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Contribution à une définition de l'inflation


par Paul Rassinier

 

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La mort de Staline et les élections municipales n'ont pas réussi à détourner l'attention des problèmes cruciaux pour le régime.

Dans le premier, il est remarquable qu'on ait renoncé à monter, sur le thème central de la mort de l'Ogre, le roman feuilleton qui s'imposait, avec multiplication des circonstances mystérieuses, intervention de poison, piqûres, rebondissements, etc. La France ne manque pas de littérateurs au niveau de ces situations et, en bonne logique, on pouvait s'attendre à ce qu'il en fût ainsi. Or, il n'en a rien été: bien vite on s'est aperçu que la mort d'un homme ne signifiait pas celle des structures qu'il personnifiait, -- qu'en gros, les événements restaient semblables à eux-mêmes et que, fût-ce avec moins de moyens ou de brio, ses successeurs continueraient dans le même sens la partie jusqu'au bout. Peut-être l'espoir qui nous a tous subjugués à l'annonce de cette mort ne sera-t-il pas déçu, mais encore faut-il, dès maintenant, nous persuader que ce sera seulement dans la mesure où les successeurs de Staline, ou bien se dévoreraient entre eux, ou bien, malgré leur parfait accord, tiendront moins bien que lui la situation en mains. De toutes façons, ni le gouvernement français, ni ceux qui se le sont associé dans le bloc atlantique ne pouvait officiellement partager cet espoir qui les eût acculés à l'arrêt de la politique de surarmement et au changement d'orientation de toute l'économie et c'est ce qui explique à la fois le discours de M. Bidault à la Tour Eiffel et la prudence des journalistes à ses gages.

Dans le second cas, il est tout aussi remarquable que les élections municipales n'aient pas donné lieu à plus de commentaires. En d'autres temps, on eût fait tout un plat de la liquéfaction du R.P.F. et des quelques 300.000 voix perdues par le Parti communiste. C'est que, ni à droite, ni à gauche on n'est très fier du résultat. A droite, où l'on est en train d'opérer un regroupement sous la bannière de notre sainte mère l'Eglise, on n'est pas très sûr que la liquidation du général à laquelle on vient de procéder soit une si bonne affaire: l'Eglise sait pertinemment que son goupillon n'a jamais été très fort s'il lui manquait l'appui du sabre. Or, de Gaulle, c'est le sabre, peut-être pour une longue période, écarté du goupillon. L'avenir du nouveau regroupement dépend donc maintenant des réactions de l'armée.

A gauche, on est en proie à la même incertitude et la raison serait déjà suffisante pour mettre une sourdine aux habituels cris de victoire. Ce qu'on s'y demande en premier lieu, c'est si, en définitive, ce regroupement sous le signe du goupillon ne sera pas plus dangereux que celui qui s'était précédemment opéré sous le signe du sabre et qu'on vient de mettre en pièces. En plus, il y a le Parti communiste dont les positions n'ont pas été sérieusement entamées. En plus, il y a aussi la situation financière qui, pour la première fois depuis fort longtemps, semble poser un problème de régime.

Le fait que cette situation financière ait brusquement pris le pas sur des événements comme la mort de Staline et les élections municipales qui sont des sujets en or, de véritables serpents de mer pour tous les pisse-copie officiels, eût déjà suffi à mettre en évidence son exceptionnel caractère de gravité. Plus symptomatique encore est cependant le ton sur lequel on en parle.

Nulle part il n'est, en effet, plus question de situer le débat sur le plan du cycle infernal des salaires et des prix, de célèbre mémoire. Pas davantage on ne reprend les thèmes tout aussi usés de l'incidence des impôts sur le prix de la vie, de la dévaluation ou de l'emprunt. Du plan pratique, les discussions sont passées sur le plan théorique et doctrinal, ce qui veut dire que la bourgeoisie est à court d'expédients. Tous les économistes distingués, tous les professeurs de droit économique sont mobilisés et il est question de régime du profit, de réforme de structures, du système fiscal, du rôle de la monnaie, du circuit de la distribution, de l'inflation, etc.

En bref, c'est tout le problème social qui est en délibéré. Et si, sous tous ces vocables, on continue à ne l'envisager que sous son seul aspect financier, il faut en voir la raison dans la force de l'habitude et l'inaptitude des Français à dominer leurs sujets de préoccupation. C'est ainsi que, depuis la chute de M. Pinay, une multitude de thèses a vu le jour sur l'inflation, phénomène auquel tout se ramène dans l'esprit des bons auteurs.

Malheureusement, comme en de nombreux autres cas, il s'agit, là encore, d'un mot qui a perdu son sens à force d'avoir été galvaudé. S'il n'est peut-être pas très important de le lui faire retrouver, c'est, en tout cas, un passe-temps comme un autre.


Du sens littéral au sens usuel

M. Littré, qui était un savant, nous dit que le mot "inflation" est un terme didactique et qu'il caractérise l'action d'enfler ou de s'enfler. Et, pour qu'on ne se méprenne point, il ajoute que "l'enflure est le résultat de l'inflation". C'est tout, et c'est dire que le mot ne s'applique pas seulement aux questions monétaires comme l'usage le veut actuellement: la grenouille qui voulait se faire aussi grosse que le boeuf et qui s'enfla tant qu'elle creva, faisait de l'inflation.

Ce que je veux retenir de cette définition, c'est le caractère anormal qui est implicitement attaché à l'opération d'inflation: une enflure est toujours un phénomène anormal. La grenouille de quelques jours qui devient une grenouille de quelques semaines ou de quelques mois, grossit normalement: on ne dit pas qu'elle fait de l'inflation.

Ce caractère anormal qui est prêté aux choses à propos desquelles on parle d'inflation est d'ailleurs retenu par une autre autorité en matière de définition: M. Larousse. Mais M. Larousse fait un pas en avant par rapport à M. Littré, en ce sens qu'il limite l'emploi du mot aux questions monétaires. Ecoutons-le:

 

C'est tout, mais c'est clair: qu'on se réfère à l'un ou à l'autre, qu'on limite le champ d'application du mot aux problèmes financiers ou qu'on l'étende à tous les problèmes didactiques, une inflation reste un phénomène anormal selon l'un, excessif selon l'autre.

Or, on est arrivé à ce point qu'aux yeux de tous les politiciens, de tous les économistes distingués et de tous les professeurs de droit, n'importe quel accroissement du volume des billets en circulation est considéré comme une inflation, c'est-à-dire comme une chose anormale.

A cela, il y a une raison et c'est probablement qu'aucun d'entre eux n'est capable de s'abstraire du régime dans lequel nous vivons et de raisonner dans l'absolu comme il est de règle dans les laboratoires.


Argument à décharge

J'ai déjà expliqué ces choses: à l'échelle mondiale, nous vivons dans un système d'échanges par l'intermédiaire de la monnaie, qui a été conçu au temps où les Phoeniciens échangeaient les bois du Liban contre l'étain des Cassitérides. A cette époque, des gens qui n'étaient pas des savants, avaient établi un rapport de valeur entre la production totale et la production d'or du monde connu. Depuis, on se comporte comme si on prétendait que ce rapport n'a pas changé.

Cependant, les faits se sont insurgés contre cette prétention et il a fallu successivement doubler la monnaie d'or de la monnaie de papier, puis inventer la monnaie de compte ou scripturale. Ceci tient à ce que la production d'or a augmenté dans des proportions considérablement plus faibles que le total de la production dans tous les autres domaines. Ainsi a été rompu l'équilibre entre la production et la consommation qui existait au temps des Phoeniciens. Ainsi se pose le problème de l'abandon de l'étalon-or au profit de l'étalon-marchandises ou de l'étalon-travail. On voit le drame: l'étalon-or officiellement abandonné ouvre la voie à toute une série de réformes au bout desquelles il y a la mort du profit...

En bonne logique, il devrait y avoir au moins deux sortes d'économistes distingués, de politiciens et de professeurs de droit, chacun des clans ayant sa définition de l'inflation: ceux qui sont partisans de l'étalon-or et ceux qui sont partisans de l'étalon-marchandises ou de l'étalon-travail. Pour les premiers, il y aurait inflation monétaire chaque fois qu'on serait obligé d'augmenter le volume de la monnaie papier plus vite que n'augmente la production de l'or. Pour les seconds, il n'y aurait jamais inflation tant que le volume des moyens monétaires ne serait pas capable d'absorber la production totale des richesses créées par le travail des hommes, seul moyen d'établir l'équilibre entre la production et la consommation. En fait, c'est ce qui existe.

Mais, au préalable, il eût d'abord fallu définir l'unité marchandise par l'unité travail.

Précisément, c'est ce que personne n'a fait et c'est pourquoi les seconds se laissent influencer par les premiers au point de raisonner comme eux et de se croire, comme eux, toujours au temps des Phoeniciens.

C'est aussi pourquoi n'importe quel accroissement des moyens monétaires est considéré par tout le monde comme étant une inflation. Alors qu'il est des accroissements très normaux du volume de ces moyens monétaires.


La leçon de l'exemple

Si l'on continue de prétendre qu'aucun système d'échange ne se conçoit qu'à base d'étalon-or, on s'engage par là-même à harmoniser entre elles la production de l'or et le total de toutes les autres productions à peine de renoncer à l'indispensable équilibre production-consommation. C'est la quadrature du cercle: il est en effet à jamais exclu que l'augmentation de la production soit parallèle dans l'un et l'autre domaine. Au maximum, on peut, par la pratique du malthusianisme économique, modeler l'ensemble de la production sur celle de l'or. Mais alors c'est continuer dans la voie tracée par vingt siècles d'Histoire et on sait où cela conduit: une faillite par siècle, quelques guerres et quelques chambardements sociaux, -- la faillite du Directoire après celle de la rue Quincampoix... En bref, c'est s'en remettre à la vieille pratique de la dévaluation systématisée, c'est-à-dire du vol légal des classes pauvres par les classes riches: on conseille aux gens d'épargner et, ensuite, on décrète que ce qu'ils ont épargné perd 99% de sa valeur par demi-siècle. C'est évidemment une solution et, quand tout le monde l'accepte, comme il semble bien que se soit le cas, on ne risque rien à la déclarer essentiellement morale.

Mais, dans ce cas, il y a toujours inflation des moyens de paiement.

Si, au contraire, on admet que, quoi qu'on fasse, les moyens de paiement ont tendance à se modeler sur la production globale, peut-être vaudrait-il mieux consacrer cet état de fait par une loi et admettre aussi que l'augmentation du volume des moyens de paiement doit être parallèle à celle du volume de la production. Mais, alors, poussée jusqu'à ses extrèmes conséquences, cette doctrine conduit tout droit à l'économie distributive, c'est-à-dire à la prise au tas, c'est-à-dire encore à la mort du profit et du régime capitaliste.

Il n'y a pas de solution intermédiaire.

Quelque dépit qu'en aient les économistes distingués, les politiciens et les professeurs de droit, la tendance est à la deuxième conception, sinon dans les esprits, du moins dans les faits.

Il faut donc se demander si, au cours d'une période donnée, par exemple de 1938 à 1953, l'augmentation des moyens de paiement a suivi la même courbe que celle de la production globale.

Tout le monde est d'accord pour reconnaître qu'en France, l'ensemble de la production industrielle est à l'indice 140 environ par rapport à 1938, date à laquelle le montant des billets en circulation était d'environ 110 milliards de francs. Alignés à l'indice 140, ces 110 milliards, toujours en francs de 1939, devraient s'être transformés en 154 milliards, soit, en francs de 1953 (environ vingt-cinq fois plus, puisque le pouvoir d'achat du franc est environ vingt-cinq fois moindre), 3850 milliards. Or, le montant actuel des billets en circulation est de l'ordre de 2 100 milliards de francs. On peut donc émettre encore 1 500 milliards de papier monnaie sans qu'il y ait inflation. Seulement, pour que cette opération se justifie économiquement, il faut délibérément abandonner l'étalon-or, c'est-à-dire ruiner ceux qui l'ont thésaurisé, en l'occurence les classes riches. Et, pour n'en point compromettre les effets, il faut accepter toutes les réformes de structure qui en découlent. Manifestement, les classes riches ne sont pas décidées à accepter ainsi de se suicider. A titre de référence historique, on peut citer l'exemple de la noblesse et du clergé en 1789: condamnées à mort et le sachant, ces deux classes privilégiées ont préféré mourir en combattant et en invoquant dans le même temps Dieu et tous les articles de la foi chrétienne. C'est la même attitude qu'adopte aujourd'hui la bourgeoisie qui leur a succédé.

Avec, croit-elle plus de chances de l'emporter car elle n'a en face d'elle, ni les hommes décidés à la mettre en échec, ni les théoriciens capables de les encadrer et de codifier la foi nouvelle par voi de conséquence toujours dans les limbes.

Mais mon propos ne visait qu'à définir l'inflation dans son acception classique, c'est-à-dire périmée et dans son acception révolutionnaire...

Au lecteur de confronter cette définition avec celle qu'à l'occasion des mesures qu'ils sont en train de prendre pour tenter une nouvelle fois de redresser la situation, nos ministres lui en donneront.

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Notules complémentaires


 


Un ministre à la hauteur

Parlant du rôle que peut jouer l'épargne pour stimuler l'expansion économique, M. Bourgès-Maunoury a récemment déclaré:

"Je pense que cette épargne stérilisée représente la vraie réserve de pouvoir d'achat grâce à laquelle le pays doit pouvoir sans inflation poursuivre l'accélération de son rythme de production."

Par épargne stérilisée, le Ministre entend l'or que les français aisés ont réussi à se procurer soit par le canal du marché noir, soit légalement dans les banques depuis que le commerce de l'or est libre.

Pour bien le comprendre, il faut savoir que M. Bourgès-Maunoury est partisan de l'étalon-or.

Il pense donc que si les détenteurs d'or souscrivaient en masse -- et en or! -- à quelque nouvel emprunt, la Banque de France pourrait émettre des billets en contre-partie de cet or et les remettre au Trésor.

A ses yeux, il n'y aurait pas inflation.

Mais il n'oublie qu'une chose: la contre-partie en billets de l'or qui se trouve chez les particuliers existe déjà, puisqu'elle a servi à l'acheter. Et elle circule: quand un particulier achète en banque ou au marché noir de l'or avec des billets de banque généralement dissimulés, pratiquement, cela revient pour lui et pour tout le monde à remettre dans le circuit de la monnaie papier qui n'y était pas. Si, réussissant à récupérer cet or, la Banque de France émettait des billets en contrepartie, l'opération consisterait à mettre en circulation une seconde quantité de papier gagé par la même quantité d'or.

Et, au regard de l'économie classique, il y aurait inflation.

Mais, dans notre étrange époque, pour être Ministre -- et des Finances, s'il vous plaît! -- on n'est pas tenu de savoir cela.


Un professeur de droit émérite

M. Robert Mossi, professeur de droit à la Faculté de Grenoble, s'est emparé de la déclaration de M. Bourgès-Maunoury et en a fait le sujet d'un article dans le Monde du 24 février.

M. Robert Mossi est socialiste. En conséquence, il pense que la monnaie doit être gagée non plus sur l'or, mais sur l'ensemble de la production.

Avant de se prononcer et de dire s'il y a ou s'il n'y a pas inflation dans l'exemple cité par M. Bourgès-Maunoury, pour être logique avec lui-même, il devrait donc se demander quelle quantité de monnaie on peut émettre sans qu'il y ait infliation, en se référant à l'augmentation du volume de la production pendant une période donnée.

Comme nous, il arriverait à cette conclusion que, par rapport à 1938, on peut émettre sans danger environ 1500 milliards de nos francs actuels.

Si l'or détenu par les particuliers excède 1500 milliards de nos francs actuels -- ce qui nous étonnerait tout de même! -- les billets émis en contrepartie constitueraient une inflation. Mais, dans le cas contraire, un simple et un des plus normaux accroissements du volume de la circulation monétaire.

Or, M. Robert Mossi, professeur de droit, ne s'étant pas demandé tout cela, conclut néanmoins à une inflation.

On ne comprend plus, ou plutôt... on comprend trop!


L'arbitre

M. Robert Barthié, adepte de l'Economie franche (Ecole suisse dont le protagoniste fut Sylvio Gesell avec une théorie qui est un compromis entre l'étalon-or et l'étalon-marchandise) a voulu départager le ministre et le professeur.

Voici donc ce qu'il écrit dans l'Echo de la finance du 20 mars 1953:

 

Et d'autre part:

 

Les deux paragraphes se suivent.

On ne comprend pas davantage: tout au plus peut-on souligner la contradiction entre les deux affirmations.

Si "le véritable problème consiste à déterminer etc." (ce qui est évident à nos yeux), avant de se prononcer sur l'appellation qui convient à l'opération proposée par M. Bourgès-Maunoury, il faut faire le calcul que nous reprochons à M. Robert Mossi de n'avoir point fait.

M. Roger Barthié eût ainsi évité, lui aussi, de confondre accroissement et inflation.

Ceci dit, si on nous le demandait, nous conviendrions volontiers qu'en régime capitaliste, n'importe quel accroissement du volume des signes monétaires est toujours une inflation et qu'il en sera ainsi tant qu'on aura pas abandonné l'étalon-or.


Une grave erreur

MM. Bourgès-Maunoury, Robert Mossi et Roger Barthier commettent tous trois la même et grave erreur qui fausse tous leurs raisonnements: l'Epargne qu'ils confondent volontiers avec la thésaurisation et à laquelle ils prêtent gratuitement la vertu de ralentir la production en retirant du papier-monnaie de la circulation.

Or, l'épargne a justement un rôle contraire.

S'il n'y avait ni banques, ni caisse d'épargne, les particuliers chez qui on ne réussira jamais à tuer le souci d'économiser pour les mauvais jours, tant que durera le régime capitaliste, n'auraient qu'un moyen de le faire: entasser les billets dans les lessiveuses de célèbre mémoire, sous la pile de draps de la vieille armoire ou dans le "bas de laine"... Comme les caisses d'épargne et les banques existent, ils les y portent pour avoir un intérêt minime et malgré le risque de la dévaluation. Et les caisses d'épargne comme les banques les investissent dans les "affaires".

Loin de ralentir la production, l'épargne la stimule donc. Elle offre même aux capitalistes la possibilité de se concerter et de choisir le genre de production qu'ils stimuleront. Inutile de préciser qu'elle n'est d'ailleurs conçue et encouragée que pour cette double raison.

Dans la mesure où elle consiste à acheter de l'or, la thésaurisation ne ralentit pas non plus la production: que ce soit au marché noir ou au maché officiel, les billets qui servent à acheter cet or sont remis dans la circulation. Dans le cas seulement où les transactions s'opèrent au marché noir, les billets partent à l'étranger et leur vitesse de rotation se ralentit du temps que l'achange met pour les présenter aux guichets de la maison France. Mais ce genre de transaction se fait de moins en moins, autant dire pas du tout, depuis que le marché de l'or est libre en France et c'est sous l'angle du trafic de devises qu'il faut l'envisager et le traiter, non sous celui de l'épargne et de la thésaurisation.


De Pinay à Mayer

Arrivant au pouvoir, M. René Mayer a dû demander 50 milliards à la Banque de France sous la forme d'une avance de 25 milliards et d'une élévation de 25 milliards du plafond des avances. Puis il a dû lui emprunter encore 80 milliards. Aujourd'hui, il a de nouveau besoin de 240 milliards. Pour justifier tous ces besoins, M. René Mayer nous dit que le budget voté en décembre dernier est en déficit d'environ 800 milliards, soit 200 de plus que celui de l'année précédente.

Naturellement, bien qu'il ne le dise pas en clair et se borne à le laisser entendre, cela est le résultat de l'expérience Pinay.

Si on veut bien se reporter au N . 53 de Défense de l'Homme, on y trouvera le bilan de l'expérience Pinay, précisément chiffré aux quelque 400 milliards dont la trésorerie a besoin aujourd'hui.

M. Pinay a réduit les investissements, contracté des dettes à l'Union Européenne des paiements, augmenté le déficit de la balance commerciale, etc. et, en contre-partie, il n'a augmenté en un an, que de 130 à 150 milliards le montant de la circulation monétaire au lieu des 350 habituels.

Ce faisant, il a mis au compte de son successeur les dettes qu'il contractait et dont il était évident qu'un jour ou l'autre il faudrait les payer.

C'est ce qui arrive.

Pour n'être point en reste, par le même procédé, M. René Mayer va contracter des dettes qu'il fera porter au compte de son successeur.

Ainsi, l'un et l'autre pourront prétendre qu'ils ont limité au minimum, à la fois l'accroissement et l'inflation des moyens de paiement.

M. Pinay prétend même que sous son règne il n'y a eu ni l'un ni l'autre!

Mais cet accroissement se fait quand même par la force des choses: il est seulement en retard sur la production et il ralentit la production en limitant la consommation.

C'est la raison de la crise et de toutes les crises.


La Thérapeutique Mayer

En conclusion de ces savantes discussions entre ministres et professeurs de droit, M. René Mayer annonçait vers le milieu de ce mois qu'il augmenterait les tarifs des chemins de fer, taxerait les transports routiers, frapperait l'alcool de nouveaux droits et procèderait à un abattement de 10% sur toutes les dépenses civiles après avoir rigoureusement contrôlé les dépenses militaires.

Comme on le voit, M. René Mayer a de l'imagination.

Toutes ces mesures sont présentées sur le thème général de la réforme constitutionnelle, c'est-à-dire du renforcement des pouvoirs de la bourgeoisie.

En fin de compte, c'est de cela surtout qu'il est question, et de cela seulement.

En attendant, nous allons à grands pas vers une crise ministérielle et il serait rare que M. René Mayer l'évitât avant les vaccances parlementaires, s'il y réussit avant que ces lignes paraissent.

Peut-être même, les vaccances parlementaires seront-elles, comme à l'accoutumée, le seul moyen d'éviter la crise ministérielle.

Ainsi s'achemine-t-on vers un certain totalitarisme. C'est à craindre.

 


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