La Chine est un vaste pays de 465 millions d'habitants qui ne s'accroissent, chaque année, que de 2 millions, grâce à une effroyable mortalité infantile qui intervient comme un élément modérateur providentiel. Cette masse énorme vivait, et vit encore, dans une misère dont aucun Européen ne peut avoir la moindre idée.
Cependant, on évalue la capacité de production de ses gisements de charbon à quelque 260 milliards de tonnes. Encore ne faut-il tenir aucun compte des optimistes qui ne craignent pas d'avancer un chiffre tournant autour de 10.000 milliards !
Le bassin minier le plus important se trouve dans la province de Chansi et il embrasse un superficie de 22.000 km2, soit quatre fois celle du bassin de la Ruhr : son contenu est évalué à 128 milliards de tonnes. Mais, presque toutes les autres provinces contiennent de la houille et, notamment, le Chantoung.
Pour le fer, en revanche, la Chine est relativement pauvre. Ses réserves sont évaluées à 2 milliards de tonnes seulement, soit le cinquième des réserves certaines des Etats-Unis.
Pour le pétrole, ressources assez mal connues. On suppose qu'il s'en trouve dans de nombreuses régions, et surtout en Mongolie. Jusqu'à ce jour, on sait que les Russes exploitent des puits dans le Sin-Kiang et que la production totale de la Chine, en une année, est l'équivalent de celle des Etats-Unis en une heure et demie...
Mais, pour la production de la force hydraulique, étant donné l'immense débit de ses cours d'eau, les possibilités de la Chine sont pratiquement illimitées.
Voilà donc 465 millions de personnes qui vivent sur un trésor inexploité. Toutes ces richesses n'étant pas libérées par le travail des hommes, comme on dit en économie politique, ne sont pas des richesses.
Tout le drame de la Chine vient de là.
Le problème de la libération des richesses
Pour exploiter ce sous-sol si extraordinairement riche, la Chine avait besoin d'être équipée et, pour être équipée, de l'aide des nations industriellement plus avancées. Dans la mesure où celles-ci y consentirent, ce ne fut jamais qu'à la condition ou bien d'exploiter elles-mêmes ou bien de contrôler à la fois l'équipement et la production qui en résulterait.
La première manière répugnait à la fois à l'opinion chinoise traditionaliste et hostile, par principe, à tout ce qui venait de l'étranger. Il faut dire, aussi, que les Chinois avaient sous les yeux l'exemple du Sud-Est Asiatique où "les Blancs" avaient développé de magnifiques plantations d'Hévéas dont ils tiraient tous les bénéfices sans jamais songer, ni à payer correctement la main-d'oeuvre, ni à construire la moindre cabane pour l'abriter...
La seconde manière eût été plus acceptable. Mais, les Américains et les Anglais qui l'essayèrent prirent toujours soin de contrôler les crédits qu'ils accordèrent, de telle sorte que leurs investissements fussent dirigés sur des secteurs de l'économie chinoise qui ne risquaient pas d'en faire une concurrente sérieuse sur les marchés où ils entendaient rester les maîtres. Ainsi s'explique, par exemple, qu'un gisement comme celui de Fushun, en Mandchourie, qui est à ciel ouvert, par conséquent facilement exploitable, qui a 140 mètres d'épaisseur, dit-on, ne produise que 10 millions de tonnes par an : il ne fallait concurrencer ni l'Amérique, ni l'Angleterre sur les marchés du charbon. Le même raisonnement s'applique à l'Etat rudimentaire des installations pétrolifères.
A ce jour, les Américains ont perdu 5 milliards de dollars et les Anglais près de cinq cent millions de livres sterling que Tchang Kai Chek a utilisés à faire vivre un immense sérail de profiteurs.
Et la Chine est restée au stade de notre moyen âge.
Le jour où les Américains et les Anglais se sont aperçus que la misère engendrait des courants révolutionnaires, pas un instant, ils n'ont pensé que la raison en était leur politique de crédit dirigé et, principalement, vers la camarilla militaire. A ce moment, ils ont "lâché" Tchang et... les Russes sont entrés en scène avec 300 millions de dollars promis à son concurrent Mao Tsé Tung, chef du mouvement révolutionnaire.
Or, géographiquement et intellectuellement, la Chine était plus proche de la Russie que de l'Amérique ou de l'Angleterre. Et l'intelligentsia chinoise était beaucoup plus sensible aux résultats obtenus par le bolchévisme en Russie, que, par exemple, aux inaccessibles "grille - n'importe quoi" électriques qui sont les éléments du bonheur familial américain. Le courant révolutionnaire, représenté par Mao, se révéla aussi très habile à mettre en évidence aux yeux de l'intelligentsia chinoise que, de 1928 à la veille de la guerre, la Russie avait augmenté de moitié sa production de charbon, triplé celle du pétrole, quintuplé celle de l'acier et décuplé celle du courant électrique, tout en promettant, par les mêmes moyens, les mêmes résultats à la Chine. a tout cela, Américains et Anglais ne pouvaient opposer que la faillite lamentable de Tchang-Kaï-Check.
Ainsi fut assuré le succès de Mao.
La soupape de sécurité
Il est probable que les choses eussent pu prendre un tout autre cours. En matière d'industrialisation, ce qui précède le démontre assez : Américains et Anglais ont eu tort de vouloir faire de la Chine un marché qui consomme et ne produit pas. La chose, qui ne fut jamais concevable, l'est moins encore aujourd'hui que jamais. Du moins pouvaient-ils, s'ils en avaient décidé ainsi, en faire un marché qui achète des produits agricoles, et y développer l'agriculture. Cette solution, encore, eût été bâtarde, mais pour un temps plus ou moins bref, au terme duquel, il eût fallu en trouver une autre, elle eût soustrait cette importante fraction de l'Asie à l'influence bolchéviste.
La Chine se prêtait admirablement à une expérience de ce genre si on en croit, par exemple, le grand écrivain qu'est Pearl Buck :
"La Chine a, ou peut avoir, une production agricole abondante. Elle a, dans l'ensemble, le sol le plus riche du monde. Pendant quarante siècles, ce sol a été travaillé et entretenu. Il y a des ressources considérables en légumes, viande, fruit, poissons, pâtisseries, etc.
"Les famines que les Chinois ont à subir ne proviennent pas de véritables disettes, mais de fléaux tels que les inondations, la sécheresse et la guerre. Le réseau des communications est si mauvais qu'il est impossible de faire venir du ravitaillement assez rapidement d'une autre région, ou assez facilement pour qu'on puisse remédier à la disette locale, et ceci explique l'exode des populations d'une région à une autre pendant les famines. Dans la dernière famine où j'ai participé à l'organisation des secours, il a été moins coûteux de faire venir du blé par bateau des Etats-Unis à travers tout l'Océan Pacifique, que de le transporter à dos d'âne ou à dos d'homme d'une autre province distante de 500 kilomètres où l'on disposait d'importants excédents de denrées comestibles.
"La Chine a besoin de routes."
Anglais et Américains pouvaient développer le réseau routier de la Chine et y créer un réseau ferroviaire tout en disciplinant l'hydrographie du pays, ce qui eût absorbé une main-d'oeuvre considérable et, probablement, placé la Chine en tête des nations agricoles du monde.
Mais voilà : ces messieurs qui voulaient écouler leur production industrielle sur le marché chinois, y voulaient aussi écouler leur production agricole -- au moins en ce qui concerne les Américains.
Et, cette solution, qui n'était que d'attente, fut à son tour écartée.
En vertu de quoi, il faut se battre en Corée !
Mais, se demande le Français (même moyen) jusques à quand cette politique du cataclysme ?
Car l'Inde arrive à l'ordre du jour avec l'Iran, l'Egypte et tout le Moyen-Orient...
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