Toujours la productivité
En 1951, les charbonnages de France ont remonté au jour 55.300.000 tonnes de charbon.
Ce résultat bat tous les records, y compris celui de 1930 qui n'avait jamais été atteint depuis.
En 1930, on n'avait en effet réussi à produire que 55.100.000 tonnes. Encore avait-il fallu le concours de 209.000 ouvriers du fond travaillant 300 jours par an. En 1951, pour 200.000 tonnes de plus, on n'a employé que 169.000 ouvriers du fond qui n'auront travaillé que 225 jours dans l'année.
Il s'agit donc là d'une amélioration de la productivité minière, dans l'acception même que les autorités gouvernementales donnent au mot: diminution de la main-d'oeuvre, augmentation de la production, diminution des prix de revient.
Que je sache, le prix du charbon n'en a pas moins augmenté dans une proportion beaucoup plus grande que le salaire des mineurs.
Alors?
Nous ne manquons pas d'acier!
D'après la revue américaine "Iron Age", la production de l'acier s'est élevée à 224,7 millions de tonnes, soit 224.700.000 de kilogs pour l'année 1951.
Ceci fait à peu près 100 kg d'acier pour chaque habitant du globe. En admettant qu'on procède à une répartition égalitaire, chaque famille française moyenne, c'est-à-dire de quatre personnes, a droit à ses 400 kg. d'acier sous forme d'outils de travail ou d'ustensiles de ménage. L'année prochaine, elle aura droit à encore plus puisque la production va sans cesse en augmentant et que tous les Etats du monde s'attachent à atteindre ou à battre le record de l'Amérique, lequel a été, en 1951, de 200 tonnes d'acier à la minute et sera de 230 en 1952, disent les spécialistes.
Mais on ne procède pas à une répartition égalitaire. Alors, notre famille française moyenne de quatre personnes n'a pas les moyens d'acheter les 400 kg. d'acier qu'on fabrique à son intention. Les familles arabes, nègres, polynésiennes ou lapones non plus d'ailleurs et plutôt moins encore.
Alors, on fait des canons, des fusils, des bombes, etc. avec tout cet acier qui ne trouve pas de clients usuels particuliers.
Et ce sont les Etats qui l'achètent.
Bien entendu, en le faisant payer sous forme d'impôts par leurs contribuables respectifs auxquels ils le distribueront gratuitement un jour ou l'autre sous forme de projectiles.
Bien entendu encore, il ne peut être question de le transformer en charrues, en tracteurs, en lignes électriques, ou turbines pour produire du courant, etc. après en avoir financé l'achat par les mêmes moyens.
Ce serait trop beau.
De grappe en cuve...
A l'automne dernier, nous avions fait la soudure avec 20 millions d'hl. de vin bloqués dans les caves des producteurs.
Fort heureusement, la récolte de 1951 n'a pas dépassé les prévisions. Mais on peut prévoir que nous ferons la prochaine soudure avec 25 à 30 millions d'hl. qui n'auront trouvé preneur ni pour la distillation, ni pour la consommation familiale.
Bien sûr, on distillera des quantités appréciables et on bloquera tout ce qu'on pourra pour empêcher le cours du vin de baisser.
Mais dans ce domaine, il y a des limites qu'on ne peut absolument pas dépasser sans provoquer des catastrophes budgétaires ou des embouteillages dans les chaix.
Alors, le ministre de l'agriculture, en désespoir de cause, vient d'envisager de limiter la culture de la vigne à certaines régions seulement.
But poursuivi: en quinze ans, réduire la surface du vignoble français de 20 à 25% par rapport à ce qu'elle est actuellement.
Pour fabriquer des canons et des munitions, il faut à tout prix augmenter la production par une amélioration de la productivité.
Quand il s'agit de permettre à tout le monde de boire du vin à bon marché, c'est évidemment une tout autre question.
Angleterre-Allemagne-Japon
L'Angleterre se tient à l'écart de la Fédération européenne style Schuman-Philipp. Elle a ses raisons.
Tous récemment, le "New Chronicle" laissait échapper qu'au cours de l'année 1951, tandis que les produits sidérurgiques anglais trouvaient de moins en moins preneur sur les marchés mondiaux, 30.000 ouvrière et ouvrières du textile avaient été mis en chômage partiel, 25.000 tailleurs, et que, dans les grands magasins de confection, 8.000 employés étaient réduits pour longtemps à quatre jours de travail par semaine.
C'est que l'Allemagne vend exactement les mêmes produits que l'Angleterre. Or, jusqu'ici, l'Allemagne n'ayant pas de charges militaires à supporter, pouvait les mettre sur le marché à un prix de 30 à 40% inférieur à celui des Anglais.
L'économie anglaise et l'économie allemande étant concurrente, c'est presque tenter de résoudre la quadrature du cercle que de vouloir les fédérer.
Il ne peut pas être question d'empêcher l'Allemagne de produire les mêmes articles que les Anglais. C'est pourquoi, en France et en Amérique, histoire d'arrondir un peu les angles, on a mis sur pied l'affaire du réarmement allemand. Si on oblige les Allemands à fabriquer intensivement du matériel de guerre, ils ne pourront plus produire à si bon compte dans le textile, ni l'industrie sidérurgique usuelle et ils concurrenceront moins les Anglais...
Il suffisait d'y penser.
Mais la concurrence japonaise n'en serait pas pour autant éliminée.
Qu'à cela ne tienne: on en fera autant pour le Japon, un peu plus même de telle sorte qu'il ne puisse plus rien mettre sur le marché à des prix inférieurs de 50% à ceux des Anglais.
Pour sauver la bourgeoisie anglaise et l'amener à se fédérer à l'Europe, on fera crouler le monde entier sous les armes.
Après quoi, il faudra s'en servir.
La représentation nationale
Les informations parues dans la presse pendant la discussion du budget, nous ont appris que nos 624 députés nous coûteraient trois milliards 709 millions 615.000 francs pour l'année 1952, soit approximativement le millième du budget national.
Chaque député coûte donc environ six millions de francs au trésor public.
Si chaque citoyen de notre république démocratique et sociale réclamait autant pour son entretien, il faudrait un budget total de: 6 millions fois 45 millions =270.000 milliards.
Sans commentaires.
Payez vos impôts
Dans cette revue, nous avons souvent protesté contre les impôts en général et contre les impôts indirects en particulier.
A ce dernier titre, voici ce que la ménagère paie sur son marché, pour quelques denrées de première nécessité:
Sur un litre d'huile................................64 fr. 35
Sur un litre de vin............................... 16 fr.
Sur un kg. de sucre............................ .24 fr.
Sur un kg. de viande........................... 70 fr.
Sur un kg. de chocolat........................ 94 fr. 25
Sur un kg. de beurre......................... 146 fr.
Sur un kg. de café............................ 199 fr.
Sur un kg. de pain............................ 18 fr.
Encore ne s'agit-il que de l'impôt perçu au dernier stade chez le détaillant. A ces sommes, il faut ajouter les différentes taxes de transactions, les taxes à la production et les impôts perçus à la production et chez le grossiste. En règle générale, il convient de multiplier, dans chaque cas, les prix ci-dessus indiqués par 2,5 pour avoir le montant approximatif de l'impôt total.
Ceci revient donc à dire que, dans notre meilleur des mondes, une somme qui varie entre les deux tiers et les trois quarts du prix de vente au détail de toutes les marchandises est affectée à l'impôt.
Si les services que l'Etat rend à l'individu ne tombent pas facilement sous le sens, il y a une chose qu'on ne peut pas ignorer et c'est qu'ils coûtent fort cher.
Malgré cela...
Malgré cela, le budget de la nation est toujours en déficit. A tel point qu'on ne peut plus en avoir aucune idée chiffrée.
En 1949, pour dissimuler ce déficit, le ministre des finances décida que les impôts directs seraient payés non plus comme le voulait la tradition à la fin d'un exercice sur les revenus de l'exercice précédent, mais avec une année d'avance.
Cette année-là, le budget absorba les ressources de deux années.
Ca ne suffit encore pas. De nouveau on est à court.
Alors, en 1952, il faudra payer les impôts de l'année 1953. En partie, tout au moins.
A ce rythme, on arrivera bien à récupérer en 1953 la totalité des impôts de 1955!
Et, progressivement, à payer ceux des générations futures!
Evolution de la formule de l'impôt
Intervenant sur le chapitre des dépenses militaires, M. Mendès-France a révélé que "dans l'ensemble des ressources fiscales, l'impôt sur le revenu figurait pour 25%, l'impôt sur la fortune pour 6% et les impôts de consommation pour 69% alors qu'en 1938, ces différentes têtes de chapitres figuraient respectivement pour 28%, 17% et 55%".
M. Mendès-France n'a pas été démenti.
Le pourcentage d'allégement au profit de la fortune acquise a donc été reporté sur la consommation.
Les riches paient moins et les pauvres un peu plus.
Encore une guerre et la consommation supportera, toute seule, tout le poids des impôts.
Evolution des dépenses budgétaires
Sur le chapitre des dépenses militaires, M. Mendès-France a encore révélé qu'en 1952, Indochine comprise, on ne pourrait pas s'en tirer à moins de 1.600 milliards, si on suivait le gouvernement.
Et il a précisé:
"En 1950, nos dépenses d'investissements étaient doubles de nos dépenses militaires. En 1951, elles leur ont été inférieures. En 1952, elles ne seront guère supérieures à leur moitié".
A ce rythme, il est évidemment à craindre que les dépenses militaires arrivent très rapidement à absorber à elles seules toutes les ressources du budget!
La guerre d'Indochine
Toujours d'après M. Mendès-France, elle en est arrivée à nous coûter 500 milliards par an, soit 1 milliard et demi par jour.
"... 500 milliards d'inflation et de misère qui sont, sous tous les rapports, un aliment de choix pour la propagande communiste..."
Et M. Mendès-France conclut qu'il faut de toute urgence rechercher des possibilités de traiter avec le Viet-minh pour arrêter enfin cette guerre criminelle.
Certes, les raisons de l'interpellateur ne sont pas les nôtres avec lesquelles elles sont en contradictions formelles sur beaucoup de points souvent essentiels. Mais nous sommes entièrement d'accord avec lui lorsqu'il s'écrie:
" On me répond qu'on ne peut pas traiter avec le Viet-minh parce que traiter avec le Viet-minh c'est traiter avec les agents de Moscou. En Corée, cependant, c'est bien avec les agents de Moscou qu'on traite!"
Pour avoir la paix, pour la sauver ou pour la ramener, on peut traiter avec n'importe qui, jusques et y compris avec le diable.
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