par exemple, que sur 300.000 prisonniers de guerre roumains internés en Russie 164.000 ont disparu sans laisser de traces. Sur la question de savoir comment il se fait que tant d'officiers et de soldats faits prisonniers par les Russes peuvent avoir disparu, le public anglo-saxon n'a reçu aucune information. Je n'ai pas l'intention de suggérer que les prisonniers de guerre ont disparu également en France. Mais comment les ont traités les Français? Peu après la capitulation allemande, l'armée américaine commença à mettre chaque mois à la disposition du gouvernement français un certain nombre de prisonniers de guerre pour fournir à la France une main-d'_uvre supplémentaire. En juillet 1945, 320.000 prisonniers de guerre étaient transférés en vertu de cet accord. Puis, en septembre suivant, ces transferts furent suspendus. Les autorités militaires américaines les ont suspendus parce que, déclarèrent-elles, à la fois la Croix-Rouge internationale et la Croix-Rouge américaine avaient trouvé l'administration des camps de prisonniers en France lamentable et informé les autorités que les prisonniers allemands n'y étaient pas traités convenablement. En particulier, les malades étaient laissés sans soins. C'est assez éloigné du meurtre et de la torture des prisonniers de guerre reprochés aux Allemands par l'Acte d'accusation de Nuremberg. Mais cela tombe sous le grief de mauvais traitements
Le 26 avril 1946, Julius Streicher, un des accusés, déclara qu'après avoir été arrêté il fut gardé pendant quatre jours en cellule sans aucun vêtement. «On m'a forcé à embrasser les pieds des nègres. On m'a fouetté. On m'a forcé à boire des crachats. On m'a ouvert la bouche de force avec un morceau de bois et on m'a craché dans la bouche. Quand je demandais à boire un verre d'eau, on m'amenait aux latrines et on me disait: "Bois!".» (A la suite, l'auteur donne l'exemple des mauvais traitements subis par M.Ezra Pound, sujet américain, commentateur à la radio allemande). M.Leonard O.Mosley, correspondant de guerre, était à Belsen en avril 1945 au moment où ce camp fut placé sous commandement britannique. «Les soldats anglais, dit-il, battaient les gardiens et gardiennes SS et les forçaient à ramasser les corps des morts, les obligeant toujours à en porter deux Quand l'un d'eux tombait d'épuisement, il était battu à coups de crosse. Quand une gardienne s'arrêtait pour un instant, elle était rouée de coups jusqu'à ce qu'elle se remît à courir ou piquée à coups de baïonnettes, au milieu de hurlements ou de rires indécents. Quand l'un d'eux essayait d'échapper ou désobéissait à un ordre, il était abattu d'un coup de feu.»
Une des catégories de crimes de guerre spécifiées dans l'Acte d'accusation de Nuremberg était la destruction de villes, villages et hameaux entiers. Une autre était la dévastation de villages, de ports, de digues et de ponts. L'Acte d'accusation soutenait que ces destructions et dévastations avaient eu lieu sans nécessité militaire. C'était là naturellement le point délicat. Jusqu'ici, il avait été laissé à l'appréciation des chefs militaires de décider si une destruction qu'ils ordonnaient correspondait ou non à une nécessité militaire. Toutefois, un tribunal entièrement libre de son jugement aurait pu ne pas considérer que les destructions faites par l'aviation américaine et anglaise correspondaient invariablement à une nécessité militaire La raison alléguée en Angleterre et aux Etats-Unis fut que le bombardement de masse sans égard aux objectifs contribuait à abréger la guerre. Si les Allemands avaient pu le faire, ils n'auraient certainement pas hésité à invoquer le même argument pour les destructions dont ils étaient accusés, et avec une égale solidité. Car, pour ce qui est d'abréger la guerre avec l'Allemagne, les arguments donnés par l'Angleterre et les Etats-Unis sur les bombardements sans objectif peuvent être discutés. Selon le DrThomas Balogh: «Les conséquences des bombardements sans objectif ont été brillamment analysées par le rapport sur les bombardements stratégiques américains. Ce document a montré que le bombardement des villes avant 1943 était une folie (car nous nous exposions à des représailles plus graves sans résultat pratique) et qu'après 1943 il était un crime (car nous ne diminuions pas la production de guerre allemande puisque l'occupation de la France et les perfectionnements du radar permettaient des attaques aériennes sur objectifs). Quoi qu'il en soit, la grande presse anglaise n'a jamais insisté sur l'horreur des bombardements de masse sans objectif sur les villes. Les raids aériens sur les zones d'habitation étaient seulement présentés comme des prouesses techniques.
Il n'y a pas un seul acte spécifié dans l'Acte d'accusation de Nuremberg comme crime de guerre que l'une ou l'autre des grandes Puissances victorieuses qui s'arrogent le droit de châtier les prétendus criminels de guerre parmi les vaincus ne puisse être exposée à s'entendre reprocher. Ces actes n'ont peut-être pas tous été accomplis de sang-froid. Il n'était peut-être pas possible de les éviter. Mais enfin, ils ont été accomplis.
Telle fut, par exemple, la guérilla menée en France par les bandes connues sous le nom de Résistance ou de Maquis. Ces bandes étaient certainement inspirées par un noble idéal. Elles voulaient débarrasser le pays de l'envahisseur. Il importe peu à la valeur même de cet idéal que la Résistance ait été impuissante par elle-même et même avec l'appui en hommes, argent et armes fourni par l'Angleterre à atteindre ce résultat. C'est seulement le succès du débarquement de juin 1944 qui a assuré le succès de la Résistance. A coup sûr, toutefois, la Résistance française ne peut pas se vanter de s'être constamment, dans ses opérations contre l'envahisseur, conformée aux lois et coutumes de la guerre. Et même, en vérité, elle peut très difficilement prétendre même qu'elle les a observées. En premier lieu, les opérations qu'elle assurait étaient en flagrante contradiction avec les termes d'un armistice qu'un gouvernement français reconnu non seulement par l'Allemagne mais par la Russie et les Etats-Unis avait signé de son propre mouvement avec le gouvernement allemand. En second lieu, les membres de la Résistance française commirent souvent des déprédations à l'égard de leurs propres compatriotes et ces déprédations n'étaient pas toujours commises dans le seul intérêt de leur cause. En maint endroit de France, à la fin de 1945, on désignait des particuliers qui étaient soupçonnés de s'être enrichis au détriment de la communauté française. Quand, pour se procurer des fonds, les Résistants pillaient une banque ou un bureau de postes, ils ont souvent mis une part du butin dans leurs poches. En troisième lieu, si les membres de la Résistance française ont montré constamment un courage et une audace remarquables, ils furent forcés aussi de recourir à la ruse et aux voies furtives. Ils ont fait une guerre du coup de poignard dans le dos. Et cette expression s'applique aussi bien aux dommages matériels qu'ils ont infligés qu'aux meurtres qu'ils ont perpétrés. La guerre, certes, est atroce. Toutefois, depuis longtemps certaines règles de conduite de la guerre ont été élaborées pour en atténuer le caractère horrible et pour rendre la carrière des armes honorables. Mais les francs-tireurs, les maquisards et les partisans sont contraints d'enlever à la conduite du combat tout caractère honorable par les conditions mêmes dans lesquelles ils doivent harceler l'ennemi.
Il est très bien qu'à Nuremberg on ait désigné comme crimes de guerre l'exécution d'otages et l'imposition de pénalités collectives. Mais des otages furent arrêtés et exécutés et des pénalités imposées exactement dans les mêmes conditions que dans les guerres précédentes et comme elles l'auraient été en Allemagne par nos armées victorieuses si celles-ci avaient eu à combattre un mouvement de résistance.
Si certains actes commis pendant la guerre doivent être définis comme des crimes de guerre, alors à notre tour nous devons au moins nous demander si la tactique des mouvements de résistance, la tentative de priver de nourriture les populations civiles par le système du blocus, ainsi que la sous-alimentation, les privations et les mauvais traitements infligés au vaincu après sa capitulation ne devraient pas être comptés parmi ces actes condamnables. Nous constatons que les gouvernements et les armées des grandes Puissances victorieuses ne peuvent être tenus pour innocents de nombreux actes pareils à ceux pour lesquels ils accusent et châtient certains des vaincus comme criminels de guerre. Et enfin nous constatons que les gouvernements, les armées et les ressortissants des grandes Puissances victorieuses ont également commis pendant la guerre et après la guerre d'autres actes également susceptibles d'être déplorés et réprimés. Il est clair que dans le châtiment des prétendus criminels de guerre et dans le procès et le châtiment imposés par les vainqueurs à certains des vaincus après leur capitulation, le principe que chacun est égal devant la loi a été ouvertement bafoué. Il a pu y avoir une procédure judiciaire. Il n'y a pas eu de justice.

Sous cette forme, le livre de Montgomery Belgion constitue un acte d'accusation très complet contre le procès de Nuremberg. Il dit ce qu'il fallait dire, ce qu'on retrouvera partout. Et il le dit avec fermeté, avec modération, et de bonne heure. Mais on peut prétendre que Montgomery Belgion est un isolé, un esprit paradoxal, un écrivain que la justice britannique a eu la faiblesse de ne pas poursuivre, précédent dont je me couvre abusivement. Je vais donc montrer, par de rapides sondages, que le livre de Montgomery Belgion existe dans toutes les langues. Les arguments sont en place, vous les avez entendus, vous les connaissez. Vous les reconnaîtrez facilement. Dès lors, notre énumération va être rapide et on aura une idée d'ensemble de chaque ouvrage que je vais citer, simplement en le chassant par rapport à celui que je viens d'analyser.
Aux Etats-Unis, retenons d'abord le petit livre de A.O.Tittmann, The Nuremberg Trial, paru à New York en 1947. Voici sur le principe du tribunal:

On peut dire très exactement qu'avec la fin de cette guerre est arrivée également la fin de l'ère chrétienne. Tous les préceptes de conduite qui avaient cours jusqu'ici ont été écartés et à leur place a été établi l'esprit de vengeance de la loi mosaïque La loi internationale, pour être reconnue en tant que telle, doit être acceptée par toutes les nations. Elle ne peut être forgée ou modifiée unilatéralement, et le statut du Procureur Jackson a été accepté uniquement par les vainqueurs de cette guerre, et même il ne fut accepté par certains qu'avec hésitation et après beaucoup d'insistance. Ce statut n'a pas été soumis aux autres nations. La loi internationale est le produit d'une lente germination et elle ne peut être rejetée avec dédain et refaite à brûle-pourpoint pour convenir aux circonstances. Le produit de MM.Rosenman, Jackson et Glück n'a rien à voir avec la loi internationale.

Voici sur la responsabilité de la guerre:

Le principal grief contre les criminels est celui d'avoir fomenté un complot pour déclencher une guerre d'agression. Combien de guerres ont été un complot du même genre, sans en excepter celles que nous avons faites S'il y eut un complot en Allemagne pour déclencher une guerre d'agression, il y eut des complots analogues aux Etats-Unis, en Angleterre, en France et en Russie, nations qui se sont toutes constituées les juges de ceux qu'ils accusent d'être les seuls responsables de la guerre d'agression L'Angleterre a déclaré la guerre à l'Allemagne parce que, si la puissance allemande s'étendait par des agressions nouvelles, l'Angleterre se serait trouvée dans l'impossibilité de défendre ses droits les plus élémentaires. Les mêmes raisons ont déterminé la France (cit. de Sir Norman Angell dans New York Times du 21 oct. 1945). Ces deux nations, par conséquent, ont déclenché contre l'Allemagne une guerre préventive qui ne pouvait être autre chose qu'une guerre d'agression
Ni l'Angleterre ni la France ni les Etats-Unis ne se sont fondés sur le pacte Kellog ou n'en ont observé les stipulations au moment de la déclaration de guerre. Les raisons données par Chamberlain et Daladier pour déclarer la guerre à l'Allemagne n'étaient pas basées sur ce texte et il ne fut pas respecté non plus dans les nombreux actes de belligérance illégaux au moyen desquels Roosevelt finit par nous engager dans la guerre.

Voici enfin sur les crimes de guerre des Alliés:

Ce qui se passa en Bohême-Moravie quand von Neurath était à la tête de ce pays n'est presque rien en comparaison des traitements subis par les Allemands des Sudètes sous le gouvernement de Benès, dont l'incroyable degré de terrorisme et de cruauté est passé sous silence par notre presse enchaînée, quoi qu'elle soit parfaitement renseignée sur ce point. Mais il n'est pas convenable d'imprimer cela parce que cela dissiperait le rideau de fumée que cette presse a répandu sur notre pays. L'attitude générale de notre presse enchaînée montre ce qu'on peut attendre de ce «procès» et son caractère de bouffonnerie. Sachant parfaitement qu'il n'a aucune base légale, ses promoteurs essaient de le «refiler» au peuple américain en se servant de méthodes de propagande solidement éprouvées.
L'énumération des crimes allemands, déportation de travailleurs, meurtre et sévices sur les prisonniers de guerre, pillage de la propriété publique et privée, destruction aveugle des villes et villages, dévastations non justifiées par la nécessité militaire, peut aussi bien être dirigée contre les ennemis de l'Allemagne et se poursuit aujourd'hui dans l'état de paix, réalisé en fait quoiqu'il n'existe pas en droit, et plus d'un an après la fin des hostilités.
Jackson accepte sans hésitation et intégralement tous les chiffres fournis par les Russes, bien qu'ils soient notoirement faux, ce qui est prouvé par le fait que l'armée allemande aurait été anéantie plusieurs fois de suite si les chiffres des pertes que les Russes prétendaient lui avoir infligées avaient été exacts. Il accepte même pour authentique l'affirmation de source russe que, en septembre 1941, 11.600 officiers polonais avaient été assassinés par les Allemands dans la forêt de Katyn, alors qu'en fait les vêtements d'hiver trouvés sur les corps prouvaient que l'assassinat avait eu lieu tandis que la région se trouvait sous le contrôle des Soviets. Si l'on excepte les Juifs, le nombre de civils tués délibérément par les Allemands n'approche sûrement pas ceux des Allemands tués par leurs ennemis. Le bombardement des villes allemandes a coûté à lui seul deux millions de vies humaines, tandis qu'un beaucoup plus grand nombre de victimes étaient blessées ou privées de leur foyer, ce qui entraîna leur mort par le froid, les privations ou la faim.
Les mots destruction massive suffisent à démolir les mensonges habituels sur les installations militaires, par la présence desquelles on prétend légitimer certains des crimes les plus atroces contre les non-combattants que le monde ait jamais vus. Il est réconfortant de voir les grandes Puissances désavouer indirectement ce qu'elles ont fait sous prétexte de nécessité militaire dans une guerre qui, selon de nombreux experts, pouvait fort bien être gagnée dans le respect des règles du monde civilisé, qui ont constamment protégé les non-combattants, hommes, femmes et enfants, incapables de se protéger eux-mêmes. Où est le tribunal pour juger ces criminels-là? Les coupables, dites-vous, ne sauraient échapper en produisant la vieille excuse que les actes perpétrés le furent par l'Etat et pour la défense de l'Etat, sans qu'aucun individu en puisse porter la culpabilité ou la responsabilité. Très bien alors, mettez en jugement Eisenhower, Spaatz, Montgomery et Harris: car cette règle s'applique à eux.

Au Portugal, le professeur Joaô das Ragras publie à Lisbonne, en février 1947, une étude du procès de Nuremberg sous le titre Um Nuovo Direito Internacional, Nuremberg. On y peut lire les appréciations suivantes:

Parce qu'il n'était pas possible aux accusateurs de juger le phénomène historique Hitler «en personne», ils ont entrepris la tentative de renverser le prodigieux édifice de son _uvre politique et spirituelle au moyen de la formule des cinq points de l'accusation Le procès des criminels de guerre n'a pas été un exemple du droit démocratique de libre défense, mais bien, au contraire, un enchaînement, sans précédent dans l'histoire du droit, de violations et d'empêchements systématiques imposés à la défense.

En ce qui concerne la responsabilité de la guerre:

Ce n'est pas la peine d'examiner dans son contenu juridique le bavardage ridicule du verdict de Nuremberg en ce qui concerne les guerres d'agression des Allemands contre l'Autriche, la Tchécoslovaquie, le Danemark, la Norvège, la Hollande, la Belgique ou les pays balkaniques, puisqu'on a interdit aux avocats allemands d'y opposer les pièces secrètes prises aux Alliés pendant la guerre et les plans des états-majors français et anglais. Le texte des productions sur lequel se base le verdict représente une falsification de l'histoire véritable qui peut difficilement être dépassée.

En ce qui concerne les crimes de guerre allemands et les crimes de guerre alliés:

Les bombes incendiaires au phosphore, les attaques terroristes contre les habitations civiles, l'assassinat de centaines de milliers de femmes et d'enfants innocents, les actes barbares d'absurde furie destructive, par exemple le bombardement aérien de Dresde, contre lequel le vieux Gherard Hauptmann, qui en fut le témoin oculaire, éleva de violentes protestations, les attentats contre la neutralité effectués par le contrôle des navires au moyen de certificats douaniers et de navy-certs, violation du droit international qui se prolongea jusqu'à la fin de la guerre, tout cela et beaucoup d'autres choses (et encore, nous ne parlons pas des crimes bolcheviques et des bombes atomiques), on déclara que ce ne sont pas des crimes de guerre, mais des actes conformes à une conduite humanitaire et démocratique de la guerre.
Conclusion d'un juriste neutre: quand il s'agit des Allemands, les mauvais traitements contre les prisonniers sont considérés comme crimes de guerre; mais quand il s'agit des Alliés, les mêmes crimes sont regardés comme «irrelevant» et, en conséquence, ils appartiennent à la catégorie des moyens normalement appliqués par la justice démocratique.

Ce sont là les thèmes habituels. Mais ici l'auteur va plus loin. Il accuse le Ministère public d'avoir fait reposer l'essentiel de son argumentation sur des documents d'une authenticité douteuse et sur des aveux extorqués par les mauvais traitements et parfois par la violence. Nous traiterons plus loin, en détail, cet aspect très important des jugements de Nuremberg. Bornons-nous, pour l'instant, à citer notre auteur portugais:

Conclusion qui s'impose à tout juriste impartial: il y a quelque chose qui sonne faux dans les «documents-clefs» du tribunal militaire (il s'agit du rapport Schmundt et de la note Hossbach), bien que le juge Lawrence ait accepté les preuves d'authenticité de ces documents Beaucoup plus importantes encore pour formuler un jugement sur certaines assertions (de l'accusation) sont les violences commises par les Alliés sur des prisonniers sans défense et qui consistaient en mauvais traitements et en tortures au moyen desquelles étaient extorquées de prétendues «confessions».

Enfin l'auteur n'hésite pas non plus à rompre avec les préjugés habituels, en exprimant son sentiment pour le national-socialisme:

En fait, à Nuremberg, deux mondes se sont affrontés qui ne pouvaient pas se comprendre. Le monde matérialiste de Mammon et de l'hypocrisie démocratique contre la conception idéaliste et héroïque d'un peuple qui défendait son droit de vivre Comment ce monde assouvi et matérialiste pouvait-il comprendre l'inébranlable et héroïque volonté de vivre d'un peuple qui, en dépit de l'espace restreint qu'il possédait, a donné depuis des siècles des _uvres immortelles à notre culture, et qui, avant la seconde guerre mondiale, a été à la tête de tous les progrès techniques décisifs de notre siècle? Il est digne de la mentalité de canaille de la presse internationale de se déchaîner encore contre les chefs du peuple allemand, en dépit de leur attitude de dignité lorsqu'on leur faisait subir un traitement ignoble et une injuste condamnation à mort Avec une attitude vraiment héroïque, digne de la plus haute admiration, sont morts les condamnés de Nuremberg, précurseurs d'une justice sociale fondée sur des bases nationales et avec une proclamation ardente de leur amour pour leur peuple et pour leur idéal.

En Angleterre encore, un autre petit livre politique a été mis en circulation. C'est une brochure plutôt qu'un livre, mais par le ton et le contenu elle fait écho, elle aussi, aux ouvrages précédents. Elle est éditée par un groupe qui a à sa tête le duc de Bedford, sous le titre Failure at Nuremberg, ce qui peut se traduire, je crois, par La Faillite de Nuremberg. Je passe sur les arguments traditionnels contenus dans cette brochure, sur la partialité du tribunal, sur les condamnations portées ex post facto lege, sur les crimes de guerre alliés, sur la malhonnêteté fondamentale du procès lui-même. Je ne retiens que les passages qui concernent le national-socialisme et ceux qui concernent la falsification des témoignages et des preuves. Voici d'abord comment s'exprime l'auteur sur le national-socialisme:

Peu importe que le national-socialisme allemand ait été un mouvement politique généreux ou condamnable et probablement, comme la plupart des fragiles institutions humaines, il a été un mélange de bien et de mal mais, en tout cas, ce qu'aucune personne informée et impartiale ne peut nier c'est qu'il fut un mouvement politique d'une totale sincérité. En outre, cette grande, cette magnifique sincérité imprégnait profondément (à l'exception d'un ou deux opportunistes à qui leur double-jeu valut la vie) les âmes des accusés de Nuremberg, les âmes de ces hommes qui furent condamnés à mort ou à l'emprisonnement. Que ce mouvement ait attiré un certain nombre de fripouilles, c'est là une chose trop naturelle (et à quel grand parti cela n'arrive-t-il pas d'ailleurs?), mais qu'on puisse balayer toutes les organisations nazies en les dénonçant comme criminelles, c'est là une position que tout historien honnête, s'il examine les preuves contemporaines, ne manquera pas de rejeter et de condamner sans aucune hésitation Le national-socialisme est mort. L'humanité, toutefois, n'est pas laissée sans recours et le jour viendra peut-être où des hommes trouveront le moyen de réaliser ce qu'il y avait de bon dans le national-socialisme sans retomber dans son autoritarisme brutal, dans son fanatisme sans merci et dans son intolérance. Une chose, toutefois, est certaine. Ce jour n'a pas été rendu plus proche par l'assassinat judiciaire de ces vaincus qui avaient servi leur pays avec amour. Le procès de Nuremberg n'est pas l'aurore d'un temps nouveau, c'est un retour aux temps barbares et à la nuit.

Et voici les conclusions des divers passages consacrés à l'examen des témoignages et des preuves. Des témoignages ont été obtenus par des pressions exercées sur les témoins:

Peut-être sera-t-il opportun de se référer ici au procès de Belsen, où furent produits les prétendus aveux d'une des accusés, Irma Grese. Il fut soutenu devant ce tribunal que ces aveux avaient été arrachés par la force et aucun démenti satisfaisant ne fut publié par la suite La même mésaventure semble être arrivée à propos de Sauckel Son défenseur a déclaré que ses aveux à l'instruction lui avaient été extorqués par la force et que l'accusation n'avait pas eu le temps (à cette date) de faire une enquête approfondie sur les faits Ces aveux furent utilisés à nouveau cependant (six mois plus tard) par la délégation française. Sauckel nia tout le contenu de ce document, en déclarant qu'on l'avait menacé, s'il persistait à refuser de signer, de le livrer avec ses dix enfants aux autorités soviétiques. Ces «aveux» furent néanmoins acceptés par le tribunal.

Des documents peu probants, en particulier, des rapports de police insuffisamment contrôlables ont été présentés comme preuves:

Le rapport de la délégation française contenait un grand nombre de rapports de police. La défense fit des objections fondées sur le principe que ces rapports n'étaient pas suffisamment contrôlés, mais le tribunal les déclara acceptables en tant que document présenté par un gouvernement. Le caractère douteux de «documents» de cette catégorie ne peut être ignoré de personne.

D'autres documents ont été commentés avec une évidente mauvaise foi:

La délégation américaine produisit ce qu'elle appelait un catéchisme nazi, compilé par Rosenberg, et comprenant un certain nombre de nouveaux commandements tels que ceux-ci: Tu seras courageux - Tu n'agiras jamais bassement - Tu croiras à la présence de Dieu dans toute la création vivante, dans les animaux et dans les plantes - Tu garderas la pureté de ton sang. Que des commandements de ce genre constituent vraiment un crime de guerre serait, croyons-nous, un point de vue bien difficile à soutenir devant n'importe quelle assemblée douée de bon sens.

Enfin, la partialité des témoins était évidente et leur témoignage fut souvent fantaisiste:

De même que pour les documents, ainsi en ce qui concerne certains des témoins, un lecteur impartial du procès ne peut manquer d'être choqué par le choix malheureux du Ministère public. Cette critique s'applique à ceux dont le témoignage côtoyait la fantaisie, à quelques-uns qui ne reculèrent pas devant la trahison en temps de guerre, à d'autres qui témoignèrent par écrit, mais qui étaient apparemment peu désireux, ou qui se firent interdire sous d'excellents prétextes, de soutenir leurs dires en face des accusés.

Et voici la conclusion à laquelle aboutit l'auteur:

On a ainsi ouvert la voie à une campagne d'exagérations qui fut énergiquement soutenue par notre presse et qui, peut-être volontairement, a servi à masquer et à excuser largement la politique de disette, de déportation, etc., que nous infligions en même temps aux Allemands Si la vérité occupe le premier rang parmi les victimes de la guerre, tous ceux qui ont lu notre presse pendant la guerre peuvent prendre sur eux d'affirmer que le sentiment de l'honneur fut sacrifié tout de suite après Il est indécent qu'après une guerre qui a dévasté un continent et qui a failli mener le monde entier à la famine, une farce aussi tragique puisse être jouée. Il n'est pas dans la tradition de l'Angleterre de se conduire ainsi. Et ce n'est pas intelligent: peut-être est-ce le pire de tout.

Après ces monographies consacrées au procès de Nuremberg, il ne faut pas s'étonner si les ouvrages des essayistes ou les reportages politiques anglo-saxons, qui ne traitent que par incidence du procès de Nuremberg, sont souvent très sévères dans leurs appréciations. Il faut ici se borner à quelques sondages. Nous ferons connaître d'abord quelques passages d'un livre très célèbre aux Etats-Unis, en Angleterre et en Allemagne, mais totalement inconnu en France, celui de Freda Utley sur l'Allemagne actuelle, paru récemment à Chicago sous le titre The High Cost of Vengeance. MmeFreda Utley, veuve d'un des meilleurs militants communistes américains et devenue après l'assassinat de son mari la grande spécialiste des enquêtes sur la politique internationale, a écrit des livres qui font autorité sur l'Extrême-Orient, la Chine, le Pacifique. Son nom, aux Etats-Unis, est beaucoup plus important que celui des frères Alsop, porte-parole du brain-trust Roosevelt, dont nos journaux recueillent religieusement les papiers. Après deux années d'une enquête très attentive en Allemagne, MmeFreda Utley écrit ce qui suit:

A Nuremberg, non seulement nous avons appliqué une loi créée post facto, mais nous avons déclaré en outre qu'elle s'appliquerait aux Allemands seuls. Selon les jugements des tribunaux américains de Nuremberg, la volonté des vainqueurs est absolue et le vaincu n'a pas le droit d'en appeler à la loi internationale, à la loi américaine, ou à n'importe quelle autre loi Peu d'Américains en ont conscience, mais leurs représentants à Nuremberg ont fait savoir expressément que les vainqueurs n'étaient pas soumis à la même loi que les vaincus. Quand la défense prétendit que, si c'était un crime contre la loi internationale que des Allemands aient confisqué la propriété privée dans les régions occupées de Pologne et de Russie, qu'ils aient utilisé des civils et des prisonniers de guerre comme travailleurs forcés ou qu'ils aient réduit les rations alimentaires dans les territoires occupés par eux, on ne comprenait pas pourquoi les gouvernements militaires américain, anglais, français ou allemand ne se trouvaient pas poursuivis pour les mêmes crimes qui étaient commis chaque jour en Allemagne, on leur répondit: «Les Puissances alliées ne sont pas soumises aux règles de la Convention de La Haye et aux règles concernant la conduite des hostilités». Pourquoi? «Parce que, dirent les juges et les procureurs américains à Nuremberg, les règles concernant la conduite des hostilités s'appliquent à la conduite des belligérants en territoire occupé pendant tout le temps où une armée se bat contre eux pour essayer de restituer le pays occupé à son légitime possesseur, mais ces règles cessent de s'appliquer quand la belligérance est terminée, qu'il n'y a plus d'armée ennemie en campagne et que, comme c'est le cas pour l'Allemagne, le pays a été subjugué par le moyen d'une conquête militaire». (Jugement dans le procès n·3 p.10.) Cet argument que ce qui est un crime pendant la guerre cesse d'en être un après la cessation des hostilités est sûrement le plus beau sophisme juridique dans la collection de Justice Jackson
Nous refusons donc d'observer les règles de la loi internationale parce que nous sommes un pouvoir souverain; mais en même temps nous refusons d'appliquer la législation américaine ou la législation allemande parce que nos tribunaux sont une émanation d'une autorité internationale. Les Allemands sont donc rechtlos: privés de la protection de toute loi et soumis à l'arbitraire des décrets du vainqueur. Nous avons mis le peuple allemand hors la loi comme Hitler avait fait pour les Juifs.

Plus loin, Freda Utley signale, elle aussi, les difficultés d'une inculpation collective et, également, la difficulté d'obtenir des témoignages exacts à cause de la terreur qui régnait dans toute l'Allemagne en 1945 et 1946:

Les jugements de Nuremberg sont fondés sur le principe totalitaire de la culpabilité collective et du châtiment collectif. Nous décrétons que quiconque, à n'importe quel poste, militaire ou civil, a aidé ou appuyé l'effort de guerre allemand est coupable d'avoir participé à une guerre d'agression. Cet objectif est si vaste qu'il s'est finalement évanoui. Les juges américains envoyés à Nuremberg pour juger les criminels de guerre ont été incapables de savoir où il fallait faire passer la ligne de discrimination pour éviter l'inculpation de tout le peuple allemand et par suite créer un précédent pour l'incrimination de tout le peuple américain dans une future guerre baptisée guerre d'agression par les communistes. Car, aux termes de la loi n·10, le paysan ou le fermier qui a produit ou vendu ses productions, l'industriel qui a continué à faire travailler ses ouvriers et les ouvriers qui ont poursuivi leur travail, les fonctionnaires et les soldats qui ont obéi au gouvernement, peuvent tous être regardés comme coupables
Le plus grave de tous les handicaps de la défense était la difficulté de trouver des témoins, d'obtenir l'autorisation de les voir ou de les persuader de déposer à Nuremberg A l'époque du procès des grands criminels de guerre, presque tous les témoins étaient en prison, et ne pouvaient être mis en rapport avec la défense si l'accusation les réclamait comme témoins à charge Il était souvent possible d'obtenir d'un témoin la déposition qu'on voulait, simplement en le maintenant en prison pendant deux ou trois ans, sans nouvelles de sa famille, sans personne pour s'occuper de lui, ou en le menaçant de l'inculper lui-même comme criminel de guerre s'il refusait de charger un accusé.

Mais Mme Freda Utley va plus loin encore. Comme Montgomery Belgion, mais en termes plus vifs encore, elle dénonce l'hypocrisie fondamentale des jugements de Nuremberg, en montrant que les autorités soviétiques ne se privent pas de soustraire au tribunal les prétendus criminels de guerre qui ont accepté de passer à leur service, et aussi en révélant les arrière-pensées des Alliés dans la campagne des atrocités allemandes et le rôle de la propagande dans cette campagne:

On a poursuivi des Allemands pour des crimes de guerre commis en Russie, tandis que le gouvernement soviétique, lui, refusait de participer à ces procès. Les Soviets, pendant ce temps-là, s'occupaient à persuader les criminels de guerre allemands de devenir leurs collaborateurs. Si bien qu'il est arrivé souvent que les juges américains de Nuremberg condamnent ceux qui avaient exécuté les ordres de leurs supérieurs tandis que les supérieurs eux-mêmes remplissaient au même moment des fonctions importantes en zone soviétique. Par exemple, le général Vincent Müller, qui signa l'ordre de liquidation des civils russes qui se trouvaient sur la route de l'armée allemande, est maintenant chef d'état-major de von Seydlitz qui commande la force de police germano-russe en zone soviétique; tandis que le général Hans von Salmuth, son chef d'état-major, qui se borna à distribuer cet ordre, a été condamné à vingt ans de prison par les Américains au Tribunal de Nuremberg Les procès de Nuremberg sont maintenant terminés. Le seul résultat obtenu est qu'ils ont tourné en dérision la justice américaine et rempli les Allemands de haine et de mépris pour notre hypocrisie. Un très grand universitaire américain que je rencontrai à Heidelberg exprima cette opinion que les autorités militaires américaines, lorsqu'elles pénétrèrent en Allemagne et virent les effroyables destructions causées par notre obliteration bombing, furent épouvantées en comprenant que cette révélation pouvait causer un retournement de l'opinion aux Etats-Unis et pouvait empêcher qu'on appliquât à l'Allemagne le traitement qu'on avait prévu, en éveillant la sympathie pour les vaincus et en dévoilant nos crimes de guerre. Ce fut, croit-il, la raison pour laquelle le général Eisenhower mit instantanément une flotte aérienne tout entière à la disposition des journalistes, des congressmen et des gens d'église pour leur faire voir les camps de concentration; son intention était que le spectacle des victimes d'Hitler effaçât notre sentiment de culpabilité. Il est certain qu'on réussit cette opération. Pas un grand journal américain jusqu'à présent n'a décrit les horreurs de nos bombardements ni décrit les conditions épouvantables dans lesquelles vivaient les survivants dans leurs ruines truffées de cadavres. Les lecteurs américains ont été gavés, au contraire, des seules atrocités allemandes.

Sur ce dernier point, on trouvera un jugement analogue émis par un psychologue américain dans une revue anglaise, la Word Review. M.John Duffield, spécialiste de la sociologie et de la psychologie collective, écrit, en effet, dans le numéro d'août 1946 de cette revue, sous le titre War, Peace and Unconsciousness, les phrases suivantes:

Le traitement de nos anciens ennemis est basé fondamentalement, non sur la justice, mais bien sur une neurose des masses. En effet, on a inventé à cet effet une nouvelle «justice», unilatérale. Car, n'est-il pas étrange que, sur quelque trente millions d'hommes qui ont combattu pour les Alliés, il n'y en ait pas un seul qui ait été traduit devant un tribunal pour crimes de guerre ou atrocités?
Actuellement, la guerre n'est que la violence portée à ses extrêmes limites, elle comporte d'innombrables cruautés, aussi bien préméditées qu'accidentelles. Mais l'ennemi paraît à l'opinion encore plus cruel, brutal et sadique qu'il n'est réellement, car, en plus des crimes qu'il a commis réellement, il nous apparaît comme chargé de tout l'enfer de notre propre inconscient, car toutes les tendances mauvaises que nous condamnons avec le plus de force et qui sont réprimées dans notre inconscient, nous les projetons au dehors sur lui. Et il apparaît ainsi comme un monstre inhumain, n'ayant plus rien de commun avec nous En temps de guerre, cette projection populaire de la totalité des puissances du mal sur l'ennemi est encouragée journellement par la propagande, le thème des «atrocités» devenant la principale méthode employée pour cela.

Je laisse de côté des témoignages du même ordre qu'on retrouvera facilement si on le désire: celui de Dorothy Thomson, dont les interventions à la radio sont si connues que le public français lui-même en a entendu parler; celui du major général Fuller, le grand historien militaire anglais, qui, dans ses deux ouvrages consacrés à la seconde guerre mondiale, Armament and History et World WarII, a été aussi catégorique que Freda Utley et Dorothy Thomson, et qui va même plus loin puisqu'il ne craint pas d'écrire que, la guerre totale ayant été acceptée par les Alliés et réalisée par eux selon leurs moyens propres, ceux-ci n'ont pas à reprocher aux Allemands d'avoir employé de leur côté des formes différentes de la guerre totale, mais tout aussi inévitables. Il faudrait ici citer de trop nombreux passages pour donner un aperçu exact et fidèle de la pensée du major général Fuller. Je préfère donner un résumé d'un essai, paru à Londres en 1949 et qui relève de la même inspiration. Il s'agit d'un petit livre intitulé Advance to Barbarism, que j'aurai l'occasion de citer à nouveau plus loin pour les renseignements très intéressants et très peu connus qu'il contient. Pour éviter d'en reproduire des extraits trop nombreux, je me borne à recopier ici l'analyse qui en a été faite dans un hebdomadaire canadien de langue française, L'_il de Montréal:

La guerre de 1939-45, suivant l'auteur, a marqué le retour, sans préambule ni raison apparente, à la barbarie hypocrite et masquée, pire que la barbarie franche. Il attribue à l'Angleterre surtout la responsabilité d'avoir commencé une guerre dans laquelle le non-combattant est frappé au même titre que le combattant, parfois même de préférence au combattant. Il cite les bombardements de Dresde durant les dernières semaines de la guerre, en 1945, alors que 800 bombardiers allèrent pilonner et incendier cette ville que l'on savait être exclusivement remplie de femmes et d'enfants fugitifs de la Russie soviétique, et décrit celui de Hambourg, où de petits enfants allèrent se jeter dans les canaux pour ne pas rôtir; il cite aussi l'usage inutile de la bombe atomique sur Hiroshima et Nagasaki. Puis il étudie la transformation de millions de prisonniers de guerre en esclaves véritables, état de choses qui dure encore presque quatre ans après la fin des hostilités, la confiscation pure et simple de la propriété des non-combattants, etc.
Tout cela, dit-il, n'a pas été fait spontanément. Il cite l'aveu public de Churchill criant: «Il n'y a pas de limite de violence que nous ne franchirons pas dans cette guerre». Il cite le fils de Roosevelt dans son rapport sur la conférence de Téhéran, où, après avoir vidé plusieurs bouteilles de vodka, Staline proposa de faire fusiller sans aucune forme, pour la beauté du spectacle, 50.000 chefs ennemis; Churchill, qui avait ingurgité beaucoup de cognac, déclara qu'il faudrait mettre au point une sorte de procès; Roosevelt, qui avait bu quelques douzaines de cocktails Martini, suggéra à Staline de réduire son chiffre à 49 500, ce qui ferait paraître le nombre total moins grand. C'est exactement de même, dit-il, que discutaient les satrapes païens dans 1'antiquité.
L'auteur analyse ensuite, comme prototype de tous les autres procès, le plus connu de tous, celui de Nuremberg, où, pour la première fois dans l'histoire civilisée, les chefs militaires et navals ennemis furent condamnés à mort pour avoir servi leur pays, pour le crime d'avoir été perdants. Il démontre comment ce tribunal n'avait aucune juridiction, aucun mode légal pour le diriger, aucune offense préalablement qualifiée à juger, aucune garantie de justice puisque les vainqueurs étaient à la fois accusateurs et juges des vaincus; de plus, les accusés ne pouvaient choisir des avocats que parmi leurs ennemis politiques et n'avaient pas accès à leurs propres archives pour se défendre.
L'auteur conclut que ce simulacre de procès (mock-trial) restera comme une dégradation de la justice, de la légalité et de la morale aussi longtemps qu'il n'aura pas été confirmé par un véritable tribunal international, ayant juridiction, neutre et impartial. Ce qui paraît indiquer un commencement de regret, et de réprobation de la farce de Nuremberg, dit-il, c'est qu'à peine neuf mois plus tard l'Angleterre et les Etats-Unis ont officiellement protesté contre le procès fait à Nicolas Petkov en Bulgarie, parce que Petkov, anticommuniste, était jugé par des juges et assesseurs communistes; pourtant ce tribunal avait parfaite juridiction; les offenses jugées étaient préalablement codifiées; tout ce qui manquait au procès était la garantie d'impartialité et c'était suffisant pour rendre immorale, injuste et illégale la sentence prononcée contre Petkov.
A Nuremberg, toutes les conditions essentielles de justice, de légalité et de moralité étaient absentes. L'auteur conclut que si une entente valable et stable n'est pas faite immédiatement pour un retour sérieux aux usages de la guerre et de l'après-guerre suivant les données de la civilisation chrétienne, la prochaine guerre plongera tous les pays dans un abîme de sauvagerie que l'humanité n'a pas encore connu.

Toutes ces références prouvent suffisamment que, dès maintenant, toute une partie de l'opinion mondiale a pris position dans cette question avec une netteté et une force qui sont généralement méconnues ou plutôt inconnues, dans notre pays, pour les raisons que j'ai déjà dites. Mais, de plus hautes autorités n'ont pas dédaigné de faire connaître leur opinion, ou du moins de la laisser connaître, par des interprètes officieusement autorisés. Aux ouvrages dont je vais parler maintenant on trouvera un ton un peu différent. Ils sont moins violents, moins catégoriques que ceux dont je viens de mentionner l'existence; mais ils sont tout aussi graves par leurs réserves, modestement formulées et par le caractère de ceux qui les ont écrits. Il est donc important que ces avertissements, ces mises en garde, qui deviennent, par moments, de véritables condamnations, trouvent place également dans cette documentation.
En Italie, le Père jésuite S.Lener publie à la maison d'édition officieuse Civiltà Cattolica une étude intitulée Crimini di guerra e delitti contro l'umanità, qui semble bien représenter, en raison de la personnalité de l'auteur et de l'éditeur, une opinion tout au moins reconnue comme acceptable par les autorités vaticanes. L'auteur commence, du reste, par rappeler les termes du message radiodiffusé de S.S. PieXII, à Noël 1945:

Personne, à coup sûr, ne pense, déclare ce message, à désarmer la justice à l'égard de ceux qui ont profité de 1'état de guerre pour commettre des crimes de droit commun authentiques et prouvés, auxquels les prétendues nécessités militaires pouvaient au plus offrir un prétexte, mais nullement une justification. Mais s'il est question de juger et de punir, non plus des individus isolés, mais collectivement une communauté tout entière, qui pourrait refuser de voir dans un semblable procédé une violation des lois qui président à tous les jugements humains? Ceux qui exigent une expiation pour les fautes commises au moyen d'une juste punition des criminels en raison de leurs crimes doivent bien prendre garde à ne pas faire eux-mêmes ce qu'ils punissent chez les autres sous le nom de délit ou de crime.

Le P.Lener commente cette position du souverain pontife, en se prononçant tout d'abord contre le caractère rétroactif des condamnations de Nuremberg. Je cite le passage, particulièrement clair et fort au point de vue juridique:

Puisque, en fait, il n'existait pas une loi pénale internationale reconnue par tous les Etats intéressés et puisque le droit pénal interne de chacun des Etats, ou ne s'appliquait pas aux faits, ou se révélait inapplicable, le principe nullum crimen sine prævia lege poenali apparaît avoir été violé sans aucun doute, soit qu'on ait promulgué hic et nunc des lois codifiant la répression projetée (comme c'est le cas dans le Statut p romulgué à Londres), soit qu'on étende exceptionnellement la sphère d'efficacité du droit interne, soit enfin qu'on procède avec une espèce de blanc-seing pénal. Est-il possible, dans de telles conditions, de réaliser une juste répression, lorsqu'elle est en contradiction évidente avec un principe retenu comme un canon fondamental de la justice pénale? L'aphorisme nullum crimen sine prævia lege poenali, dans le sens qui lui est donné communément de nos jours, implique une triple limitation du pouvoir répressif: 1·l'impossibilité de punir un acte non désigné par la loi comme coupable; 2·l'impossibilité d'appliquer par analogie la loi pénale à un acte non spécifiquement visé par elle; 3·l'impossibilité de lois pénales rétroactives Toute dérogation à ces règles, affirme solennellement la conférence de criminologie de Rio-de-Janeiro (1936), «introduirait une cause certaine d'anarchie et un mal d'une extrême gravité»; il pourrait même en résulter «un crime aussi néfaste que l'abolition de toutes les peines et de tous les délits»...

Le P.Lener insiste ensuite sur la valeur qu'aurait dû avoir constamment l'excuse absolutoire des subordonnés et exécutants, pratiquement reconnue actuellement par nos tribunaux militaires. Je cite, également en raison de la sûreté du raisonnement et de la documentation:

A supposer qu'on admette l'évidence efficace du droit humain, et par conséquent la nullité des lois nazies qui sont en contradiction avec lui, comment refuser à celles-ci, tout au moins, l'effet de rendre incertains les préceptes prohibitifs du droit commun, sinon pour ceux qui occupent un grade élevé dans l'Etat, du moins pour les subordonnés, les soldats, les policiers, etc.? Les principes généraux pourront bien avoir toute leur valeur, mais seulement pour ceux qui sont en mesure d'en connaître l'existence, l'autorité indéfectible, et de comprendre comment ils peuvent agir sur les différentes parties d'un ensemble juridique, mais non pour la masse des fonctionnaires qui ne connaît que la partie du droit relative à leurs propres devoirs et qui sait bien que les lois spéciales ou exceptionnelles dérogent nécessairement au droit commun. Comment est-il possible d'affirmer qu'un droit formellement abrogé doit conserver immuablement dans leurs consciences sa vigueur originelle?

Enfin, selon le P.Lener, ce sont tous les belligérants indistinctement qui auraient dû rendre des comptes:

Le droit humain, en fait, ne peut pas ne pas s'appliquer dans la même mesure à toutes les parties en conflit. Vainqueurs et vaincus doivent répondre également de leurs transgressions non justifiables. Si la défaite allemande se présente comme la condition de fait qui permet pratiquement de satisfaire les exigences de justice nées des innombrables crimes contre l'humanité perpétrés par les nazis chez eux et à l'étranger, celle-ci n'a rien à voir avec la définition intrinsèque des crimes eux-mêmes. Le peuple allemand lui-même, en cas de victoire, aurait eu le devoir de punir les responsables de ces crimes; de même aussi les Russes, les Anglais et les Américains devraient permettre aujourd'hui même que les accusations de crimes contre l'humanité dirigées contre leurs représentants et leurs subordonnés (je pense aux fameuses troupes marocaines) soient publiquement discutées et portées devant des juges impartiaux. Celui qui invoque le droit humain pour punir les crimes d'autrui sous une forme légale ne peut en refuser l'application à son détriment.

D'où sa conclusion, extrêmement nette et vigoureuse, et d'autant plus frappante pour le lecteur que tout l'ouvrage est conduit avec plus de sérénité et d'impartialité:

Il est licite d'affirmer en toute certitude le caractère illégal du Tribunal de Nuremberg, tel qu'il a été constitué sur la base de l'accord de Londres D'après le contenu même de la notion de justice, ce tribunal ne peut être reconnu comme juge Répétons-le: celui qui juge en sa propre cause n'est pas seulement un juge suspect et par là même récusable (comme aussi s'il a des intérêts connexes avec une des parties, ou des liens de famille, ou une intime amitié, etc.) mais encore et tout simplement, il n'est pas juge du tout. Et par suite, s'il fait, en fait, fonction de juge, le caractère illégal du procès et la nullité de la sentence, selon les principes généraux du droit, sont absolus et irréparables Dans la deuxième guerre, les mauvais traitements contre les prisonniers ont eu lieu partout. En Russie et en Algérie surtout, la faim a fait des ravages; et pas seulement la faim. Dans certains dominions anglais l'honneur des prisonniers a été souillé au-delà de toute imagination humaine. Et les fosses de Katyn? Ici l'accusation était précise et fondée sur des documents. Et les bombardements anglo-américains eux-mêmes n'ont-ils pas dépassé évidemment toute limite de représailles acceptables? On pense aux innombrables villes italiennes presque entièrement détruites sous prétexte de représailles pour les deux cents appareils inefficaces qui auraient dû bombarder Londres. On pense aux mitraillages à basse altitude de civils et même de petits enfants occupés à des jeux innocents, aux aviateurs ivres et aux crimes ignobles de certaines troupes de couleur (les Marocains), aux pillages et aux viols des isolés. Mais le comble de l'atrocité et de l'humanité a été définitivement atteint dans notre siècle par les bombes atomiques lancées sur des cités civiles surpeuplées, comme Nagasaki ou Hiroshima (et, selon certains journaux, après l'offre de reddition inconditionnelle et non pour des raisons militaires). Est-ce là autre chose que la terre brûlée, autre chose que des destructions sans discrimination (dont on fait un chef d'accusation contre les Allemands), autre chose que des moyens d'attaque disproportionnés et impossibles à limiter, et, en tant que tels, interdits par le droit de la guerre et par le droit naturel?

La prise de position du clergé protestant n'a pas été moins nette que celle du clergé catholique. On en trouvera le témoignage dans un article du pasteur Jacques Ellul paru en août 1947 dans la revue théologique et ecclésiastique Verbum Caro, de Neuchâtel. L'auteur commence par des déclarations catégoriques sur la valeur du procès lui-même:

Il faut bien reconnaître que, malgré l'imagination et la bonne volonté des juges et des procureurs, le procès de Nuremberg était insoutenable juridiquement. Ce qui le manifeste plus que tout, c'est la substitution, dans toutes les Revues qui lui ont consacré une étude, d'indignations vengeresses à des raisons juridiques.

Et il ajoute, quelques pages plus loin:

Ainsi, de quelque côté que l'on se tourne, sur le terrain juridique, on ne constate que vanité, incertitude, incohérence. On ne peut attribuer aucun fondement juridique valable à ce procès, aucune valeur de droit à la condamnation.


Et plus loin:

Pourquoi avoir joué toute cette parade? Pourquoi avoir voulu justifier la procédure et la sentence précisément par des arguments juridiques? Pourquoi avoir voulu élaborer une théorie de ce procès? Pourquoi avoir déclaré que tout cela n'était pas arbitraire, mais fondé en droit? Pourquoi avoir accumulé toutes ces preuves, inutiles hors d'un régime de droit? Pourquoi ces faux semblants et cette comédie de juridiction régulière, de plaidoiries et de réquisitoires? Une seule réponse, qui est dure, c'est un symbole de l'hypocrisie où s'enlisent les démocraties.

M.Jacques Ellul va même beaucoup plus loin. Il ne voit aucune différence entre l'attitude des Alliés et celle de l'Allemagne. Tous les Etats se valent. Les lois de la puissance et de l'instinct de conservation sont les mêmes pour tous. Toute puissance politique est établie contre l'homme. L'hypocrisie seule y met des nuances:

Quant à la préparation de la guerre, aucune nation n'est exempte de ce crime. Qu'il s'agisse de la France avec le plan d'offensive par la Belgique, du conseil de la guerre en 1936, qu'il s'agisse de 1'U.R.S.S. avec le «plan quinquennal de l'Armée rouge» Quel Etat ne prépare pas la guerre? Le crime contre la paix est un mot qui caractérise l'attitude de tous les Etats, de tous les gouvernements, et il apparaît absolument inouï de l'imputer aux représentants d'un seul d'entre eux.

Et encore:

L'Etat-nation apparaît aux yeux de tous comme la valeur suprême. L'intérêt de l'Etat-nation est placé au premier plan par 1'U.R.S.S. comme par les U.S.A... Ce nsest ni le nazisme, ni l'espace vital, ni le Fuhrer prinzip qui sont des causes: ils se bornent à colorer les effets quand les causes sont admises en réalité par les démocraties et les Soviets comme par les autres. Avec une autre idéologie spécifique~ il y aurait seulement un changement de catégories de victimes... En réalité les nazis ont été jusqu'au bout des conséquences contenues dans les principes admis universellement et ils l'ont fait avant les autres.

On me dira que ces témoins ont plus d'autorité que de compétence. A quoi je répondrai d'abord que c'est leur autorité qui m'importe. Je cherche le verdict des honnêtes gens. C'est comme leurs représentants que je les fais comparaître. Mais je ne veux pas non plus me trouver sans juriste: et, quoique ma bibliographie, comme on dit dans nos écoles, ne soit pas sur ce point fort longue et fort savante, il faut que je cite ici une sorte de consultation, dont l'auteur me paraît sans parti-pris puisqu'il est professeur de droit international à l'Université de Londres. Voici donc ce qu'écrit un spécialiste aussi considérable et aussi documenté que le professeur H..A.Smith, dont je viens de citer le titre, dans un article sur le procès de Nuremberg paru dans la revue Free Europe en juillet 1946. Je cite l'article in extenso, en raison de l'importance de ses références et de son caractère technique:

L'essence de ce que nous appelons la «règle du droit» réside dans la soumission du pouvoir politique suprême à une autorité qui lui est supérieure. Pour Dicey, aux dernières années du siècle passé, ceci paraissait le principe de base de notre constitution, et aux Etats-Unis, bien que leurs méthodes soient différentes des nôtres, le même principe est admis comme fondamental. Ceci n'est pas une trouvaille particulière à la pensée politique anglosaxonne, car le fondement en est la théologie morale du christianisme, et pour cette raison le principe a été rejeté par des systèmes politiques tels que ceux des Marxistes ou des Nazis, qui ont été bâtis de parti-pris sur une base non-chrétienne.
La théorie adverse refuse à la loi une autorité indépendante qui lui soit propre et la considère simplement comme l'instrument de l'autorité politique. Les cours de justice prennent alors place parmi les instances subordonnées dont le rôle est d'appuyer la volonté des quelques hommes en qui un système totalitaire investit l'exercice du pouvoir suprême. Il est absolument impossible à de tels gouvernants de faire quoi que ce soit d'illégal, du moment que «la loi» elle-même est la simple expression de ce qui se trouve être leur bon plaisir du moment. Pour cette raison, la règle de tous les systèmes civilisés, selon laquelle un homme ne peut être puni pour un acte qui ne constituait pas un délit au temps où il a été commis, cesse alors d'avoir la moindre signification, puisqu'un acte qui déplaît à l'autorité suprême devient automatiquement un délit et peut être puni légitimement. C'est pourquoi Hitler agissait en parfaite conformité avec les principes nazi et marxiste quand il donnait l'ordre à ses juges de condamner dans tous les cas «où une opinion publique saine» (Volksgesundheit) exigeait une punition, quand bien même les faits ne révélaient aucun délit réprimé par le Code pénal allemand. Le système de justice soviétique admet la même doctrine.
Jusqu'ici nous avons seulement parlé du droit intérieur ou «civil», mais dans cet article nous avons surtout à nous occuper du droit des nations. Du moment que ce droit est chrétien, tant par son origine historique que par son contenu essentiel, il doit tout d'abord, nécessairement, accepter pour principe que la fonction la plus haute du droit est d'imposer des limites à l'exercice du pouvoir. Les canonistes qui ont posé les bases du droit international l'envisageaient comme un corps de règles qui liait par son autorité les princes indépendants qui ne reconnaissaient pas de supérieur sur terre, et ce principe fut pleinement agréé par leurs successeurs laïcs jusqu'à nos jours. Le droit des nations ainsi envisagé formait un étalon convenu de la conduite internationale: les gouvernants des états en litige étaient tous disposés à y faire appel. La faiblesse du système résidait, et réside encore, non pas dans 1'étalon commun lui-même, mais dans l'absence d'une autorité capable de déterminer son application dans les cas particuliers. Ce principe de la valeur en soi et de l'autorité du droit international n'a pas été récusé jusqu à ce que les Bolcheviques aient pris le pouvoir en Russie.
En ceci réside le véritable point litigieux que présentent les Procès de Nuremberg. Acceptons-nous le principe de l'autorité indépendante du droit international, ou bien pensons-nous que les vainqueurs d'une guerre ont le droit de modeler à nouveau la loi de façon à pouvoir imposer leur volonté à la personne de leurs ennemis vaincus?
Des critiques, telles que celles dont on a toléré la parution dans la presse (et beaucoup ont été censurées), ne font que refléter faiblement l'anxiété que ressentent à propos de cette question primordiale les gens qui réfléchissent. Pour la plupart, les commentateurs se sont attachés au compte rendu de mauvaise foi qui a été fait des débats, et il est malheureusement vrai que la presse a pleinement usé du fait que les débats n'étaient pas protégés par la règle du droit anglais qui punit l'offense au tribunal (1). Mais ceci est relativement un sujet mineur. La véritable question est de savoir si le procès dans son ensemble est conforme au droit international.

Dans la Convention de la S.D.N., dans la Charte de l'O.N.U. et dans beaucoup d'autres documents solennels, notre Gouvernement, en compagnie de ceux des autres Etats civilisés, a affirmé à plusieurs reprises sa fidélité à l'autorité du droit international. Pour un exposé officiel du principe de ce droit, nous pouvons nous en référer au Statut de la Cour internationale de justice, qui figure en annexe à la Charte de l'O.N.U. Là, nous trouvons écrit que la Cour doit fonder ses jugements sur les conventions internationales, la coutume internationale, et «les principes généraux du droit reconnus par les nations civilisées» (art.36). Les termes employés sont les mêmes que ceux du Statut de la Cour Permanente de Justice Internationale, dont le nouveau tribunal est le successeur, et ils ont forcément la même signification que lorsqu'ils furent rédigés pour la première fois en 1920. La question que nous avons à nous poser est de savoir si les Procès de Nuremberg sont conformes à l'acceptation de ce canon.
Il est bon de dire qu'en 1920 le principe qu'aucun homme ne peut être puni pour un acte qui n'était pas un délit selon la loi à l'époque où il a été commis, était commun à tous les peuples civilisés. Il est exprimé dans tous les codes criminels européens, y compris l'allemand. Pour établir formellement ce principe fondamental, nous pouvons reprendre l'article 4 du Code pénal français:
«Nulle contravention, nul délit, nul crime, ne peuvent être punis de peines qui n'étaient pas prononcées par la loi avant qu'ils fussent commis.»
Si cette loi était un «des principes généraux du droit reconnu par toutes les nations civilisées», il s'ensuit qu'elle faisait partie du droit international, et qu'un procès qui viole cette loi est illégal au point de vue du droit international. Nous n'avons pas besoin de perdre du temps à réfuter la justification fournie par ceux qui cherchent des excuses à Nuremberg en disant qu'on est autorisé à négliger la loi dans le cas où les accusés savaient que ce qu'ils faisaient était moralement mauvais: car il est évident qu'une telle exception démolit complètement la loi elle-même.
Tout de suite, nous devons nous occuper de la «Charte» du tribunal et de l'Acte d'accusation préparé en s'appuyant sur cette «Charte». La place ne nous permet pas de citer entièrement, mais il suffit de dire que chacun de ces documents se divise en deux parties principales, qui traitent respectivement des préparatifs de guerre et de la conduite de la guerre. Sous le premier chef, les prévenus sont accusés d'avoir conspiré pour entreprendre «une guerre d'agression». Sous le second, ils sont accusés de «crimes de guerre» et de «crimes contre l'humanité».
Pour le premier, on peut dire en toute certitude qu'aucun légiste n'aurait osé dire en 1939 que les gouvernants d'un Etat pouvaient être punis comme criminels individuels pour avoir préparé une guerre d'agression. La question a été débattue dans le cas de Napoléon, et amena précisément la même conclusion; mais en 1815, le Gouvernement britannique de l'époque préféra suivre l'opinion des juristes plutôt que les clameurs de la foule. Après l'armistice de 1918, le Gouvernement des Pays-Bas agit selon le même principe en refusant de livrer l'Empereur d'Allemagne, qui avait été accusé dans le Traité de Versailles de «délit suprême contre la morale internationale et la sainteté des traités». Les Alliés, sachant qu'ils étaient sur un sol mouvant, n'insistèrent pas avec leur demande, et on laissa tomber la question. Un instant de réflexion suffira pour montrer que, dans ce domaine, comme dans beaucoup d'autres, la loi est plus sage que les passions fugitives des hommes, et les hommes d'Etat de l'avenir auront à juste titre de bonnes raisons pour déplorer le précédent que Nuremberg a établi.
Le précédent, établi dans toute sa simplicité, revient à ceci: les membres d'un gouvernement qui décide de s'engager dans une guerre prendront leur décision tout en sachant qu'ils courent le risque d'être pendus à la discrétion de leurs ennemis s'ils ne la gagnent pas. Comme il est totalement impossible d'arriver à une définition généralement acceptée de l'«agression», il est clair que, dans l'avenir, les vainqueurs, et eux seuls, peuvent décider si l'Etat vaincu avait une raison suffisante de déclarer la guerre.
La loi cesse d'être la loi, si le succès peut justifier qu'on la viole. La preuve la plus simple que 1'«agression» est un crime seulement pour le vaincu, le cas de la Russie le fournit. En décembre 1939, l'Union soviétique fut solennellement expulsée de la Société des Nations pour une attaque non provoquée contre la Finlande durant le mois précédent. Telle fut l'unanime décision d'un corps international, décision à laquelle notre propre Gouvernement prit part, et on peut rappeler qu'à ce moment nous étions même prêts à aider la résistance de la Finlande contre la Russie, si la Suède avait accepté de nous donner le droit de passage. Si nous avons assez de courage pour demander maintenant comment un acte qui constituait un crime capital de la part de certains en septembre, est devenu totalement innocent lorsqu'il est commis par d'autres en novembre, la réponse ne sera que trop évidente. La violation de la «loi», couronnée par le succès, transporte le délinquant du banc des accusés au banc des juges.
Pour ce qui est de l'accusation qui traite de «crimes de guerre» et de «crimes contre l'humanité», il est nécessaire d'être légèrement plus technique. De la seconde formule, tout ce qui a besoin d'être dit, c'est qu'elle était auparavant inconnue du droit, et qu'elle ressemble à s'y méprendre à la doctrine de Hitler sur les actes «contraires à une saine opinion publique». L'expression «crimes de guerre», au contraire, a un sens légalement défini, sur lequel toutes les autorités sont solidement d'accord.
Dans le Manual of Military Law anglais (ch.XIX §441), il est dit que «le terme» «crime de guerre» est l'expression technique pour un acte de soldats ou de civils ennemis qui mérite d'être châtié en cas de capture des délinquants. Ce terme s'emploie couramment, mais on doit faire remarquer avec insistance qu'il est employé dans le sens militaire et technique, et le sens légal seulement, et non dans le sens moral.
Le paragraphe qui suit explique avec plus de précision ce qu'on entend:

«§442. Les crimes de guerre peuvent être divisés en quatre catégories différentes:
1)Violation des règles reconnues de conduite de la guerre par des membres des forces armées;
2)Actes hostiles illégitimes commis en armes par des individus qui ne sont pas membres des forces armées;
3)Espionnage et trahison de guerre;
4)Maraudage.»

Tout le sujet des crimes de guerre est traité sous la rubrique générale «Means of Securing Legitimate Warfare» (Moyens de garantir la conduite légale de la guerre) (§435-451), le point capital étant que le droit de châtier des individus dans certains cas est un moyen d'obliger l'ennemi à observer les lois de la guerre. De nombreux exemples sont donnés (§443) pour illustrer la quadruple classification: le trait commun de ces exemples étant qu'ils sont tous tirés du champ des opérations militaires réelles. Le seul but est de punir des individus exclusivement pour des actes dont ils sont individuellement responsables; pour cette raison, l'énumération des exemples est suivie d'un principe qu'il faut citer intégralement:
«Il est important, cependant, de faire remarquer que les membres des forces armées qui commettent des violations des lois reconnues de la guerre qui sont ordonnées par leur Gouvernement ou par leur commandement, ne sont pas criminels de guerre, et ne peuvent être en conséquence punis par l'ennemi. L'ennemi peut punir les fonctionnaires ou commandants responsables de tels ordres, s'ils tombent entre ses mains, mais autrement il peut seulement recourir aux autres moyens d'obtenir réparation qui sont exposés dans ce chapitre» (ceux-ci sont donnés dans le §438: plainte à l'ennemi ou aux neutres, représailles et prise d'otages).
Ce paragraphe expose ce qui est communément connu sous le nom de «moyen de défense tiré des ordres supérieurs». La même loi existe dans le Manuel américain correspondant, et le principe est évidemment de première importance. Dans le droit des nations tel qu'il est clairement exprimé dans l'article3 de la Quatrième Convention de La Haye de 1907, l'Etat en tant que tel est rendu responsable de la correction générale de la conduite de ses forces armées, le droit de punir des individus étant strictement limité aux quatre catégories de cas spécifiés ci-dessus. Sans une telle loi, on ne pourrait maintenir qu'avec peine la discipline des armées, et il n'est pas surprenant qu'un grand nombre d'officiers supérieurs soient sérieusement troublés par le déroulement des procès de Nuremberg. Le sens commun en la matière est qu'un homme ne peut être châtié en bonne justice pour avoir exécuté un ordre (même odieux) auquel il lui a été pratiquement impossible de résister.
Le paragraphe que nous venons de citer a été suffisant pour assurer l'acquittement de la plupart des accusés des procès de Leipzig après la guerre de 1914-1918, et pourrait également être une défense suffisante contre la plupart des charges élevées à Nuremberg. Ceci nous amène à un sujet très troublant. En avril 1944, tandis que l'on préparait activement le procès des criminels de guerre à Londres, le War Office changea les termes du paragraphe 443 de manière à supprimer le moyen de défense tiré des ordres supérieurs. Les nouveaux termes sont extraits d'un article du professeur Lauterpacht de Cambridge dans le volume 1944 du British Year Book of International Law (Annuaire anglais de droit international), où l'auteur dit:


«La nature nettement illégale de l'ordre illégale si l'on se réfère aux principes généralement reconnus du droit international qui s'identifient avec les puissantes injonctions de l'humanité de façon à être évidents pour toute personne d'intelligence ordinaire rend le moyen de défense tiré des ordres supérieurs irrecevable.»


En conséquence, le subordonné est maintenant exposé à être pendu par l'ennemi après la guerre, s'il ne prend le risque durant le déroulement de la guerre de refuser obéissance à un ordre qu'il considère comme moralement mauvais. Peut-être n'est-il pas déloyal de douter que le professeur Lauterpacht, qui a mérité la situation d'universitaire distingué dans ce pays, eût osé agir en conformité avec la doctrine exposée par lui aujourd'hui, au temps où il servait dans l'armée autrichienne durant la Première Guerre mondiale
Le point important n'est pas de savoir si les nouveaux termes sont ou ne sont pas préférables aux anciens. Tout criminaliste sait que l'invocation de coercition présente de très graves problèmes pour la défense et qu'il y a matière à de grandes divergences d'opinion. Ce qui est d'une importance vitale, c'est que ce texte ait pu être changé au moment où l'on préparait l'accusation et après que beaucoup des actes incriminés eurent été commis. Supprimer un terrain de défense primordial de cette manière est totalement incompatible avec nos traditions de justice.
On a beaucoup parlé dans la presse de la «probité» du procès et on peut admettre que le juge qui présidait a mené les débats dans le meilleur esprit de notre magistrature. L'improbité ne réside pas dans la salle d'audience, mais en dehors d'elle. La «Charte» a faussé la balance en chargeant lourdement un des plateaux au détriment des accusés avant le début du procès, car la loi qui régit le procès est contenue dans un document préparé par l'accusation. Par ce document, les principaux moyens de défense ont été supprimés à l'avance et, de ce fait, ils n'ont pu être utilisés par les accusés. On n'a pas permis non plus aux accusés de récuser la juridiction du tribunal ni de soutenir qu'ils n'avaient fait qu'appliquer des ordres supérieurs. On ne leur a pas davantage permis de plaider que Staline a entrepris une guerre d'agression, ni que les camps de concentration russes sont dirigés avec une grande brutalité.
Nous pouvons tous admettre que les accusés constituèrent un groupe de très méchants hommes, mais le véritable litige n'est pas dans le sort personnel de quelques individus. Ce qui est en cause dans ce procès, c'est l'autorité du droit international et les idéaux de droit et de justice dont nous sommes les garants et pour lesquels nous avons fait profession de lutter.

Tel est l'état de l'opinion mondiale, trois ans après le procès de Nuremberg. On s'est bien gardé de nous le laisser savoir. Nous croyons, en France, et nous continuons à croire que tout le monde approuve avec infiniment de respect tout ce qui s'est fait en France depuis 1944. On étonnerait beaucoup de Français en leur découvrant la profondeur du mépris dans lequel s'est enfoncé notre malheureux pays. Ce n'est qu'un cas particulier du dégoût qu'inspire à des millions d'hommes l'hypocrisie démocratique. On pourrait faire chaque semaine un journal, rien qu'en découpant dans la presse internationale ce que les journaux officieux d'Europe se gardent bien de citer.
Nous vivons dans une euphorie intellectuelle de grands malades. On ménage apparemment en nous des cerveaux chancelants que la brusque vue de la réalité épouvanterait autant qu'un juge d'instruction quand il soulève un coin du voile. De temps en temps, nos penseurs officiels s'avisent qu'on ne lit pas nos livres et qu'on ne les traduit pas: ils ont la naïveté de s'en étonner. Ce qui serait miraculeux ce serait qu'on s'obstinât à lire ce qui s'imprime à Paris, élucubrations qui ressemblent beaucoup aux conversations convenables qu'on tient dans les bonnes maisons, avec juste ce qu'il faut d'obscénité pour ne pas s'endormir. Nous avons cru que nous pouvions conserver comme la Grèce une sorte de royauté intellectuelle et nous sommes partis à la conquête du vainqueur. Mais tel est le résultat de notre peur de la vérité: la littérature française a autant d'importance aujourd'hui que l'armée française. Le pays de Voltaire condamne Calas tous les jours à son petit déjeuner. C'est bien commode d'avoir affaire à des monstres. Cela permet une indifférence facile. Nous avons le culte de la facilité, en politique, en stratégie, en finance: en pensée aussi. Mais les Lois sont des déesses impassibles: celles que nous avons faites nous jugent. Nous avons écrit les Tables de la décadence. Nous n'en sortirons qu'en ayant le courage de regarder en face les visages immobiles et graves qui nous reprochent notre silence.

NOTES

(1) Par cette règle, il est interdit, en Angleterre, de préjuger de la décision d'un tribunal, et, par exemple, d'écrire d'un meurtrier ou d'un incendiaire, même s'il a avoué, qu'il est un meurtrier ou un incendiaire, avant que le tribunal en ait décidé ainsi. (Note de l'éditeur.)


Fin de la première partie

PRÉCÉDENT / SUIVANT


Ce texte est extrait de Nuremberg II ou les Faux monnayeurs, de Maurice Bardèche, paru à Paris, en 1950, aux editions Les Sept Couleurs. L'auteur est décédé en 1998.


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