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TRIO DE CANARDS

par Paul Rassinier

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Défense de l'Homme, numéro 66, avril 1954, p. 18-20

 Trois beaux canards s'en allaient au champ. L'air était pur, la route était large, l'horizon joyeux.

 Le premier devant rythmait la marche. C'était un dur : le caïd de toutes les mares du coin. Précoce, il avait, dès son plus jeune âge, tourné son nid dans le sens de l'Histoire et patiemment mis sur pied toute une philosophie dont le thème central était l'existence d'abord. Une philosophie de canard et tous les canards lui en étaient reconnaissants car, que peut-il y avoir de plus important pour un canard que d'exister envers et contre tous les dangers qui menacent la basse-cour ? En conséquence, sur toutes les mares, on ne jurait que par lui et, dans toutes les basses-cours, conscient de son infériorité, même le coq ne chantait plus en sa présence. Partout, il était Jean-Paul comme d'autres sont, chez les hommes, Toto, Jo la Terreur ou Pierrot le Fou.

 Le premier devant, il allait donc et il rythmait la marche. Les deux autres suivaient, confiants, sans se retourner sur les millions de cadavres de canards qui, dans l'immense cour de l'immense ferme, attestaient l'importance de la dernière saignée et sans même y penser : ils existaient, tout était là.

 Et, ils ne regardaient que l'horizon qui était joyeux comme le sont toujours tous les horizons pour tous les canards qui existent.

 Enfin, ils suivaient Jean-Paul et, l'expérience en témoignait, Jean-Paul était un guide sûr.

 A la vérité, une dizaine d'années auparavant, il les avait bien un peu heurtés en leur disant tout à trac et sur le ton du plus grand mépris que, rien qu'à les regarder tous, il avait « la nausée ». A la longue, c'était ce mépris même qui les avait conquis. Ce mépris et un sens de l'opportunité si exercé qu'il lui valait jusqu'au grâces de la fermière : quand elle se mettait à égorger, il fallait entendre le canard Jean-Paul, parler de « l'Être » et du « Néant » au peuple des canards. Avec quelle maestria, bon Dieu ! La fermière elle-même applaudissait.

 Le sang l'inspirait : une fois, en pleine séance d'égorgement, il se mit à discourir sur les « Mouches » et les mains pleines de sang, toutes les fermières du finage se rassemblèrent pour l'entendre.

 Tout le peuple canard était subjugué.

 Encouragé par le succès, un peu plus tard, il fit des arpèges sur les « Mains sales » et sa popularité loin d'être entamée, sortit grandie encore de cette affaire, quand on apprit que les mains sales en question n'étaient pas celles des fermières qui égorgent les pauvres canards.

 Il faut dire que, dans le même temps, sa cane qui tenait le rôle d'« Invitée » dans toutes les cérémonies du genre, faisait d'autres et aussi brillants arpèges en prenant pour thème « Le sang des autre »" et, qu'à eux deux, ils constituaient une sorte de « Mur », d'une solidité à toute épreuve. Leur nid bien tourné dans le sens de l'Histoire, ils étaient le centre du monde meurtri des canards.

 Le centre et l'espoir.

 Or, chacun sait que le soleil fait naître l'espoir et qu'il se lève à l'Est.

 Nos trois beaux canards donc allaient au champ dans la direction de l'Est. Lui devant qui rythmait la marche, les deux autres qui suivaient confiants. L'air était pur, la route était large, l'horizon joyeux.

 La cane était restée au nid pour préparer l'apéritif du retour : un « Mandarin ».

 

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 Les deux autres suivaient...

 Le deuxième n'avait pas d'Histoire mais il avait des dents et il savait que le soleil se lève à l'Est.

 Il suivait le premier.

 Comme il avait, lui aussi, le goût du sang, tandis que l'autre parlait d' « Être »  et de « Néant », il se mit à parler de « Terreur » parce que c'était un sujet de circonstance et d' « Humanisme », parce que c'était un sujet de can[ul]ard, « L'Humanisme et la Terreur » constituant, au surplus, une association d'idées des plus heureuses, si on sait que le premier est né d'une réaction à la seconde.

 Les scrupules, non plus, ne l'embarrassaient guère : il avait tourné son nid dans le sens de l'Histoire en déclarant froidement et d'entrée de jeu que la Vérité ( avec un grand V ) était seulement ce qui était utile à la sienne propre.

 -- La dialectique, disait le premier par manière de l'encourager.

 Et ils échangeaient entre eux des sourires entendus.

 Le peuple des canards se sentait d'autant plus à l'aise : grisé par l'un, endormi par l'autre, il en oubliait la fermière qui égorgeait de plus belle, sans même qu'ils se rendissent compte qu'ils étaient de moins en moins nombreux à exister.

 Il leur suffisait que le canard Jean-Paul et le canard Maurice fussent parfaitement d'accord et allassent toujours au champ, l'un suivant l'autre.

 En direction de l'Est où se levaient le soleil et l'espoir.

 Quant à la fermière, son sourire s'élargissait, il fallait voir.

 

∞∞∞∞∞∞∞∞

 

 Les beaux accouplements se font toujours à trois. En religion comme en amour et en politique : elle, lui et l'autre, le père, le fils et le saint-esprit, le M.R.P., le Parti socialiste et le Parti communiste, etc.

 Au masculin comme au féminin, le troisième est le ciment du couple.

 Survint donc le troisième canard qui se mit à suivre par derrière : David.

 On se mit à prononcer son nom à l'anglaise et ce fut le délire.

 Au vrai, David était un tout petit canard, un canard sans importance -- boiteux, c'est le mot. Il avait d'abord voulu faire bande à part et cela l'avait entraîné dans un certain nombre de mésaventures au cours desquelles il avait souvent senti, sous les plumes du cou, la lame froide du couteau de la fermière, et dont il n'était revenu que par miracle.

 La dernière qui l'avait tenu près de deux années entre la vie et la mort fut décisive en ce qu'elle lui fit découvrir le canard Jean-Paul et le canard Maurice à qui tout réussissait : il décida de tourner comme son nid dans le sens de l'Histoire en général et, si possible, de la sienne en particulier.

 Son astuce fut de s'adresser au peuple des canards à la première personne du pluriel, de s'identifier à lui, et de lui parler des « Jours de NOTRE mort ».

 Comme on ne le prenait tout d'abord pas très au sérieux, il se drapa dans sa dignité pour assurer que « le Pitre ne rit pas ».

 Et comme il mettait l'accent sur le soleil qui se levait à l'Est, le canard Jean-Paul et le canard Maurice vinrent à son secours en assurant qu'en effet, le pitre ne riait pas.

 Et ils partirent au champ, le premier devant qui rythmait la marche, le second suivant et le troisième par derrière.

 L'air était pur, la route était large et, à l'Est, l'horizon joyeux.

 Cela s'appela le Rassemblement démocratique et Révolutionnaire.

 Le sourire de la fermière était de plus en plus large.

 

∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞∞

 

 C'est le canard David qui, le premier, s'avisa que si le soleil se levait à l'Est, il se couchait à l'Ouest.

 Après avoir monté en épingle les camps de concentration allemands pour dissimuler les camps russes et fait l'apologie des communistes, David Rousset a découvert les camps russes et traîné les communistes devant les tribunaux. L'apologie des communistes ne payant plus, il se mit à faire celle du bloc Atlantique et à en vanter les prisons modèles.

 Le Rassemblement Démocratique et Révolutionnaire en mourut mais David Rousset est resté lui-même : si quelque chose ou quelqu'un a changé de sens, ce n'est pas lui, mais l'Histoire, laquelle a, du même coup, changé l'orientation de son nid.

 M. Merleau-Ponty, qui avait des dents, est aujourd'hui professeur au Collège de France. Pour lui aussi, le soleil se couche à l'ouest : il vient de découvrir « les aventures de la dialectique » et que « Communisme et anti-communisme sont solidaires dans leur antagonisme parce qu'il y a entre eux la parenté de deux systèmes qui ne peuvent se penser ouvertement tels qu'ils sont, que chacun donc en est réduit à se défendre par la réfutation de l'autre et a besoin de son ennemi pour se justifier. La crise de l'idéologie libérale et celle de l'idéologie révolutionnaire paraissaient condamner les deux systèmes à l'inconscience et à la guerre. »

 Après avoir fait l'apologie du régime soviétique et déclaré qu'il avait « les mêmes intérêts et les mêmes valeurs que lui », il renvoie dos à dos communisme et anticommunisme qui envisageaient l'un et l'autre, de part et d'autre du rideau de fer, « une collaboration loyale à l'échelle mondiale ».

 Ce n'est pas encore une condamnation catégorique du bolchévisme mais, si on en juge par le contexte, c'est sûrement un premier pas.

 Car M. Merleau-Ponty a découvert d'autres choses encore.

 Par exemple qu' « une avant-garde révolutionnaire n'était pas nécessairement communiste ».

 Que la planification autoritaire de l'économie avait ses inconvénients et qu'il est « probablement moins onéreux d'orienter la production, de mettre en place des mécanismes qui la poussent sur les pentes favorables, que de l'organiser de pied en cap par des moyens dictatoriaux. »

 Et que les formes juridiques de la propriété dans la société et le mode d'appropriation des moyens de production et d'échange avaient beaucoup moins d'importance « que la biologie de ces sociétés, leur orientation bonne ou mauvaise sous le rapport de la productivité ».

 Toute une doctrine, en somme.

Celle de M. Alfred Sauvy, économiste de circonstance, promu à la dignité par le Vatican, à la Libération.

 M. Merleau-Ponty revient de Moscou en passant par Rome.

 Quant à Jean-Paul Sartre, il fait comme le nègre, il continue. Il va toujours devant, mais les deux autres ne suivent plus. Toutefois, l'air n'est plus aussi pur, la route n'est plus aussi large et, en direction de l'Est, l'horizon n'est plus aussi joyeux : un certain Kanapa vient de lui dire des choses qui le pourraient bien inciter à reconnaître à son tour que le soleil se couche bien à l'ouest.

 C'est un rusé et ses facultés de mimétisme sont éprouvées : il sait bien qu'il peut attendre le dernier moment pour remettre en scène soit la « P... respectueuse », soit « les Mains sales ».

 Avant d'en décider, il faut d'abord qu'il sache si la prochaine guerre aura lieu ou non et, le cas échéant, si Paris sera occupé par les Russes ou par les Américains.

 Il n'est donc pas a priori exclu que les trois beaux canards retournent ensemble au champ, le premier devant, le second suivant et le troisième par derrière.

 Mais dans une autre direction !

 


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